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La suite des choses: Une deuxième génération sacrifiée, et la Contre-culture - Euthanasie : De la discussion jaillit la lumière

La suite des choses: Une deuxième génération sacrifiée, et la Contre-culture

(Tome Premier : L’euthanasie et le choix — Partie C : l’euthanasie et la médecine — Section III : Une société en rupture — Sous-section III b) : La suite des choses: Une deuxième génération sacrifiée à la guerre, et la Contre-culture des Années Soixante)

–“Le début d’un temps nouveau” (1970): Auteur-compositeur Stéphane Venne (1941-); Artiste-interprète Renée Claude (1939-2020)

Chapitre: L’Après-guerre: un retour au “normal” désiré (et largement attendu) mais impossible dans les faits

–Une brave apparence sur des blessures profondes et partout ressenties

Regardée superficiellement, la société ne présenta pas, à ce moment, les symptômes évidents d’une tourmente aussi profonde que celle dont j’aurais tenté, ici, de tracer les lignes : le paradigme de crime-et-châtiment se poursuivait avec un recours généreux à la peine capitale; le devoir patriotique du soldat ne fut pas encore largement contesté (au moins pas en principe); les gens fréquentaient assidûment les divers lieux de culte et ils enseignaient toujours à leurs enfants un credo inchangé de « bien » universel; la chasteté, le mariage et l’enfantement « légitime » furent les conditions requises pour bénéficier d’un statut de femme « respectée » (ou mème minimalement sécuritaire); le divorce fut un phénomène marginal qui ne toucha, essentiellement, que les riches. Mème l’échec de la Prohibition ne démentit pas, visiblement, cette apparence de continuité dans les formes traditionnelles, puisque cet échec ne représenta pas un recul par rapport aux devoirs préalablement reconnus de l’individu devant la société. Au contraire, il a pu être présenté comme le rejet d’une innovation proposée, et donc, comme la réaffirmation du statu quo, et des valeurs du passé.

Mais l’état d’une société ne se découvre pas dans une image immobile telle une photographie unique. Au contraire, la société possède aussi, à tout moment, une direction et un élan dans son évolution. Et je prétends, qu’ici, c’était précisément cet élan, cette direction –ce mouvement– qui fut brisé dans le désabusement de l’Entre-deux-guerres, épitomé et symbolisé pour nous dans la défaite de la Prohibition.

De notre point de vue rétrospectif, en fait, les signes sont évidents : dans le malaise omniprésent affiché par les ouvrages culturels dits « sérieux » contrasté avec la gaieté facile (et souvent cynique) de la culture populaire; ou encore, dans la morosité générale de la population au sujet des prospects futurs de sécurité économique; dans un monde ou il n’y avait pas encore d’avortement généralement disponible, mais où il y avait tout de même un taux de natalité aussi bas que celui que nous connaissons aujourd’hui; dans un monde, enfin, où la formule électorale célèbre du Président Franklin D. Roosevelt — « Un poulet, dans chaque pot, à chaque dimanche » — passait, dans l’esprit populaire pour l’image d’une opulence idyllique et somptueuse !

Mais considérons un instant: Un poulet ? Une fois par semaine ? Parmi une famille de 5 ou de 15 ? Est-ce une suffisance alimentaire digne d’être proposée en but idéal de faste sociétal ? Et le reste du temps on mangeait quoi ? Des fèves au riz et du riz aux fèves ? Et encore! Puisque dans la réalité des Années Trente il manquait même ces nécessités minimales.

–une fenêtre qui s’ouvre sur le vrai, obliquement, par voie d’humour

Pour illustrer la profondeur de la psychologie pessimiste du moment, il y avait une plaisanterie très populaire qui se répétait encore parmi les survivants (et parmi les enfants des survivants) des décennies plus tard. Elle se dit comme suit: « Si nous avions du jambon, nous pourrions faire des œufs aux jambon…si nous avions des œufs… ».

Imaginons, je vous prie, la mentalité des personnes pour lesquelles de tels propos aient pu servir pour provoquer le rire, et la gaieté !

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Paul-Émile Borduas, peintre-sculpteur (1905 – 1960); auteur du “Refus globale” (paru août 1948)

–Une fissure sociale qui s’ouvre visiblement avec l’arrivée de nouveaux enfants, tant différents de leurs frères (et sœurs) aînés

Voilà, en fait, un monde où les gens avaient peu, et qui ambitionnaient peu; mais qui s’attendaient néanmoins à ce que même ces ambitions des plus modestes eussent été frustrées dans l’occurrence. Et encore! Cette description s’applique aux conditions de paix… Qu’en serait-il (fantôme qui hanta toujours la pensée inconsciente) avec un retour aux exigences de la guerre ?

Nous assistions, donc, au spectacle d’une compétition entre la fortitude (extérieure) et le malaise (du dedans). Et, tel que nous le savions: une courte génération plus tard la carapace apparemment indestructible de cette société millénaire était destinée à éclater en lambeaux devant le refus simple de ses membres.

C’est comme si la civilisation occidentale s’était efforcée de fournir le meilleur d’elle-même (comme un arbre dont s’écoule sa meilleure –et sa dernière– sève) dans la jeunesse qui gagna la Deuxième Guerre mondiale (nommée aujourd’hui “la plus grande des générations”). Et à l’apogée de ce zénith apparent, le Président John F. Kennedy, ce bel homme typique de sa cohorte, croyait pouvoir proclamer, le 20 Janvier 1961 (dans une affirmation suprême de la confiance et de la résolution nationale; inébranlable même devant la nouvelle menace d’une guerre illimitée aux armes nucléaires):  

“Nous payerons n’importe quel prix; nous porterons n’importe quel fardeau; nous supporterons n’importe quelle privation; nous soutiendrons tout ami; nous opposerons tout adversaire… Alors, mes compères Américains: Ne demandez pas ce que votre pays peut faire pour vous. Demandez ce que vous pouvez faire pour votre pays!”

Et pourtant! Seulement deux ou trois années plus tard, les rues se remplissaient de jeunes gens qui scandaient leur refus du sacrifice. Que ce soit celui de la guerre: « Au Diable votre loi ! Nous n’irons pas » ( “Hell no, We wont go!”); ou encore celui de la reproduction: « L’avortement sur demande ! Sur demande et gratuitement ! » (“Free abortion on demand”).

Au Québec, un manifeste artistique précurseur de ce mouvement fut publié, dès 1948, par le peintre/sculpteur Paul-Émile Borduas (1905 – 1960) sous le titre “Refus global”. Ce texte illustre extrêmement bien la rupture civilisationnelle décrite dans ces pages, perçue, toujours, à l’intérieure des particularités Québecoises.

–Des spéculations toujours séduisantes (mais contraires aux faits vécus)

Nous pouvons spéculer, toujours, sur la possibilité que notre société ait pu retrouver son équilibre –et sa confiance– après la Première Guerre mondiale: au cas qu’elle ait pu temporiser suffisamment pour résoudre tranquillement la crise économique; au cas qu’elle ait pu –peu à peu– oublier les pertes, et cicatriser les blessures de la guerre elle-même; au cas que la nouvelle Société des Nations fondée sur les ruines de la catastrophe récente, eut pu véritablement remplir sa mission de prévenir les affrontements futurs; et au cas, surtout, que cette société ait pu trouver une réponse philosophique adéquate pour neutraliser l’attaque nihiliste (apparemment inséparable du matérialisme scientifique) qui s’est abattue sur le paradigme traditionnel d’intention divine, absolue et transcendante.

Mais, tragiquement, comme nous ne le savons que trop bien: la trame réelle de notre histoire en fut toute autre.

(Et, malheureusement — fait accessoire mais toujours significatif: la réputation et l’autorité de notre vénérable ami grec, Hippocrate de Cos, en furent aussi destinées à souffrir, fortuitement –et je le soumets: inutilement– comme dommage collatéral suite à la furie qui accompagna ces changements sociaux séismiques.)

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À Suivre …

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