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janvier 2019 - Euthanasie : De la discussion jaillit la lumière

Chapitre : fin de la coïncidence parfaite des notions de ce qui est « désirable », « moral » et « légal » à l’aube du vingtième siècle

(Tome Premier : l’euthanasie et le choix — Partie C : l’euthanasie et la médecine — Section III : Société en rupture — Chapitre : Fin de la coïncidence parfaite des notions de ce qui est « désirable », « moral » et « légal » à l’aube du vingtième siècle)

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Doctor and Doll, Norman Rockwell, 1929

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– Consensus apparent sur fond de tractations irréconciliables

     J’ose espérer que le lecteur me pardonnerait, ici, un court moment de nostalgie complaisante à l’examen (circa 1900) de cette période plus simple de l’histoire intellectuelle de notre espèce ! Quelle chance réconfortante pour les gens ordinaires, de pouvoir constater que les trois notions que nous avions identifié dans les chapitres précédents — de ce qui est commercialement désirable (Hippocrate), de ceux qui est moralement bien (préceptes religieuses ou philosophiques), et de ce qui est légalement permis (les règles de conduite propres à l’état modern) – aient pu toutes s’accorder dans cet instant avec tant de précision et d’harmonie. Quel moment heureux !

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Incohérence inhérente de « l’aide médicale à mourir »

     Pour être précis, « l’aide médicale à mourir » n’est ni suicide, ni euthanasie : elle représente un nexus conceptuel subtil ou les deux lignes de logique se croisent ; et ou la justification de cette pratique se fond, tantôt sur l’une tendance, tantôt sur l’autre, ajustée, seulement, aux besoins ponctuels de la discussion. Car si, par exemple, la validité du choix était contestée, la défense s’appuierait sur la nature objectivement insupportable de la condition médicale ; mais, au contraire, si la démonstration se faisait, que la science médicale soit capable de pallier à tel ou tel condition (un argument soutenu par la plupart des spécialistes des Soins Palliatifs et par le nombre prépondérant de personnes qui s’y fient malgré l’option euthanasie) la réponse serait de défendre le caractère sacré du choix personnel. Dans d’autres mots : les défauts de chaque assertion seraient esquivés avec un appelle à l’autre, dans un étroit relation circulaire, réciproque et tautologique.  Il s’en dégage, alors, la conclusion magique que « l’aide médicale à mourir » puisse être, à la fois, subjectivement arbitraire, et objectivement « bien » !

     Mais je conseillerais, au lecteur perspicace, l’exercice d’un bon réflexe de scepticisme face à cette affirmation : un scepticisme que j’aurais pleinement confiance de voir validé, quand il sera question de ceux qui sont jugés incapables de faire de tels choix tant significatifs (que se soient pour raison d’âge –jeune ou avancé—de condition cognitive, de condition psychiatrique, ou autre). Car telle serait l’une des toutes premières questions de fond, soulevées actuellement par la normalisation de l’euthanasie « volontaire » : Est-ce que ces personnes incapables continueront à vivre, dans la présomption d’un choix subjectif non-suicidaire (analogue à celui qui se présent chez la vaste majorité des patients compétents) ? Ou est-ce que, au contraire, ces personnes dépendantes « bénéficieront »– peut-être bien malgré eux — des avantages d’une mort précipitée, grâce à la justification objective de l’euthanasie ? (Au Pays Bas : une patiente incapable est retenue de force par les membres de sa famille pendant l’administration d’une injection létal)

     Chose certaine : ces deux aboutissements sont logiquement exclusifs : d’où l’importance de bien comprendre l’incompatibilité, aussi, des principes en jeu.

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Le procès Truchon-Gladu

Réflexions sur la requête Truchon-Gladu, qui vise l’élargissement des critères d’accessibilité à l’euthanasie volontaire, pour inclure les personnes malades et handicapées dont la fin de vie n’est pas “raisonnablement prévisible”. 

A) Truchon-Gladu et le Capybara

Capybara

      Au cours du seizième ou dix-septième siècle, le Pape décréta que le castor et le capybara (cet énorme rongeur d’Amérique du Sud) étaient des poissons, afin de faciliter la vie des convertis indigènes qui pouvaient, ainsi, continuer à manger cette chaire les jours de jeûne.

     Les avocats de M. Truchon et Mme Gladu prétendent, pour leur part, que l’extension, des critères d’admissibilité à l’AMM, ne créera pas un risque accru de suicide. Non, disent-ils. Puisque l’euthanasie volontaire n’est plus   (selon nos législateurs) un suicide assisté, mais bien, un « soin » médical. De suicide, alors, il n’en pourrait pas y avoir, par définition.

     Pourtant, toute personne qui répond aux critères applicables à l’AMM, possède un « droit » à l’euthanasie que son médecin ne peut pas contredire ; et l’État se porte garant, même, qu’un médecin accommodant soit trouvé. De plus, la satisfaction des critères ne tient pas de la science objective, médicale ou autre. Car la détermination de l’importance de la « souffrance » devient la prérogative souveraine du « souffrant ».

     Décidément, dans ces circonstances, les formalités de l’AMM provoqueraient la mort — essentiellement sur demande — avec la même utilité brute et inconsciente que toute autre moyen technique qui puisse être employé à la même fin, que ce soit le poison, la corde, ou la carabine.

Mais toujours est-il, selon les avocats requérants du litige Truchon-Gladu, qu’un individu qui désire mourir, et qui choisit un tel outil mortel pour accomplir son dessin, n’est pas un suicide !

     Eh bien! il est possible, que l’AMM ne soit pas un suicide assisté (suite aux redéfinitions étonnantes décrétées par nos tribunaux et par nos législateurs) mais seulement, il faut le préciser, de la même manière qu’un cochon d’Inde, géant, puisse être considéré un poisson à des fins culinaires.

Gordon R. Friesen, 17 Janvier, 2019 http://www.euthanasiediscussion.net/

B) Trop c’est trop !

     Nous ne parlons pas, cette fois, d’euthanasie en fin de vie. La discussion est tout autre. Nous envisageons la terminaison de vies toujours viables, et de personnes conscientes.

      Certes, il y aura des personnes qui désireraient abandonner devant les afflictions du sort.  Et dans ces cas nous n’aurions d’autre choix que d’accepter cet abandon. Mais nous ne devons pas, collectivement, cautionner celui-ci en solution potentiellement optimale pour tout le monde !

    Au contraire, notre premier devoir social, et médical, demeure la protection de la vie ; notre sympathie doit se situer, inconditionnellement, du côté de ceux (beaucoup plus nombreux) qui désire vivre encore ; et notre énergie doit être entièrement consacré à combler les besoins de ces personnes : ceux qui restent ; et ceux qui resteront.

     Ce n’est plus, alors, une simple question de volonté individuelle. Nous sommes loin, ici, d’une acceptation neutre du fait de suicide. L’euthanasie est actuellement définie comme un « soin » médical, universellement disponible, dont certain symptôme indiquerait l’application (de manière objective et scientifique).

     Mais il serait absurde que la mort puisse être proposé, en soin médicale approprié, là ou la vie ne se trouve même pas menacée ; là où il ne peut pas s’agir d’une mort médicalement « assistée » : car sans intervention, il n’y aurait pas de mort qui demanderait « assistance » !

     Est-ce possible que la société puisse vouloir faciliter de tels désirs suicidaires ? Je n’oserais pas répondre. Mais dans l’affirmatif : ayons au moins la franchise de créer des mécanismes adaptés explicitement à cette fin. Arrêtons de vandaliser les structures existantes !

     Car logiquement, la provision d’un tel service ne serait aucunement la responsabilité, ni de la science médicale, ni des professionnels de la Santé.

     Et cette contradiction risque de nous déranger sérieusement, tous et chacun, au moment précis où nous aurions besoin d’un médecin qui soit voué à la défense de notre droit de vivre, et non pas à notre droit de mourir.

Gordon R. Friesen, 6 Janvier, 2019 http://www.euthanasiediscussion.net/

B-I-Chaptire 2 : Vedettes québécoises et le suicide : Pauline Julien et Gérald Godin

Pauline Julien et Gérald Godin

– spécificité politique du Québec

    Étant donné que la première législation canadienne au sujet de l’euthanasie fut adoptée au Québec, il me semblerait à propos de signaler, aussi, les prétentions et les traditions plus larges des Québécois, de servir, en quelque sorte, comme l’avant-garde de la révolution progressiste au Canada, ou plus correctement, de tout enthousiasme politique : car les tendances de droit sont très bien illustrées, également, dans l’histoire du Québec, dont le régime de Maurice Duplessis (oncle germain de Pauline Julien), qui fut nommé par la suite, la « Grande Noirceur » (qui ne fut, en fait, rien de moins qu’un gouvernement proto-fasciste ; et qui avait non seulement survécu le grand déblayage de la Deuxième Guerre, mais a même pu fleurir encore — à l’intérieure du bloc allié victorieux — grâce au statut protégé  de province Canadienne.)

     Mais de tous les enthousiasmes qui auraient placé le Québec dans une position qui le distingue de ses voisins, nous devons nommer, sans contredit, le mouvement d’indépendance nationaliste Québécoise, lui-même, qui dominait pendant au moins un demi-siècle, non-seulement le paysage politique dans cette province, mais fournissait, également, le sous-texte inéluctable de toute politique fédérale Canadienne.  Car de la même manière que la société, jadis, demandait « Que veulent les femmes ? » (et peut-être aujourd’hui : «  Que veulent les personnes handicapés ? ») à partir des années soixante, jusqu’aux années deux mille (et encore) la grande question récurrente fut “ What  does Québec want ?”

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Chaptire A-3 : suite et fin – la nature particulière du suicide assisté ; (suivie de) Chapitre A-4 : première partie

– la nature particulière du suicide assisté

     Il existait, certes, — et il existe toujours — une distinction de taille qui sépare le suicide, simple, du suicide assisté : car selon le code criminel du Canada …

      « 241 (1) Est coupable d’un acte criminel et passible d’un emprisonnement maximal de quatorze ans quiconque, que le suicide s’ensuive ou non, selon le cas :

     a) conseille à une personne de se donner la mort ou l’encourage à se donner la mort;

     b) aide quelqu’un à se donner la mort. »

     Dans ces statuts, nous pouvons déceler, clairement, une désapprobation fondamentale, ou à tout le moins un regret aigu, à l’égard du suicide. De plus, nous constatons un désir, évident, de limiter le phénomène, et un compréhension que les activités des facilitateurs de suicide — ceux qui « conseille » et « encourage » ; ceux qui « aide (sic) à donner la mort » — résulteraient, certainement, dans un plus grand volume de suicides réussis, à la fois puisque la personne suicidaire serait renforcie dans son désire, par une validation extérieure (possiblement de nature émotive très significative) et parce que la présence d’une autre personne, activement engagée, garantirait, à tout fin pratique, l’aboutissement du geste.

Surtout, la situation éthique serait altérée dans son essence : car, tel que nous l’avions précisé, le fait de légaliser le suicide n’implique aucunement son cautionnement, ni de la part de la collectivité, ni des individus qui la compose ; tandis que le suicide assisté implique, lui, une complice moralement responsable, et une société au moins passivement approbatrice.

     Bref, la distinction éthique (entre le suicide simple et le suicide assisté), qui soit reflété dans cette clause de loi – toujours en vigueur au moment d’écrire ces lignes — s’apparent à la différence entre accepter, sans plus, l’action de l’alcoolique qui décide soudainement de « prendre un verre », et le fait, pour un tiers, de lui verser ce verre et de l’encourager à le boire. Aussi, combien plus pointue serait cette distinction morale face au suicide assisté, là où la complicité implique une participation dans la prise volontaire d’une vie humaine !

     Tel fut, donc, la situation après 1972, avec le suicide simple décriminalisé, mais l’assistance au suicide toujours sévèrement réprimé.

     Mais, comme je tenterais de convaincre le lecteur au cours des chapitres subséquents, il ne faut absolument pas sous-estimer la force de la mouvance, séculaire, sociale et philosophique, vers la liberté personnelle subjective. Et il ne faut pas, non plus, sous-estimer la créativité avec laquelle ses partisans auront su avancer leur cause.

     Dans l’occurrence, la preuve était abondamment faite que la logique subjective pure ne pouvait pas remporter cette bataille (ou au moins pas dans l’immédiat). Mais par contre, les apôtres du droit à mourir s’en sont persuadés qu’une première brèche pouvait être pratiquée dans l’interdit, à condition que certains suicides (seulement) puissent être identifiés en bien objectif. Il serait, alors, de notre devoir collectif de permettre l’accès à ce bien, pour tout le monde, y incluant ceux qui ne pouvait pas y accéder tout seule, c’est-à-dire : de permettre, dans ces circonstances spéciales, le recours non seulement au suicide, mais au suicide assisté. Et c’est ainsi, que les ténors de la liberté subjective auraient trouvé suffisamment de fluidité, dans leur démarche stratégique, pour embrasser, de nouveau, le langage de la moralité objective : pour adopter, dans une certaine mesure, les armes de leurs adversaires ; pour chercher une exception objective à l’interdit.

      Or, fait tant significative mais pas, je soutiendrais, suffisamment remarqué : grâce à l’introduction de prétendus critères médicaux objectifs, cette manœuvre fut pratiquée avec un appel aux caractéristiques propres, non plus au suicide pur, mais à cet autre phénomène — que nous considérons d’encore beaucoup plus néfaste, c’est à dire : l’euthanasie.

Chapitre A-4 : l’euthanasie volontaire ou « aide médicale à mourir »

– distinguer l’euthanasie, avec sa tradition empoisonnée, de l’assistance au suicide

     L’euthanasie, proprement dit, sera traitée en plus de détail dans la deuxième partie de ce livre. Pour l’instant, disons seulement que l’euthanasie (qui soit la mise à mort directe du patient par son médecin) se pratique, en tout temps, sous la prétention théorique, que, dans tel ou tel cas particulier, elle représente la meilleure réponse médicale à la souffrance du patient. Il s’ensuit que la justification de la mise à mort n’en est plus uniquement subjective, mais bien objective. Et de ce fait, l’euthanasie n’est pas nécessairement volontaire.

     Or, le rejet à répétition des différents régimes d’euthanasie, qui furent proposés pendant la première moitié du vingtième siècle, fut surtout le rejet de cette idée de tuer des gens dépendants, contre leur gré, ou dans l’incapacité de comprendre ce qui les arriva (suite au jugement objectif des médecins que leurs vies ne méritaient pas d’être vécu). Et nous nous devons de réaliser, ainsi, devant la trame historique des discussions à ce sujet, que l’utilisation des justifications, propres à l’euthanasie, introduit un bagage tout autre — lourd, et pénible — dans notre démarche actuelle.

     Alors, même si « l’aide médicale à mourir » peut se confondre très facilement, dans l’esprit populaire, avec le « suicide assisté par médecin », il ne reste pas moins que la différence soit profonde : le suicide assisté demeure un geste non seulement volontaire, mais subjectivement arbitraire, tandis que l’euthanasie volontaire se veut, aussi, scientifiquement et médicalement — c’est-à-dire, objectivement – indiquée dans les circonstances définis.

     Cette distinction se reflète, encore, dans les détails techniques de l’accomplissement du geste. L’assistance au suicide classique implique, le plus souvent, la présentation au suicidaire d’une potion létale, qui serait ingéré par ce dernier d’un geste autonome. Et dans tel cas, il existerait, sinon la preuve, au moins un fort indice à priori, que la mort résultante soit volontaire ; aussi, personne d’autre ne pouvait être accusée d’avoir directement produit cette mort. Mais avec l’euthanasie, les faits se présentent sous un jour entièrement différent, car, dans ce cas, ce serait le médecin (ou autre technicien) qui tuerait le sujet ; ce qui ouvre immédiatement des questions extrêmement pointues, de consentement et de responsabilité, qui sont largement absentes face au suicide, qu’il soit assisté ou non.

     De par le passé, la clarté de cette distinction était quelque peu embrouillée par la possibilité qu’une personne puisse désirer la mort, mais demeurer physiquement incapable de se l’accorder, même avec l’aide d’autrui. Or, cette difficulté n’existe plus, car avec les moyens modernes d’automation et de contrôle des systèmes informatisés, n’importe quelle personne — qui serait capable de communiquer son désir suicidaire — serait également capable d’initier une suite d’actions mécaniques qui aboutirait dans sa mort.

     Voilà, donc, la possibilité d’un décuplement pratique et complet des notions, du suicide et de l’euthanasie, qui devrait nous imposer un regard très critique sur la pratique actuelle ! Car, au cas où le premier concerné ne se montrerait pas prêt, dans son moment personnel de vérité, à provoquer délibérément sa propre mort, — ne serait-ce qu’avec le clignotement d’une paupière ou le clic d’une souris — comment pourrait-on prétendre que le décès soit réellement volontaire ? Et dans ce cas, comment pouvions-nous permettre que le médecin traitant puisse évoquer cette justification pour en prendre une telle responsabilité létale ?

     Voilà, crument exposée, ce qui distingue l’euthanasie du suicide, et ce qui expose, aussi, la raison derrière ce fait observé, que le nombre de pays permettant l’euthanasie soit tellement plus restreint que celui de ceux qui autorisent le suicide assisté ; et que tant de médecins (et de corporations de médecins) puissent se montrer prêts, aujourd’hui, à envisager l’un, qui sont, pourtant, toujours catégoriquement opposés à l’autre : car, logiquement, une fois le droit au suicide assisté accordé, l’autorisation de l’euthanasie devient une superfluité complète en ce qui concerne les seules morts volontaires. Dans quel but, alors, demande-t-on, aussi, dans certains pays, un recours à l’euthanasie ?

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