Deprecated: Le crochet jetpack_pre_connection_prompt_helpers est obsolète depuis la version jetpack-13.2.0, sans aucune alternative disponible. in /hermes/bosnacweb01/bosnacweb01an/b2067/nf.euthanasiediscussion/public_html/euthanasiediscussion/wp-includes/functions.php on line 6078
juin 2021 - Euthanasie : De la discussion jaillit la lumière

Au delà du volontaire subjectif : aucune concorde générale

(Tome Deuxième : Sous l’ombre de l’euthanasie — Partie C : L’euthanasie et l’idéologie — Section II : Une description des sources idéologiques de l’euthanasie en Occident — Chapitre : L’euthanasie en soi — Au delà du volontaire subjectif : aucune concorde générale)

.

Les arguments en faveur de l’euthanasie commence, d’habitude, avec le principe volontaire : une présomption que le désir (et la demande) de mourir soient des expressions de l’autonomie souveraine. Et c’est ainsi que Samuel D. Williams, représenta le phénomène (“Euthanasia”, 1870), avec une proposition d’implémentation restée essentiellement identique, cent cinquante ans plus tard, partout où l’on discute d’une première légalisation de cette pratique.

“(Que…) dans tout cas de maladie douloureuse, et sans espoir, qu’il soit le devoir reconnu du responsable médical, du moment que ce soit la volonté du patient, d’administrer le chloroforme … de sorte que la conscience soit immédiatement éteinte, et le souffrant soumis à la mort rapide et sans douleur ; toute précaution nécessaire étant prise pour empêcher tout abus possible d’un tel devoir et ; des moyens étant employés pour établir, au-delà de tout doute, ou question, que ce remède ait été fournit à la demande expresse du patient”

Pourtant même si Williams aurait voulu se limiter à ce que certains ont nommé le “cas facile” (où le médecin ne ferait que valider les désirs du patient) toujours faudrait-il que ce médecin puisse prétendre juger, lui-même, de la nécessité des actions accomplies. Plus fondamentalement, aussi, cet idéal volontaire ne correspond pas avec la réalité clinique : car les médecins se trouvent souvent responsables des soins de personnes qui sont incapables de faire de telles choix.

Il en résulte, de manière pratique, que le médecin soit contraint (dans l’un cas comme dans l’autre), à déterminer dans quelles circonstances précises la raccourcissement d’une vie particulière se présenterait en bienfait objective.Et pourtant ! Des patients (et des médecins), dans des situations apparemment identiques, feront constamment des jugements opposés, les uns par rapport à la valeur de leur propres vies (et les autres par rapport aux vies de leurs patients), de sort qu’à la fin : de prétention honnête à l’objectivité, il ne peut nullement y avoir.

Au contraire, nous constatons un large éventail d’opinions, se présentant en continuum conceptuel, allant d’un respect inconditionnel pour la vie (et un refus total de l’abréger), jusqu’aux visions absolument pessimistes qui conçoivent, d’emblée, la vie en souffrance et la mort en délivrance.

Or, tout système social, cohérent et inclusif, doit faire place à l’expression de cette pluralité de sentiment.

— Pessimisme et optimisme : des conceptions contradictoires et coexistantes

Il existe, d’abord, une vision fondamentalement négative, qui se voit très largement répandue dans l’esprit humain, non seulement à cette époque (où rageaient les nouveaux enthousiasmes matérialistes et darwiniennes), mais aujourd’hui aussi, depuis des millénaires, et probablement depuis toujours.

Dans des moments particulièrement éprouvants elle trouve résonance, cette vision, dans l’expérience de presque tout le monde ; et elle se fond sur des faits objectifs qui ne peuvent être catégoriquement niés par personne.

Tragiquement, aussi, un nombre important de personnes y succombent dans chaque génération, en s’enlevant délibérément la vie (ou en s’engageant savamment dans des comportements invitant au même résultat).

En conséquence, les traditions religieuses, dans leur quête d’une explication universelle de l’expérience humaine, ne pouvaient aucunement ignorer cette tendance. Au contraire, elles en faisaient une place privilégiée. Car les crises de conscience qui en sont l’expression se manifestent, très spécialement et très souvent même, par un désir mystique de renoncer à ce monde imparfait.

Cependant, autant qu’elles en admettaient la validité évidente, toutes les traditions religieuses et philosophiques, aussi austères furent-elles, se rejoignaient, aussi, pour en fournir des explications dont l’effet — apparemment voulu — fut la minimisation des séquelles fatales de cette pessimisme endémique de l’être humain.

En Orient, par exemple, les traditions d’illumination méditative se dirigent vers un seul but qui consiste dans la recherche d’une libération complète (de “l’illusion” existentielle), qui peut entraîner des pratiques extrêmement nocives pour l’organisme. Pourtant l’autodestruction directe n’est jamais permise, car selon une plaisanterie bien connue du 14ieme Dalai Lama (actuellement en exile, 1935 – ) : Je me suiciderais bien, mais cela ne marcherait pas ! (en admettant la doctrine de réincarnation).

D’un esprit similaire, en Occident, Chrétiens et Juifs se considèrent contraints de respecter la vie en tout temps — incluant leurs propres vies — comme un œuvre divin auquel ils n’ont pas droit de porter atteinte. Car même au cas où ils souscriraient à la thèse austère (et très populaire) voulant que ce monde ne soit qu’un laboratoire de purification dans la souffrance, il ne reviendrait aucunement à ces personnes (selon leurs croyances) de décider du moment que ces leçons aient été suffisamment assimilées.

Tout en accommodant, donc, les tendances sombres de la psyché humaine, les souches traditionnelles, de religion et de philosophie, tentaient d’en limiter l’expression suicidaire.

— Un cadre conceptuel à l’appuie de l’impératif vital

Mais pourquoi, cela ? Sinon que les sentiments symétriques — de joie, de confiance (et de ténacité dans la survie) — ne soient plus forts encore ! ; que les sentiments réellement pessimistes sont habituellement de nature passagère ; que la proportion des personnes naturellement habitées par des sentiments chroniques, ne représente (heureusement) qu’une faible partie de l’ensemble ; que même parmi les personnes consciemment suicidaires (incluant grand nombre de savants, prêtres et philosophes) l’on n’ait jamais cessé d’élaborer des raisonnements calculés pour empercher les pulsions autodestructeurs.

Et pourquoi, cela ? Sinon que la volonté d’endurer et de continuer (ne serait-ce qu’un instant de plus et quelque soient les circonstances) en fait partie des conditions nécessaires pour la survie de toute espèce vivante. Et puisque les simples décrets évolutionnaires des instincts inconscients ne suffisent pas pour réconcilier la psychologie humaine avec cet objet : nous avions développé, aussi, des consignes culturelles (comme la notion de “vie sacrée”), pour y parvenir.

Au fond, alors, le débat sociétal autour de la mort assistée a toujours impliqué une sorte d’argument de verre à moitie plein, au sujet de la valeur, non seulement des vies particulières, mais de la vie en soi. Et autant que le futur de notre société (et de notre espèce), sera finalement déterminé par l’esprit avec lequel ces sentiments seront accommodés, autant en ira-t-il du débat en cours.

— Samuel Williams et la “vie sacrée”

“Nous pouvons bien en douter si la vie renferme quoi que ce soit de sacré, outre l’usage qui en soit fait par son propriétaire. La Nature, certes, n’en connaît rien, puisque il n’y a rien dont elle se montre plus prodigue ; et à ses yeux, la vie d’un homme ne compte pas plus chère que celle d’un oiseaux.”

La Nature, alors (ce terme malléable offerte en substitut pour le divin), n’apparaît plus ici en auguste mère bienfaisante (selon notre auteur), mais plutôt en pouvoir terrifiant et implacable : “Rouge de dent et de griffe” (citant le célèbre poème contemporain “In Memoriam”, d’Alfred, Lord Tennyson, 1809 – 1892). Et surtout, en était-il des ravages de la maladie…

“La mort par maladie est toujours une mort par torture, et l’ingéniosité humaine n’a jamais inventé de torture plus cruelle que ne le sont quelques unes des méthodes dont la Nature s’en sert pour mettre à mort ses victimes.

“L’un des faits principaux, donc, auxquelles les hommes doivent accommoder leur pensée — et ajuster leur vies — consiste en ceci : qu’ils sont nés dans un monde dont la devinette douloureuse demeure obscure devant la spéculation, mais dont les dures réalités pressent fort de toute côté ; des réalités d’où ressort une vérité limpide et brutale : que ce sera non le plaisir, mais en générale, la lutte et la souffrance auxquelles ils doivent s’attendre ; et que ramener ces souffrances dans des proportions supportables doit constituer l’un des buts principaux de leurs existences.”

Le lecteur conviendra, certes, que ce soit une vision particulièrement pessimiste de la vie. Mais tel que relaté, elle se trouve, aussi, en parfait sympathie avec des sentiments similaires, exprimés à travers les millénaires, et souvent par des meilleurs esprits de parmi nous.

Ce qui se présent ici en nouveau, cependant, relève de l’insinuation implicite des conclusions nihilistes de l’interprétation matérialiste : que la mort d’un individu (comme tout phénomène, d’ailleurs, à l’intérieur d’un univers présumé vide d’intention supérieure) n’ait d’importance aucune.

— L’interprétation matérialiste appliquée à la question “euthanasie” : une signification plus large

Selon cette logique (et n’en déplaise aux partisans de la thèse défendue par M. Willaims) il ne s’ensuit aucunement que l’euthanasie doive être accueillie en bien positif (car la prétention nihiliste ne s’avance pas si loin). Soit allégué uniquement : que toute opinion morale soit également vide de signification à ce sujet ; et donc : qu’il n’existe aucun raison pour en empêcher la pratique.

Pourtant, les implications de cet abandon des balises morales dépassent, et de très loin, le contexte limité de l’euthanasie. Car la voie s’est librement ouverte, ainsi, vers la prolifération d’une conception fondamentalement négative (telle que suggérée par Samuel Williams) : que la perte de la vie ne soit un moindre mal à la souffrance des maux qui en sont, de toute évidence, indissociables.

Soyons, alors, très claire de nouveau : notre espèce s’est évoluée dans des conditions de souffrance souvent indescriptibles. Mais grâce aux adaptations devant ces faits — tant physiques que psychologiques (et sociales) — nous avions non seulement survécu les épreuves comme telles, mais aussi, les pièges de la désespoir qui les accompagnaient.

Or, je ne peux que témoigner d’une trépidation certaine (face aux prospects futurs de l’être humain), en constatant l’abandon progresssif de notre ancien principe de “vie sacrée”, apparemment en faveur d’un credo infiniment plus pessimiste (à l’image de la célèbre maxime des joueurs) : que ce soit possiblement mieux d’arrêter maintenant … “tant que tu aies encore de l’avance”

.

Chef d’oeuvre du Poète Lauréat brittonique Alfred Lord Tennyson ; finalement publié, 1850, à la mémoire d’un ami mort en 1822 ; comprenant cent-trente-deux strophes de longueur variables (en plus d’un préambule et d’un épilogue) ; “In Memoriam A.H.A” (ou, Le chemin de l’âme) est possiblement la plainte, désespérée devant la mortalité humaine, qui soit le plus complet de tous les efforts dans ce genre.

Il porte aussi cette distinction que pour la première fois le poète devait affronter les nouveaux évidences, biologiques, indiquant un régime naturel sans intention supérieure, et sans préférence pour l’homme.

Pourtant, le poète parvint à se soustraire aux griffes du désespoir en développant la voie descriptive suivante : 1) L’affirmation d’une simple foi de confiance reçue 2) L’ébranlement produit par la perte tragique de son ami, et par les évidences scientifique de la futilité humaine 3) Des conclusions pessimistes emmenant des spéculations de la raison 4) Une réaffirmation de foi, fondée dans les certitudes du cœur

Il est à noter que cette dernière étape, (la validation du sentiment ressenti), se trouvent vigoureusement répudiée, aujourd’hui, par de nombreuses personnes. Et pourtant ! En agissant de la sorte, elles se privent du seul outil disponible pour naviguer (pour la plus grande partie) l’expérience humaine.

Poursuivre la lecture du texte en séquence linéaire… (Tome Deuxième : Sous l’ombre de l’euthanasie — Partie C : L’euthanasie et l’idéologie — Section II : Une description des sources idéologiques de l’euthanasie en Occident — Chapitre : Compassion, et utilitarisme ; euthanasie volontaire, et l’évacuation des personnes imparfaites : des compagnons étranges sur une route bien tracée)

Un corpus de sagesse collective, conservé et transmis en forme de récits ancestraux

(Tome Deuxième : Sous l’ombre de l’euthanasie — Partie C : L’euthanasie et l’idéologie — Section III : Le patrimoine philosophique ancestral : le caractère sacré de la vie ; la valeur intrinsèque de l’individu humain ; les origines divines de « l’égalité » politique — Chapitre : La religion en conservateur des valeurs sociales — Un corpus de sagesse collective, conservé et transmis en forme de récits ancestraux)

.

Dans son rôle de conservateur de l’expérience commune, la forme utilisée par la religion consiste, principalement, de courtes histoires et récits ; issus de notre passé lointain ; remémorés, cérémoniellement, pour l’éducation de chaque génération.

L’édifice ainsi érigé, à travers les millénaires, serait composé d’éléments divers, un peu à l’image d’un vaste ouvrage d’art bijoutier dont la structure sert à mettre en valeur les pierres précieuses, tantôt toutes seules, tantôt en agencement les unes avec les autres. Au mieux, les pierres individuelles seraient des atomes de sagesse utiles, retenus des meilleures intuitions de notre passé ; au pire, elles seraient possiblement des préjugés nocifs — aussi coriaces que néfastes — qui puissent renforcer les pires aberrations sociétales.

Quel qu’il en soit, l’étendue des idées religieuses, comme le potentiel humain tout court, n’est limitée que par l’étendue de l’esprit humain, incluant toutes ses forces, ses faiblesses — et mêmes ses délires les plus pervers — placés côte-à-côte avec les plus nobles.

La structure qui tient ces « pierres » s’est composée de dogmes et de raisonnements qui reflète, à chaque étape, la meilleure compréhension courante de la réalité. Surtout, dans la fabrication de cette monture intellectuelle, il s’agit de réconcilier passé, et présent, en révisant la signification perçue des éléments. Le tout serait, alors, le résultat d’un processus proprement évolutionnaire (quoique très conservateur) par laquelle les éléments individuels sont ajoutés, rejetés, modifiés, et constamment recombinés ; pour altérer la signification de l’ensemble ; et pour refléter organiquement la compréhension du tout : une compréhension de l’homme — à son sujet propre et à celui de l’univers qu’il habite — à travers les différentes époques de son existence.

— Une structure organique qui se veulent plutôt complète que rigoureuse

De manière théorique, l’intégrité interne de tout système moral dépend de la fidélité avec laquelle les axiomes à sa base soient exprimés à travers le tout.

Pourtant, dans la tradition culturo-réligieuse, qui se constitue spontanément, les idées retenues ne sont pas choisi en fonction de leur compatibilité. Au contraire, chaque image, chaque histoire conservé — chaque “pierre” de la parure globale — gagne sa place grâce à son attrait propre.

Il en résulte, que le tout n’est jamais dérivé rigoureusement d’un principe central clair ; jamais ficelé, ni bouclé proprement dans un ensemble entièrement cohérent (même si l’on imagine que le but de l’exercice consiste éternellement dans un effort d’en déceler un). Car en fait, le système produit est multiple dans ces racines : le résultat d’un cohabitation non-résolue d’axiomes contradictoires.

De manière pratique, alors (vu que ces axiomes peuvent se trouver en opposition ouverte, les unes avec les autres) il arrive que des débats politiques puissent se distinguer par des appels à l’autorité qui soient également contradictoires ; que des personnes aient pu rebeller contre les usages de leur époque (ou encore, aient pu les défendre) en invoquant des éléments particuliers du tout, et en écartant sciemment d’autres ; que de conflits qui seraient perçus, de nos jours, comme des affrontements d’idéologies distincts, se produisaient à l’intérieur d’une structure plus large, à laquelle chacun prêtait sincèrement son adhésion.

Pour tout dire, les conceptions essentielles de la vie (et de la vie en société) ont changé significativement avec le temps (des changements illustrés, par exemple, dans la différence de ton qui différencie les Testaments “Ancien” et “Nouveau”). Mais il n’en demeure pas moins que l’ajout et le rejet des principes ancestraux — les « pierres » de notre métaphore — ainsi que le remaniement de la structure qui les met en valeur (les dogmes religieux qui servent de ciment et de fond) — se sont toujours produits sans remettre en cause le processus organique elle-même. Et aussi : que les mérites de chaque « pierre » furent toujours jugées sur une base individuelle ; que même avec les changements de dogme les plus radicaux, l’on prenait bien soin d’en conserver les plus belles : et pour leur propre mérite, et pour la luminescence prêtée à l’orthodoxie nouvelle.

— La science et la religion s’écartent (forcément) sur le principe de vérification empirique ; mais se rejoignent, quand-même, dans les relations d’expérience et dogme, observation et théorie

Ce qui s’impose comme dynamique nouvelle (avec l’opposition manichéenne qui s’est déclarée entre la rationalité de la science et la subjectivité de la foi) réside dans un rejet des bases mêmes de l’ancien système ; dans la répudiation des axiomes ancestraux, et dans l’évacuation de tout produit intellectuel qui y soit associé : puisque cette méthode n’est pas empirique ; puisque les leçons tirées des contes et des légendes (nos joyaux littéraires) ne peuvent être vérifiées à l’observation ; puisque les dogmes qui sont élaborés pour expliquer ces leçons (nos montures théoriques) sont, à leur tour, des raisonnements bâtis sur l’invérifiable, et donc, du sens scientifique : sans intérêt aucun.

Pourtant, outre cet aspect empirique (l’essence, certes, de la mode scientifique), les deux méthodes sont essentiellement identiques. Il y (chez la religion) des intuitions de l’expérience subjective, acceptées en vérités, qui correspondent aux observations scientifiques ; il y a des raisonnements (dogmes) qui en soient dérivés et qui correspond aux théories ; et même si ces dogmes sont souvent présentés comme immuables, elles évoluent avec le temps, en harmonie avec une perception changeante des faits. La seul différence, encore, subsiste dans ce fait que les vérités de la religion ne peuvent être directement éprouvées.

Soit. Mais est-ce que ce serait faut d’essayer? faut de vouloir ?

— Sacrifier des facultés imparfaites sur l’autel d’une perfection idéelle et inatteignable

Très simplement : personne n’a réussi à appliquer la méthode scientifique à l’étude métaphysique (malgré des efforts monumentaux prodigués dans ce sens) parce que la chose s’avère impossible.

Alors quand certains rejettent la Religion, au bénéfice apparent de la Science, ce n’est pas une méthode d’étude qui soit rejetée, mais plutôt : un champ entier de connaissances (qui comprend tout ce qui est invérifiable dans l’expérience humaine).

Or, tels que nous ayons déjà présenté ces faits : la plupart de nos choix doivent toujours se faire dans un contexte de complexité, totalement opaque à l’opération rationnelle. Plus encore : tout ce qui nous soit le plus cher s’y trouve enveloppé !

Seulement avec une réduction draconienne de l’expérience subjective pourrait-on prétendre le contraire (voire : une réduction équivalente à l’amputation de toutes nos fonctions supérieures) … non parfois, dans un seul cas précis ; mais en principe, toujours et partout.

Voila la limite incontournable de tout système philosophique qui se veuille intégralement scientifique.

.

Poursuivre la lecture du texte en séquence linéaire… (Tome Deuxième : Sous l’ombre de l’euthanasie — Partie C : L’euthanasie et l’idéologie — Section III : Le patrimoine philosophique ancestral : le caractère sacré de la vie ; la valeur intrinsèque de l’individu humain ; les origines divines de « l’égalité » politique — Chapitre : l’Idéologie versus la Religion)

Le principe de liberté subjective présenté en programme de soutien à la vie

(Tome Premier : L’euthanasie et le choix — Partie B : l’euthanasie et la clientèle — Section III : La « Pente Glissante » — Chapitre : De retour à la liberté — Le principe de liberté subjective présenté en programme de soutien à la vie)

.

Mais, qu’est-ce que cela signifierait, enfin, pour les partisans de la vie, de promouvoir et d’instrumentaliser, à leur tour, le principe de liberté subjective qui soit implicite dans le choix de mourir ? Est-ce un paradoxe insoutenable ? Est-ce que cela voudrait dire, par exemple, de militer positivement en faveur d’une expansion maximale des critères d’admissibilité à l’euthanasie ?

Notre réponse, certes, consisterait d’un “Non !” emphatique. Mais la question est bonne. Car elle illustre le problème conceptuel.

En essence, une fois la question collective tranchée, une fois le choix de mourir reconnu en droit : l’intérêt propre des membres de la majorité, formée des patients non-suicidaires (ainsi que de leurs familles et de leurs médecins), réside dans la satisfaction (et dans la défense) de leurs choix ; et de leurs choix uniquement.

Ce n’est plus à eux (pour plus de certitude) de se préoccuper des circonstances dans lesquelles les suicidaires peuvent trouver la mort désirée. Au contraire, leur seul souci conséquent consiste dans une recherche de la sécurité personnelle, et des garanties qui leur seront fournis : qu’ils ne se trouveront pas la proie de professionnels qui voient la mort, délibérément provoquée, en réussite thérapeutique ; qu’aucune pression ne sera exercée, sur eux, pour les diriger vers un consentement à mourir ; qu’ils seront soignés exclusivement par des professionnels n’ayant pas acquis l’habitude de tuer leurs patients ; qu’ils seront épargnés de toute introduction d’idéations suicidaires, même déguisée en devoir médical d’information. Car voila, sans détour, l’intérêt des patients non-suicidaires : de se faire soigner dans un environnement clinique qui soit entièrement libre de toute influence de l’euthanasie volontaire, ainsi que de la médecine de mort utilitaire, qui y soient associée.

Du reste, il s’ensuit comme conséquence logique : que la première tâche de tous ceux qui se voient en champions des patients non-suicidaires (“vulnérables” ou non) réside dans la défense d’un accès garanti, pour ces derniers, à des soins qui leur soient loyalement adaptés.

— Un post mortem critique de la bataille C-7 présenté en exemple illustratif

Pour ceux qui ne reconnaissent pas cet nominatif, l’introduction récente de la loi canadienne C-7 ouvra l’accès à l’euthanasie (déjà existant depuis 2016) pour inclure des personnes qui ne sont pas à risque imminent de mourir. L’enjeu fut on ne peut plus important, car en fonction des définitions subjectivement malléable de “souffrance” et de “condition grave” (présentes dans la loi originale) cela signifiait, effectivement, ouvrir l’euthanasie à toute personne malade ou handicapée.

Or, à cette occasion (hiver-printemps 2021) nous avions, de nouveau — par habitude, par réflexe — opposé les torts sociétaux objectifs (de l’euthanasie) à l’opération de la liberté subjective. Nous prétendions, ainsi, que la sécurité de la majorité (des personnes malades et handicapées) nécessiterait la préservation de l’interdit à l’endroit de cette population.

Or, nous avions aussi exigé, de ce fait, une deuxième décision manichéenne, impliquant un principe maintenant sacro-saint concernant le droit aux choix personnels, dont l’interprétation, dans cette instance, pouvait avoir des implications imprévisibles pour d’autre choix, que l’on prétendrait maintenant hors discussion, incluant non seulement des comportements d’effet social contesté comme l’avortement, le divorce, et la prostitution, mais des choix, aussi, manifestement nocifs comme l’usage abusif des stupéfiants.

De plus, le choix convoité d’euthanasie volontaire avait été reconnu déjà (pour d’autres), et son expansion — utilisant un argumentation d’équité contextuellement efficace — avait déjà franchi la barre juridique. Même que la nature peu sérieuse de l’épreuve constitutionnelle judiciaire (et le refus du gouvernement fédéral d’en appeler des ordonnances de la cour inférieur) nous avait signalé une firme volonté politique d’ignorer les torts objectifs et de favoriser une liberté individuelle accrue.

Ou pour tout dire : nous nous sommes exposés à une deuxième défaite fortement prévisible.

— Une démonstration impressionnante de cohérence idéologique, et de force représentative, malgré la défaite attendue

En dépit de l’échec législatif ainsi essuyé, nous nous sommes profités de cette occasion pour illustrer des injustices, et des incohérences, dans le système actuel d’euthanasie, évidentes et significatives — non nouveaux, bien sûr, mais devenus plus pressantes avec l’expansion postulée.

Chef parmi celles-ci, je soumets, demeure la nature indiscutablement discriminatoire d’une telle retraite de protection (du code criminel) à l’endroit de la seule population malade et handicapée (une discrimination résolument ignorée, autrefois, mais dont la réalité — grâce à ce dernier épisode — n’est plus sérieusement contestée par personne). Sans doute, ce point gagné, de nouvelles opportunités juridiques se designent au futur.

Surtout, les observateurs furent unanimes à constater non seulement une constance, mais bien, une augmentation tangible dans le nombre de personnes manifestant activement leur refus de l’euthanasie, non pas parmi la population générale, peut-être, mais très clairement à l’intérieur des deux groupes principalement visés, c’est à dire : parmi les personnes malades et handicapées ; et parmi les professionnels médicaux.

— Un besoin de départager, avec soin, la question euthanasie des enjeux qui lui sont accessoires

À la fin, la conjugaison de ces deux éléments — de la virulence (et de la volume) d’opposition, avec l’injustice clairement démontrée — poussa certains politiciens vers une désir de conciliation, qui s’est manifesté dans des assurances vagues de bonifications futures des supports financiers à la dépendance.

Mais quoique la question euthanasie peut avantageusement servir pour avancer de tels enjeux périphériques, la poursuite d’une amélioration générale du sort des personnes handicapées ne peut aucunement se substituer pour une véritable stratégie à l’endroit de l’euthanasie comme telle.

En particulier, il faut se méfier de la perception (déjà active au sein de la classe politique) que l’euthanasie, et les supports à la vie handicapée, soient tous les deux des mécanismes (en quelque sorte interchangeables) pour répondre à la question, constante, de misère parmi la clientèle dépendante. Car selon cette vision, toute démonstration budgétaire de limites objectives à la capacité sociétale (de pallier aux besoins de cette clientèle), serait reçue, aussi, comme la preuve pragmatique d’une nécessité manifeste : de normaliser davantage la pratique euthanasique (comme si le constat d’une incapacité de secourir intégralement les personnes nécessiteuses imposerait, comme conséquence logique, un devoir positif de détruire ces malheureux !).

Et si l’on affirme que la légalisation simple de l’euthanasie nous force, d’emblée, à ne poursuivre que des questions secondaires, je répliquerais que, oui, cela se peut fort bien, mais que nous pouvions toujours couper beaucoup plus près de l’os ; que l’euthanasie se présentant en phénomène médical : que nous nous devions de représenter, en premier lieu, les intérêts des malades et des handicapés à l’intérieur de ce mème cadre.

Les mêmes remarques s’appliquent, d’ailleurs, avec une pertinence égale, aux questions de liberté de conscience médicale. Car dans cette matière, aussi, nous nous trouvons devant une cause importante, qui se débat à l’intérieur de la question euthanasie, mais qui soit en même temps extérieure et antécédente à cette dernière. Car (pour simplifier au maximum) : ni une entente satisfaisante au sujet des droits de conscience (des médecins dissidents) — ni un support parfait aux besoins des personnes en situation de dépendance — n’éviterait les torts inhérents à l’euthanasie : ni dans la menace subie par les personnes fortuitement sollicitées ; ni dans le détournement, et dans le vandalisme, pratiqués à l’endroit de la mission médicale.

— L’ébauche d’une stratégie spécifique, fondée sur le respect du choix subjectif

L’euthanasie représente, à elle seule, une question indépendante d’importance capitale, et qui demande une réponse spécifique. Or, pour fournir cette réponse je suggère les deux principes suivants :

1) Puisque le choix de mourir, par euthanasie, soit un droit acquis depuis quelque temps déjà (et réaffirmé, de nouveau, par voie législative), il serait devenu contextuellement moins utile (au moins au Canada) de contester cette permission.

Ce que nous pouvons faire, par contre, c’est de promouvoir et de revendiquer la satisfaction égale des choix de la majorité non-suicidaire, qui consiste dans un accès garanti à des soins, professionnels et institutionnels, dont la pratique et l’influence de l’euthanasie sont exclues.

2) Puisque l’argument moral à l’endroit de l’euthanasie (et en fait toute référence objective aux intérêts sociétaux plus larges) soit maintenant proscrit devant l’opération du choix subjectif : il nous incombe de revendiquer la satisfaction des choix majoritaires, sur un même pied ; et aussi (très significativement) en proportion stricte avec les poids relatifs de ces choix, conçus selon les principes économiques (et moralement neutre) de marchés spécialisés.

(Et pour ceux qui puissent considérer telle stratégie comme un abandon des plus faibles : j’inviterais à la comparaison d’une situation hypothétique : où il existe une robuste alternative institutionnelle en compétition avec le paradigme euthanasique ; et une autre : qui ne contient qu’un seul système, monolithique, contaminé à tout niveau par la théorie utilitaire.)

À suivre …

.