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- La nature du problème, perçue du coté médical - Euthanasie : De la discussion jaillit la lumière

– La nature du problème, perçue du coté médical

(Tome Premier : L’euthanasie et le choix — Partie C: l’euthanasie et la médecine — Section I: Réalité Nouvelle — Chapitre : Et la médecine la dedans ? — La nature du problème, perçue du coté médical)

     Pour comprendre  les principales mises en garde habituellement formulées par ces professionnelles, ainsi que par les organismes qui les représentent, –avant que le ton institutionnel changea devant ce qui semble être une volonté populaire incontournable (qui soit aujourd’hui consacré en fait accompli juridico-politique) –rappelons d’abord, que la logique objective de l’exception médicale à l’interdit de tuer se repose sur la notion que le suicide serait un mal en soi, mais, que certaines réalités médicales puisse devenir tellement pénibles que l’on doit, par compassion, par devoir, par la délicatesse humaine : permettre, pratiquer, et même encourager la mise à mort des souffrants, le tout, redéfini en intervention médicale bénigne.

     Soit. Imaginons, avec réserve et pour faciliter le discours, qu’il n’y ait pas de problème théorique avec cette logique. Il apparaîtrait, alors, que quelqu’un doit juger de la légitimité du geste, dans chaque cas, en fonction des critères retenus. Encore, pour la facilité de discussion, passons sous silence, aussi, la distinction — très significative — entre la genèse légale des critères, et leur véritable statut de légitimité médicale — toujours est-il que ce modèle présuppose qu’un, ou des, médecins doivent juger, d’après les paramètres fournis, si, oui ou non, un individu spécifique se trouve, objectivement, dans une situation de vie qu’on pourrait qualifier d’insupportable, et donc, d’autoriser ou d’interdire, le geste final.

     On conviendrait, j’espère, que cela représente un fardeau éthique personnel très important pour celui, ou celle, qui en prendrait sérieusement la responsabilité de ses actes.

     Et alors, qu’en dirait-on de l’accomplissement pratique du geste ?

     Certes, j’imagine facilement, à ce chef, que les architectes des lois articulées dans ces termes, dont nous en subissons, tous, l’application présente, puissent facilement se sentir rassurés à savoir que la responsabilité pour ces jugements épineuses de légitimité, ainsi que celle des gestes mortels elles-mêmes, soit confiée à ces experts qui sont nos médecins. Mais qu’en est-il de ces derniers ?

     De quel droit demande-t-on aux médecins de faire de tels jugements de vie et de mort ? Et de quel droit demanderait-on aux médecins d’accomplir les actes homicides qui en découlent ? De quel droit peut-on les demander d’assumer un poids semblable ? En quoi, finalement, cela revient-il aux tâches normales d’un médecin ?

     Considérons aussi les infirmières assistantes, qui doivent normalement répondre, sans broncher, aux ordres des médecins : de chercher et de vérifier la potion mortelle ; de préparer la syringe ; peut-être même d’ouvrir la voie intraveineuse ou de soutenir la main du malade qui porte la coupe mortelle aux lèvres. En quoi cela revient-il aux taches normales d’une infirmière ? Qu’en ferait-on de leurs sentiments personnels, de leurs doutes nocturnes, de leurs insomnies… ?  Comment, en fait, pourrait-on prétendre se débarrasser en tant que société, de la responsabilité lourde de ces gestes finals, par la simple astuce de les confier aux corps médicaux ?

     Clairement, l’imposition de ce nouveau mandat homicide exige de fortes exactions personnelles chez les professionnels concernés. Le simple fait, d’ailleurs – pour le médecin, l’infirmière, ou le candidat potentiel — de se trouver dans l’obligation de choisir, oui ou non, d’accorder sa participation à cette pratique en principe (un choix accompagné de sérieuses conséquences pour le trajet professionnel subséquent) représente, pour plusieurs, une crise de conscience déchirante. Il ne peut, donc, rien y avoir de surprenant au fait observé, qu’une partie importante des médecins et des infirmières s’insurge réflexivement contre cette exigence.

     Aussi, le problème débord, largement, des seules questions de conscience personnelle. Car c’est la nature même de la pratique médicale qui en serait altérée en profondeur. Et par conséquent, il en irait inévitablement de même, dans la relation de confiance qui existe entre la population et le corps médical.

     Imaginons un instant !  Avec quel regard envisage-t-il ses patients, ce médecin du nouveau régime, qui doit constamment réévaluer son intervention auprès du patient, en vertu d’une double logique : de maintien de la vie ? ou de son contraire ? Bien sûr, le suicide implique le consentement, sinon la volonté d’un désir activement exprimé. Mais dans l’imagination populaire, s’il existe un recours médicalement approprié à la mise à mort, c’est évidement auprès du médecin qu’on chercherait la guidance : pour le jugement professionnelle ; pour nous dire finalement, si c’est la vie, ou si c’est la mort, dans chaque cas précis, qui serait la voie la plus appropriée pour l’exercice de son art. Clairement, l’influence et la responsabilité du médecin déborde, largement, du simple évaluation des demandes de suicide reçus, pour lui en donner un rôle proactive de conseiller: soit de vie, soit de mort. Et dans ce rôle, j’ose croire, que plusieurs médecins ressentent cruellement les exigences de formuler hâtivement des jugements lourdes de conséquences, la ou les certitudes n’existent pas.

     Considérons, également, l’envers de cette médaille. Quel est, au juste, le sentiment du patient admis, de nos jours, dans une institution hospitalière qu’il saurait servir, à la fois, comme lieu de guérison, et de mouroir accéléré ? Avec quel trépidation ce patient regardera-t-il son médecin, se doutant que ce dernier soit en train de faire et de refaire des calcules opposés, sources de buts contradictoires ? Avec quels sentiments regardera-t-il les personnes dont sa survie soit entièrement dépendante — infirmières et autres — sachant, comme il doit le savoir, que ces professionnels participent, de manière routinière, à l’euthanasie de patients qui présentent des diagnostiques et des prognostiques essentiellement identique aux siennes ; des professionnels, pour tout dire, qui agiraient sans hésitation à réaliser son euthanasie à lui, aussi, le cas échéant ? Évidemment, il n’y a rien de très rassurante dans une telle circonstance, particulièrement dans l’état extrême de vulnérabilité psychique qui caractérise, normalement, les gens qui présentent un besoin pressant de soutien médical.

     Devant ces constats troublants, il me semblerait très important, maintenant, de remémorer avec humilité le mandat premier du corps médical ; et ensuite, d’identifier les entraves, à la réalisation de celui-ci, qui sont le résultat effectif de notre engagement dans cette voie dangereuse de suicide médicalisé. Seulement de cette manière pouvions nous espérer y trouvez des remèdes.

— L’histoire de la réflexion philosophique parmi les médecins

     Heureusement, nous ne sommes pas, ici, obligés à réinventer la roue. Cette problématique, de conscience et de signification dans la pratique médicale, n’a rien de nouveau. En fait, les premiers concernés, c’est à dire les médecins eux-mêmes, possèdent une tradition millénaire de questionnements — philosophiques et éthiques — sur le sens qu’ils accordent à leur métier ; et nous aurions, ainsi, l’opportunité avantageuse de nous référer à ces explorations antécédentes dans nos spéculations présentes.

     Je prierais le lecteur, alors, de me permettre une courte digression historique, à cette joncture, concernant les siècles de réflexion et d’autocritique propre à la profession médicale, qui se sont entrepris sous la bannière de la médecine dit « hippocratique ». Car dans la mesure où nous nous improviserions, de nos jours, dans le mandat que nous confierions à celle-ci, nous ferions, aussi, fie des conclusions déjà retenues par ces professionnels ; et nous nous exposerions, de ce fait, à des séquelles aussi fâcheuses que prévisibles. À tout le moins, avant de cautionner l’imposition de nouveautés aussi extrêmes que la pratique active de l’euthanasie, nous aurions eu un devoir, je crois, de prendre tout le temps nécessaire pour comprendre comment le corps médical, lui-même, eut compris historiquement sa mission, et pourquoi.

Poursuivre la lecture du texte en séquence linéaire… (Tome Premier : L’euthanasie et le choix — Partie C : l’euthanasie et la médecine — Section II : Hippocrate : tradition et histoire de la profession médicale)

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