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métiers traditionnellement associés à la mort : le bourreau - Euthanasie : De la discussion jaillit la lumière

métiers traditionnellement associés à la mort : le bourreau

exécution de Milady de Winter, Les Trois Mousquetaires,
Alexandre Dumas, 1844

Une première possibilité de comparaison existerait, bien sûr, avec le bourreau traditionnel, qui œuvrait, à travers les siècles, dans l’élimination systématique des éléments criminels et subversifs de la société ; mais les tabous et le rejet social entourant ce métier, de nos jours, rendrait une étude rationnelle de la psychologie du bourreau difficile, ou impossible. Elle retiendrait, pourtant, un certain intérêt pour nous, dans la mesure qu’elle puisse illustrer la répugnance première — la méfiance, voire l’horreur à peine contrôlée — que les gens ordinaires ressentent, tout naturellement, dans la présence de personnes qu’ils savent être des homicides.

L’exemple du bourreau nous apprend que ce rejet n’a rien de nouveau : Le Maitre de Lille, c’est-à-dire, le bourreau recherché par D’Artagnan et ces compagnons pour accomplir l’exécution privée de Milady de Winter (Les Trois Mousquetaires, Alexandre Dumas, père, 1844), est décrit par l’auteur comme un solitaire, à la fois réputé nécessaire, respecté, et évité, en fonction de sa profession ; vivant avec sa famille dans une maison à part des autres, à l’extrémité de la ville. Et fait très significatif, les quelques habitants de la place, sollicités par Athos (le Comte de la Fère) pour lui indiquer le chemin — incluant même un officier de la Guète Municipale (et en dépit d’une offre généreuse de paiement) — refusèrent vigoureusement de l’accompagner jusqu’à là.

Ce récit parle, bien sûr, d’une époque pour nous lointain ; mais ce fut écrit, pourtant, par un homme qui vivait assez récemment (1802 – 1870), dans une société française moderne et postrévolutionnaire, dans une époque historique très rapprochée du nôtre. Or, de son vivant, les exécutions criminelles se pratiquaient, encore couramment, sur la place publique de chaque ville des pays civilisés. Son auteur ne s’abandonna pas, alors, à la simple invention romanesque, libre et fantaisiste ; il en avait l’expérience directe ; et il s’adressait à un lectorat contemporain qui partageaient les mêmes références communes. Ce serait donc, vraisemblablement, un témoignage absolument fidèle du phénomène viscéral de rejet premier, ressenti par les gens d’antan — des gens qui nous ressemble toujours intellectuellement de très près — devant le personnage du bourreau traditionnel, et cela, malgré l’acceptation sociale de sa fonction.

Peut-on en douter, alors, qu’un malaise similaire ne se manifeste dans l’esprit, des gens d’aujourd’hui, devant le nouveau personnage professionnel d’assistant au suicide ? Car, si je peux me permettre une réflexion involontairement déplaisant (à fin de renforcir l’idée d’une restriction désirable du nombre de personnes ainsi mandatées pour tuer), j’oserais suggérer que la réaction d’un jeune homme, ou d’une jeune femme, qui ferait la rencontre potentiellement intéressante d’une autre jeune personne, dans un lieu de détente sociale, puisse être malheureusement teinte de sentiments très complexes, à la compréhension que cette personne eut été, aussi, l’instrument de multiples morts délibérément provoquées. 

J’oserais même, en consultant mes propres sentiments, prédire que grand nombre de gens, autrement très favorablement disposés, puissent avoir la même reflexe que les bourgeois provinciaux décrit par M. Dumas, de passer rapidement et avec inconfort devant une telle « maison ».

Voudrait-on réellement voir tous les praticiens des métiers bienveillants de la santé, associés, dans l’imagination naïve et populaire, à de telles préjugés ancestraux ? Voudrait-on réellement compliquer, ainsi, le recrutement de jeunes gens, attirés d’abord vers un métier de soins guérisseurs (mais aussi, naturellement soucieux de pouvoir vivre facilement dans une relation simple de confiance et d’interdépendance avec les personnes autour d’eux ; sans subir cette méfiance instinctive et générale qui est de tout temps réservée pour les fonctionnaires homicides) ?  Ne serait-ce pas une question sérieuse ?

Mais avec ces quelques réflexions, laissons dormir maintenant, en paix, le souvenir difficile et progressivement effacé du bourreau d’antan, pour poursuivre notre enquête dans un contexte plus contemporain et familier.

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