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- Une explication partielle : Le choc singulier produit par la Première Guerre Mondiale - Euthanasie : De la discussion jaillit la lumière

— Une explication partielle : Le choc singulier produit par la Première Guerre Mondiale

(Tome Premier : l’euthanasie et le choix — Partie C : l’euthanasie et la médecine –section III : Société en rupture — Chapitre : Prohibition III : Les suites et la signification — Une explication partielle : Le choc singulier produit par la Première Guerre Mondiale)

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La « Charge de Pickett » climax de La Bataille de Gettysburg, gravure contemporaine : Après avoir traversé un mille de terrain à découverte, exposés aux tirs de l’ennemie, les attaquants Confédérés sont arrivés trop peu nombreux pour remporter la mêlée féroce qui s’est produite autour du « petit mur de pierre », le 3 juillet 1863.

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     Comme la section présente de ce livre s’intitule, «La  société en rupture », mon but serait d’éclaircir, quelque peu, la déstructuration sociétale, que nous avions vécu au cours du dernier siècle, produite grâce à la répudiation progressive des standards collectifs de comportements personnels — qui furent traditionnellement imposés en conséquence d’une vision morale objectivement partagée — et le remplacement de cette présomption de morale universelle, par une nouvelle affirmation de la liberté subjective ; d’expliquer cette première glissade dans la perception des mœurs, qui s’est transformée avec le temps en véritable dérive face aux principes moraux d’antan, et qui s’est manifestée non seulement dans ce cas précurseur qui fut la prohibition, mais aussi, plus tard, à travers la contre-culture des années soixante (et les « guerres de culture » qui s’ensuivirent) ; de décrire, enfin, ce qui s’est éventuellement présenté comme un effondrement simple des éléments centraux (et jusqu’alors incontestés) de l’organisation sociale existante, c’est-à-dire : un rejet des devoirs premiers de défense et de reproduction, ainsi que — de nos jours — une répudiation même de l’interdit de suicide (soit un rejet de l’obligation de vivre) articulée sous la revendication d’un nouveau « droit à mourir ».

    Il me semble impossible, aussi, d’éviter cette conclusion : que ces changements n’aurait pas pu se réaliser devant une résistance réellement décidée de la part de l’autorité. D’autant plus, qu’il n’existait pas, au moins en partant, un désir populaire de changement suffisant pour mettre sérieusement à l’épreuve, les capacités répressives de la collectivité.

     Alors, pour expliquer ce qui eût pu sembler être l’abdication pure des prérogatives sociales d’auto préservation collective, j’en serait venu à invoquer quelque chose de plus insolite, soit : une perte générale de confiance, profonde et aigue, qui s’est emparée des témoins contemporains à la suite de la Première Guerre Mondiale : déboussolés devant cette démonstration des fruits empoisonnés de l’évolution récente ; dépassé devant la technologie scientifique, meurtrière, mariée à la théorie Darwinienne, et appliquée, sans merci, à la lutte des « nationalités » ; témoins ébahis, enfin, devant la destruction foudroyante qui fut le résultat des conflits ancestraux poursuivis avec les méthodes de la modernité.

     D’après cette analyse, les stress produits par la suite de cataclysmes qui commença avec la Première Guerre, auraient suffi — si je pouvais reprendre l’analogie atomique d’un chapitre précédent– pour rompre les liens existants de l’atome civilisationnel existant ; pour fracturer l’ancien noyau ; pour forcer, à la fin, l’organisation d’atome(s) appartenant à de nouveaux ordres élémentaires (ou d’après notre analogie : de nouveaux paradigmes sociaux)

     Mais pour supporter une telle thèse il faudrait, d’abord, regarder de plus près la nature de ce conflit qui se voulait « la guerre qui terminerait toutes les guerres ».

— Qu’est-ce que ce fut que la Première Guerre Mondiale ? Et de quelle façon se démarqua-t-elle de l’histoire précédente des conflits humaines ? Comparaison sommaire avec la Guerre Civile Américaine

     Pour comprendre le choc subit par les soldats, et par les civils, au cours de ce qu’on appelait la Grand Guerre pour la Civilisation (et à la suite de celle-ci), il serait utile de la comparer, sommairement, avec sa plus proche rivale des temps modernes.

     La Guerre des États (Guerre de Sécession, ou Guerre Civile des États-Unis, 1861 – 1865) fut le plus âpre des conflits modernes avant la Grand Guerre elle-même. Elle dura cinq ans. Elle aurait finalement mobilisé presque tous les hommes valables chez les Confédérés du Sud, et instauré une conscription sévère même chez les Unionistes du Nord, beaucoup plus nombreux. Elle se livrait autour de questions de la première importance, car elle établit définitivement le principe de l’indivisibilité de la nation américaine, et elle mettait un terme à l’économie esclavagiste des états du Sud. Au moins 620,000 hommes (soit 2% de la population totale et l’équivalent de six millions aujourd’hui) tombèrent. Ce fut donc, un conflit de la premier importance politique, très long, et très couteux. Mais avec tout respect, comparée à la Première Guerre Mondiale, elle ressemble, aussi, beaucoup plus aux tableaux héraldiques du moyen âge.

Par exemple : La Bataille de Gettysburg (1863), est souvent considérée comme la bataille déterminante de cette guerre, ou la victoire finale des Nordistes devint, sinon certain, au moins plus que probable. À Gettysburg 7000 hommes tombèrent. La bataille dura 3 jours. La célèbre Charge de Pickett (« Pickett’s Charge »), climax de la troisième journée, fut la tentative ultime des Confédérés Sudistes, de briser la résistance des Unionistes, et son échec les enleva toute chance de victoire. Pour préparer cet assaut critique, 170 canons tiraient sur le front Unioniste pendant 2 heures consécutives (avec un mélange de projectiles solides et de projectiles explosifs à la poudre noire). Ce fut le plus grand barrage d’artillerie jusqu’à alors connu.

D’anciens combattants, Unionistes et Confédérés, se donnent la main au-dessus du « petit mur de pierre », en 1903, à Gettysburg, Pennsylvanie, au cours de retrouvailles commémoratives, 40 ans après les faits.

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     Par comparaison : L’une des plus formidables batailles de la Grand Guerre (mais toujours une parmi d’autres), la Bataille de la Somme (1916), dura pendant 20 semaines (141 jours) d`action incessante. 300,000 hommes tombèrent (1,000,000 incluant les blessés et les « perdus »). En préparation de l’attaque initiale sur les positions Allemandes, pas moins de 1500 pièces d’artillerie auraient déversé 1.5 millions de projectiles sur les tranchées adverses (fragmentation anti-personnelle, explosifs, et gaz empoisonnés), au cours d’un barrage qui dura 7 jours.

     Les chiffres qui décrivent la Bataille de la Somme, sont alors, d’un ordre de magnitude supérieur à ceux relatifs à l’action à Gettysburg.

     Mais surtout, au contraire de la décision déterminante obtenue à Gettysburg, la Bataille de la Somme se serait abandonnée, après presque 5 mois d’action incessante, sans le moindre changement significatif, ni dans les positions, ni dans le rapport des forces des deux adversaires. Ce fut à ce moment, d’ailleurs, que fut née la théorie de la « guerre d’attrition » par laquelle l’on commençait à considérer le conflit comme une seule bataille figée en place, d’action constante et de durée indéterminée, ou le gagnant éventuel serait celui qui possèderait encore d’hommes, quand les réserves humaines totales des populations – c’est à dire des nations — adverses étaient complètement épuisées.

     Dans les faits, comme nous le savions, les Allemandes auraient eu la sagesse de chercher un armistice négocié avant que cet état d’épuisement total leur soit arrivé. Pourtant, les pertes humaines totales de la Première Guerre furent monumentales : de 15 à 19 millions de morts dont dix millions furent des soldats, et presqu’autant furent des non-combattants. Tous les pays, toutes les villes et tous les villages — presque toutes les familles sans exception — furent touchés. Mais encore là, ce n’était pas le pire, car la vraie destruction produite, par cette orgie de violence méthodiquement ordonnée, se pratiquait au niveau psychologique et sociale, dans l’idée que l’homme se faisait de lui-même, de sa future, et des rapports collectifs qui lient les hommes ensembles.

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Artillerie lourde engagée dans la Bataille de la Somme (1916)

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— La description du danger humain, réellement sans précédent, livrée dans l’incertitude du moment par une voix contemporaine caractéristique : Winston Spencer Churchill

     Vue que je n’aurais pas connu les guerres mondiales de première expérience, je ne me sens pas à la hauteur de faire la description requise pour comprendre moi-même, et encore moins pour communiquer aux autres, les impressions de choc et d’incertitude ressenties par les contemporains de cette époque. Cette tache me paraitrait tellement au-dessus de mes capacités que je préfèrent, plutôt, traduire (dans quelque détail, mais toujours en forme condensée), la description définitive de ces faits, écrite par l’un des acteurs parmi les plus influents de cette drame — Homme de guerre, homme d’état, Lauréat du Prix Nobel (non de la Paix mais de la Littérature) – c’est-à-dire : Son Excellence, Winston Spencer Churchill (1874 – 1965), Premier Ministre de la Grand Bretagne (1940 – 1945), personnage imbu d’une connaissance, et d’une préscience inégalée à l’époque, qui écrivit les extraits suivantes dans l’année 1928 (The World Crisis vol. IV : The Aftermath, 1918 – 1928, pub. Thornton Butterworth, Londres, 1929) ; en plein dans la période prohibitionniste ; dix ans après la guerre décrite ; mais dix ans, aussi, avant la reprise des hostilités (1939) : reprise tant redoutée par Churchill, et dont il ne se lassait jamais de prévenir un monde qui s’avançait pourtant, aveuglement, vers la catastrophe annoncée.

Voici l’énoncé préliminaire, de M. Churchill, qui contient aussi l’ombre d’une conclusion proprement terrifiante :

« Ce n’était qu’à l’aube du Vingtième Siècle de l’Ère Chrétienne que la Guerre commençait à s’établir dans son royaume … comme la Destructrice potentielle de la race humaine. »

La nature des protagonistes :

« L’organisation de l’humanité, dans de grands états et empires … avec l’avènement de nations imbues de véritables consciences collectives, permettait la planification et l’exécution d’entreprises de carnage, sur une étendue et avec une persévérance jamais imaginées auparavant. »

Les ressources employées :

« Toutes les vertus les plus nobles, des individus, furent rassemblées pour accroitre la capacité destructrice de la masse. Les bonnes finances … les ressources de crédit… de commerce mondial … l’accumulation de larges réserves de capital … rendaient possible… que les énergies de peuples entiers aient pu être diverties, uniquement vers d’œuvres de destruction, pendant de temps considérables. Les institutions démocratiques permettaient l’expression exécutive de la volonté des millions. L’éducation rendait le conflit compréhensible à tous et rendait chacun apte à y participer. La religion évitait les jugements de fond mais apportait son soutien et sa consolation à tous. La Science fournissait ses secrets et ses trésors … confiait ses mystères prodigieux, aux mains d’hommes forcenés »

Les conséquences observées :

« Plutôt que d’assiéger de villes fortifiées, de nations entières furent isolées dans le but d’y provoquer la famine. D’une manière ou d’une autre, toute la population participait au conflit, et tous faisaient, également, l’objet d’attaques. L’aviation ouvrait de sentiers sur lesquels la mort et la terreur pouvaient voyager loin en arrière des lignes, des forces armées, pour atteindre les femmes, les enfants, les vieillards, et les malades, qui se seraient trouvés en sécurité au cours de conflits antérieurs. L’organisation merveilleuse de chemins de fer, de navires à vapeur … de véhicules motorisés … positionnait de dizaines de millions d’hommes au point voulu et les maintenait en action continuellement. »

Les préparations toujours en cours à la cessation des hostilités :

« Mais tout ce qui s’est produit dans les quatre premières années de la Grand Guerre ne constitua qu’un prélude à ce qui se préparait pour l’année 1919. Car au cas où les Allemandes se serait repliés sur le Rhin, ils auraient été attaqués, à l’arrivée de l’été, avec de forces et de méthodes incomparablement plus puissantes que toutes celles qui furent employées jusqu’à là. De milliers d’avions aurait fracassé leurs villes. De dizaines de milliers de canons aurait assailli leur front. De gaz empoisonnés, d’une nocivité incroyable (dont le seul remède se trouvait dans un masque encore secret, inaccessible, à temps, pour les Allemandes) auraient étouffé toute résistance et paralysé toute vie sur le front attaqué. Les Allemands, sans doute, avait aussi leurs plans … »

De constats de nouveaux faits militaires, et leur signification pour le futur :

« … maintenant… dans cette période d’exténuement que nous appelons la paix… certains faits sombres émergent, solides, inexorables… définitivement exposés :

  • Dorénavant de populations entières se feront la guerre … chaque personne pleinement engagée, chacun sujet à l’attaque …
  • Des nations qui croient leur existence en jeu n’hésiteront pas à utiliser tout moyen pour assurer leur survie … C’est probable, non, certain…que de moyens de destruction générale seront utilisés … sans limite, et peut-être, impossible à contrôler une fois libérés …. »

« La campagne de 1919 ne fut jamais engagé, mais ses principes, eux, poursuivent leur chemin. Dans chaque armée on les explore, les élabore, les raffine… Et si la guerre retourne, elle ne sera pas disputée avec les moyens de 1919, mais avec d’autres … incomparablement plus formidables, et plus fatals. »

« C’est une circonstance nouvelle pour l’humanité : car sans avoir progressé, en vertu ou en sagesse, nous tenons maintenant, entre les mains, les moyens requis pour nous détruire. C’est vers cet aboutissement que tous les travaux de l’homme aurait conduit. Il serait bien que nous prenions pause pour considérer : La Mort se tient au garde-à-vous, prête à détruire tout ce qui nous reste de la civilisation. Elle n’attend que le mot de command. »

Et finalement, voici un autre texte écrit par Winston Churchill (1925), au sujet des technologies de guerre, qui semblerait décrire certains de nos armements modernes, avec une prescience unique, fondée non dans la fantaisie, mais dans une connaissance intime et privilégiée des recherches déjà en cours :

 « Ne serait-ce pas possible d’utiliser l’énergie explosive de manière incomparablement plus intense que tout ce que nous avons pu voir jusqu’à présent ? Ne serait-ce pas possible de détruire un édifice entier avec une bombe pas plus grande qu’un orange ? Et encore plus, de concentrer la puissance équivalente de mille tons de cordite pour détruire une municipalité entière d’un seul coup ? Et même en utilisant les explosifs ordinaires … ne pourrait-on pas les guider au moyen de la radio, ou d’autres rayons, dans des machines volantes sans pilot humain, dans une procession sans arrêt sur les ports, les arsenaux, les camps et les cités des adversaires ? Pour les gaz empoisonnés et d’autres formes de guerre chimique, seulement le premier chapitre serait écrit, jusqu’à date, dans ce livre terrible. Des deux côtés du Rhin toutes les avenues possibles s’étudient avec tout la science et la patience dont l’homme est capable. Et pourquoi ces études se limiteraient-elles à la seule chimie inorganique ? L’étude systématique de la maladie et de la pestilence se poursuit déjà dans plus d’un pays. Contagion pour détruire les récoltes, anthrax pour les bêtes, la peste pour détruire, non seulement des armées entières, mais de provinces aussi, au complet… Telles sont les lignes sur lesquelles la science militaire avance, inexorablement… »

Voilà les faits bruts, décrits sans nuance, ni exagération, ni retenu, par l’homme, qui fut, peut-être, parmi tous, celui qui les comprenait le mieux dans ce moment instable de hiatus, tant décevant, entre les deux Guerres Mondiales ; l’homme, aussi, dont le destin fut, éventuellement, de mobiliser son peuple, une deuxième fois, pour triompher de justesse, contre le même adversaire, dans exactement la sorte de lutte cataclysmique qu’il avait décrit avec tant de clarté, quinze ans avant les faits.

Pour nous, je soumets, ce serait difficile ou impossible de comprendre l’impression faite sur la conscience des contemporains par l’arrivée de cette menace, personnifiée dans l’imaginaire du feu, Premier Ministre W.S. Churchill, ce spectre, nouveau et terrifiant, soit : « la Guerre…entrée dans son royaume… la Destructrice potentielle de la race humain ».

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— Une paix où l’on trouva que tout avait changé  

     Aujourd’hui, nous parlons souvent du Syndrome de Stress Post Traumatique. Comment, alors, qualifier une société dans laquelle ce stress serait généralisé au point de définir la normalité, et dont les peurs futures, parfaitement rationnelles, concernerait des dangers – nouvelles, étranges et inconnues — qui seraient, non plus personnelles, mais collectives et existentielles ?

Voila le climat psychologique, je soumets, qui aurait déraillé le projet rationnel et progressiste de la prohibition : Car les hommes se seraient partis de leurs bureaux, un beau jour, pour faire la guerre, selon les usages immémoriaux de notre espèce ; mais cette guerre fut différente ; en rentrant, les dossiers qu’ils y trouvèrent, encore ouvertes à leurs places, n’avaient pas, pour eux, le même sens.

En fait, rien, pour eux, ne pouvait avoir le même sens.

La Bataille de la Somme (1916) : Traverser le terrain découvert sous le feu des mitrailleuses lourdes, Allemandes

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Poursuivre la lecture du texte en séquence linéaire…  (Tome Premier : L’euthanasie et le choix — Partie C : l’euthanasie et la médecine – Section III : Société en rupture — Chapitre : Prohibition III : Une démission fonctionnelle de l’autorité répressive — Un changement de mentalité, violemment provoqué, et à contrecœur)

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