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Compassion, et utilitarisme ; euthanasie volontaire, et l'évacuation des personnes imparfaites : des compagnons étranges sur une route bien tracée - Euthanasie : De la discussion jaillit la lumière

Compassion, et utilitarisme ; euthanasie volontaire, et l’évacuation des personnes imparfaites : des compagnons étranges sur une route bien tracée

(Tome Deuxième : Sous l’ombre de l’euthanasie — Partie C : L’euthanasie et l’idéologie — Section II : Une description des sources idéologiques de l’euthanasie en Occident — Chapitre : Compassion, et utilitarisme ; euthanasie volontaire, et l’évacuation des personnes imparfaites : des compagnons étranges sur une route bien tracée)

— Cent cinquante ans de continuité dans la stratégie euthanasiste

L’euthanasie, surtout volontaire, n’est pas conceptuellement inséparable de l’eugénie (ni des programmes utilitaires plus moderne). Pourtant, comme l’histoire nous enseigne, l’euthanasie représente l’instrument ultime pour implémenter de tels programmes, ouvertement, ou à couvert. Or, la normalisation de l’euthanasie volontaire facilite immédiatement ce processus de deux façons, car : en outrepassant l’interdiction de l’homicide (et en infirmant le principe de “vie sacrée”) elle ouvre littéralement la porte à d’autres pratiques jugées jusqu’alors impossibles. Et en deuxième lieu, elle introduit la notion, tant pernicieuse, de miséricorde dans la mise à mort — notion appliquée, par la suite : non seulement aux véritables souffrances, mais aux simples imperfections ; et non seulement aux victimes volontaires, mais aux incapables, également ; même, en dernier ressort, aux individus capables mais réfractaires.

Nous avons déjà catalogué, en quelque détail, les arguments classiques contre l’euthanasie volontaire. Mais nous avions aussi noté le fait que le médecin affronte, très souvent, des circonstances où le patient n’est pas capable d’affirmer (ni même de formuler) des dessins volontaires. Et ce serait dans tels cas où les présomptions à l’égard de la valeur intrinsèque de la vie humaine, ainsi que la présomption de miséricorde dans la mise à mort, jouent au plus fort dans les décisions de prolonger, ou d’écourter, des existences individuels.

En fait, au niveau sociétale, selon la logique pure (et aussi selon l’expérience des pays récemment lancés dans cette voie) : autoriser l’euthanasie comme soin médical (pour quelque raison que se soit, et nonobstant des prétendues prémisses volontaires), aboutit inévitablement dans la nécessité de décider, par voie politique, quelles vies méritent de continuer. Et mème si un effet résiduel du principe volontaire peut partiellement protéger les personnes capables (et non-suicidaires), il se cré toujours des pressions collectives, évidentes, en faveur de la mort précoce ; tandis que la même protection serait absente pour les personnes incapables d’en décider seules.

Or, quoique Samuel Williams avait soigneusement évité ces questions dans sa proposition initiale en 1870, elles n’ont pas tardé à se manifester dans les discussions provoquées par sa diffusion. Et à cette fin, des prétendus supporteurs de l’euthanasie volontaire auraient saisi l’occasion, aussi, pour recommander la terminaison de toutes sortes de vies (jugées par eux inutiles), largement à l’extérieur des balises “volontaire” et “sans espoir” (dans le sens stricte d’une mort imminemment anticipée).

— Charles Goddard

Remarquable parmi ceux de cette tendance se trouva Charles E. Goddard, responsable de la santé médicale à Willesden (ancienne banlieue de Londres) qui publia à son tour (1901) : “Des Suggestions en faveur de la terminaison des cas tout à fait sans espoir, de blessure ou de maladie” (“Suggestions in favour of terminating absolutely hopeless cases of injury or disease”).

Les cas identifiés par Goddard, sous une influence eugénique évidente, incluaient les déficients mentaux, habitants des nouveaux asiles publiques qui se multipliaient dans l’expansion de la largesse publique, résultant de la prospérité industrielle.

Goddard parle spécifiquement :

“… (d’) idiots, des êtres n’ayant qu’une semblance de forme humaine : incapables de s’améliorer par l’éducation ; incapables de se nourrir ou de constater l’accomplissement des fonctions naturelles ; incapables de jouir de la vie, ni de jouer aucun rôle utile dans la nature(italiques ajoutés) …”

Aussi, à ce chef, faut-il se souvenir de la cohue courante dans ce secteur à telle date, où les asiles, les hôpitaux, les orphelinats, les maisons de pauvre et de redressement — anciens et nouveaux, religieux et séculaires — se côtoyaient dans une ambiguïté chaotique de mandats et de clientèles, sous l’influence de philosophies émergentes où se mêlaient, aussi, la tradition et l’expérimental.

En particulier, à cette époque, il n’existaient que peu (ou pas) de distinction entre les différentes limites cognitives et la maladie mentale, de sorte que les définitions de Goddard aient pu s’appliquer à un très grand nombre de personnes. Et comme nous avions remarqué précédemment, le programme intégralement eugénique visait, éventuellement, non seulement les incapables, mais l’évacuation de toutes ces clientèles, de toutes ces institutions, en prétextant non seulement des torts inacceptables envers le patrimoine génétique, mais envers les finances publiques, également.

Un mot, et une idée en particulier, qui revient à répétition dans ces textes, autant de Williams que de Goddard, est celui de “l’utilité”. La notion que la vie ait une obligation de se justifier, surtout devant l’économie sociale.

Décidément, les notions darwinistes et matérialistes jouissaient d’un grand appui, à cette époque, de même que les idéologies collectivistes et utilitaires qui en prennent leur inspiration. En particulier, fut très populaire cette attitude se voulant “réaliste” à l’égard de l’utilité de la vie humaine ; attitude qui favorisait, aussi, la propagation du thèse eugénique, avec son pendant ultime d’euthanasie purificatrice.

Pourtant ce point n’était jamais majoritairement gagné.

— Une réponse politique qui fut décevante pour les eugénistes au début du dix-neuvième

Même si les idéaux de la santé, et de l’utilité sociale, devenaient très largement perçus comme les justifications nécessaires d’un support philanthropique à la vie humaine, il existaient, aussi, des raisons personnelles et collectives suffisamment fortes pour s’y opposer

De prime abord (et à cette différence avec la société actuelle), presque tout le monde concevait leur vie dans une dynamique d’interdépendance familiale ; et toutes les familles (à peu près) abritaient des personnes “inutiles”, auxquelles ces mêmes familles tenaient, souvent, avec un attachement affectif des plus tendres et des plus coriaces. Il en résulta pour plusieurs, donc, que la théorie utilitaire se soit trouvée personnalisée d’une maniéré inconfortable.

Ensuite, grâce à l’opération du premier principe de la morale Chrétienne (encore universelle à cette époque), les individus se sentaient formellement appelés à sympathiser avec le sort du voisin, et d’y consacrer les même soins qu’envers leurs propres besoins. Impossible donc, en toute conscience, de protéger des idiots, des vieillards ou d’autres “défectueux”, chez eux, tout en cautionnant leur destruction ailleurs.

Et comme résolution pratique de ces humeurs contradictoires, nous remarquons que l’engouement pour la perfection génétique (et pour les économies budgétaires) eut éventuellement prévalu suffisamment (aux E.U, au Canada, et au Royaume-Unis, etc.) pour autoriser la stérilisation d’un très large échantillon des différents résidents des asiles, des maisons de correction, et des institutions de secours ; mais en même temps, que l’appuie populaire pour l’eugénique n’a jamais permit (hors de l’Allemagne) l’évacuation simple de ces personnes, par voie d’euthanasie.

— un prospect moins rassurant au temps présent

Ces questions demeurent parfaitement actuelles, cependant, au-delà d’un siècle plus tard. Et cette persévérance idéologique s’est alimentée — en parfait continuité depuis le temps décrit — des énergies dévouées de stratèges, et de nombreux militants, fortement investis dans l’aboutissement pratique des politiques recherchées.

L’euthanasie, pour être très claire, n’est pas une politique en soi. Ce n’est qu’un outil ; tandis que ceux qui réclamaient (et qui réclament encore) un recours toujours plus étendu à son l’emploi, différent fortement dans leurs motivations. Il serait injuste, alors, de présumer des mobiles personnelles de chacun. Pourtant, ces personnes se réunissent toutes dans la promotion de l’euthanasie, et les limites de leur collaboration se précisent visiblement dans les types d’euthanasie réclamées.

À cette égard, l’euthanasie à été classifiée (par l’éthicien utilitaire Peter Singer, 1946 – ) comme “volontaire”, “involontaire”, et “non-volontaire”. Aussi, tel que noté précédemment : seulement les Allemands (pendant les années trente et quarante) auraient ouvertement voulu justifier l’euthanasie non-volontaire, c’est à dire : la mise a mort de personnes qui désirent encore vivre. L’euthanasie volontaire, cependant, se pratique couramment en ce moment dans plusieurs pays, comme le Canada ; et son proche cousin, le suicide assisté, se trouve dans plusieurs autres, incluant certains parmi les États Unis.

(Il est souvent affirmé, d’ailleurs, que “personne” ne désirent l’euthanasie non-volontaire de personnes capables. Pourtant, notre passé récent nous enseigne que ces personnes existaient, bel et bien, seulement quatre-vingts ans avant nos discussions actuelles, et cela en position d’autorité parmi l’un des peuples les plus évolués de l’histoire humaine. N’en déplaise donc, aux enthousiastes plus modérés : il est inévitable que les successeurs des partisans des anciens programmes utilitaires continuent toujours leurs activités — et projettent toujours leur influence stratégique — à l’intérieur des groupes présentement actifs dans ce domaine).

— L’infanticide comme point d’entrée pour l’euthanasie involontaire

Entre les deux pôles “volontaire” et “non-volontaire”, se trouve l’euthanasie “involontaire”, qui concernent l’euthanasie de personnes incapables, et qui se trouve le sujet de débats intenses au sein de tous les pays ayant franchi une première étape de légalisation. Or, en cherchant la circonstance la plus prometteuse pour pratiquer une première brèche dans le principe volontaire, les promoteurs de l’euthanasie se sont penchés — aujourd’hui comme à l’aube du dernier siècle — sur le sort des enfants, malades ou handicapés. Et tandis que ce soit facile de présenter des mobiles désintéressés pour de tels gestes dans certains cas limites, l’infanticide (et ensuite la destruction d’autres enfants anormaux) a toujours fait partie, aussi, des buts les plus ardemment visés par les agitations eugéniques d’antan ; et de nos jours : par les héritiers des idéaux utilitaires.

Avec cause aussi : car les attaches familiales aux enfants nouveau-nés sont beaucoup moins fortes que celles qui les lient aux personnes dépendantes et connues de longue date. Les arguments de la miséricorde, aussi, jouent particulièrement fort à l’égard des enfants, surtout parmi ceux qui croient, ainsi, éviter l’imposition aux innocents de vies de souffrance. Pour plusieurs, même, la mise à mort de tels enfants ne semble rien de plus que la rectification juste d’erreurs tragiques de la nature.

Par contre, à l’image exacte de l’euthanasie volontaire (originalement justifiée pour des cas de souffrance “exceptionnels”), l’infanticide servira aussi, très certainement, comme la mise en matière pour un phénomène beaucoup plus large, qui ne se limiterait, en toute logique, ni à l’extrême, ni à l’enfance.

Alors sans vouloir présumer des mobiles d’aucun des supporteurs de l’euthanasie (quand pris dans le cas particulier), nous pouvons toujours, je croit, nous interroger avec confiance sur les ambitions éventuelles de ce groupe pris dans son ensemble.

Mais quelque soit la vérité sur les mobiles et sur les stratégies des euthanasistes d’antan, le fait demeure que la question de l’euthanasie infantile fut très présente, (sinon dominante) durant la première partie du vingtième siècle (servant même d’occasion pour débuter le programme Allemand). Et pour illustrer cette période, j’aimerais quitter, maintenant, la sphère des abstractions, pour considérer directement les personnes impliquées, et pour ainsi dire : réunir le tout derrière un visage humain.

Pour ce faire, je proposerais le choix d’un personnage tout à fait unique ; qui jouit d’un statut iconique, historiquement et encore de nos jours ; à la fois chez les personnes handicapées et chez les intellectuels progressistes ; c’est à dire : Helen Keller (1880 – 1968). Car Helen Keller fut, à la fois, handicapée et eugéniste. Et de ce fait, Mlle Keller nous offre une fenêtre incomparable sur le vécu des handicapés, ainsi que la logique morale des eugénistes, considérés dans une vision d’avant-garde envers la responsabilité Santé-publique, telle que nous la connaissions aujourd’hui.

Poursuivre la lecture du texte en séquence linéaire… (Tome Deuxième : Sous l’ombre de l’euthanasie — Partie C : L’euthanasie et l’idéologie — Section II : Une description des sources idéologiques de l’euthanasie en Occident — Chapitre : Helen Keller : Les idées du passé qui expliquent notre présent)

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