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Les demandes (directives) anticipées d'aide médicale à mourir - Euthanasie : De la discussion jaillit la lumière

Les demandes (directives) anticipées d’aide médicale à mourir

(Tome Deuxième : Sous l’ombre de l’euthanasie — Partie D : L’euthanasie et la société — Section : Recommandations spécifiques — Chapitre: Les demandes (directives) anticipées d’aide médicale à mourir)

— Une obligation d’implémentation judicieuse

En décembre 2021, fut publié, au Québec, le Rapport de la Commission spéciale sur l’évolution de la loi concernant les soins de fin de vie: soit une Commission formée par l’Assemblée nationale du Québec pour étudier des changements possibles à la Loi 52, adoptée en juin 2014. (À voire: témoignage de l’auteur devant la Commission, vidéo du 19 août 2021; mémoire préalablement déposé, format pdf)

L’une des conclusions principales de cette Commission fut une recommandation d’accepter les demandes d’aide médicale à mourir (euthanasie) formulées par des personnes présentement inéligibles, en prévision d’un futur où l’inaptitude décisionnelle pouvait les empêcher de présenter une demande recevable.

Selon l’analyse faite dans ces pages (au sujet de la primauté de la liberté personnelle dans l’évolution sociétale au cours du dernier siècle), il serait difficile (ou impossible) de prétendre que cette liberté de choisir la mort, en prévision des éventualités futures, ait pu être refusée à ce moment, au Canada, et encore moins au Québec. Pourtant, cette innovation implique des changements majeurs dans la culture, clinique et institutionnelle, dont nous avons un devoir de bien gérer les effets: sur l’ensemble du personnel; et sur l’ensemble de la clientèle.

— Le choix érigé en principe premier, pour les uns, comme pour les autres

En premier lieu, le recours aux demandes d’euthanasie anticipées relève d’un choix. Nous avons, donc, la responsabilité de fournir des soins appropriés, autant à ceux qui choisissent cette option, qu’à ceux qui la refusent. Or, à travers les propositions de modalités d’implémentation retenues jusqu’à présent, nous nous apercevons d’un désir d’équilibrer ces intérêts divergents, surtout, de sorte qu’un accès facile et efficace soit offert (aux uns), sans indûment créer un risque de consentement accidentel (pour les autres).

Derrière cette approche se trouve la présomption, largement partagée de nos jours (et généralement présentée en évidence simple), que rien ne soit changé dans l’expérience clinique du patient-type, non-suicidaire, en autant que les formalités exigées (pour accéder à l’euthanasie) puissent nous assurer que les demandes acceptées sont de nature véritablement informée, et volontaire.

Pourtant (je soumets), rien n’est moins certain.

— Une méthodologie qui ne satisfait pas, adéquatement, les choix majoritaires

Imaginons, à cet effet, un patient hébergé en soins de longue durée, ayant reçu un diagnostic de maladie neurodégénérative et ayant choisi de faire une demande anticipée d’euthanasie (aide médicale à mourir); imaginons que cette demande ait été dûment présentée, acceptée, inscrite au registre des directives médicales anticipées, et figure, même, à l’endos de la carte d’assurance médicale dudit patient; imaginons, encore, que les symptômes du patient se rapprochent, de plus en plus, aux définitions préalablement envisagées pour actualiser la demande. Or (selon les formalités actuellement proposées), une requête de procéder avec l’euthanasie, comme telle, serait éventuellement présentée: soit par une personne de confiance nommée par le patient lui-même; ou (à défaut d’un tel signalement) par un membre de l’équipe soignante.

Remémorons maintenant ce fait essentiel, que selon les prévisions de la loi 52 (concernant les soins de fin de vie), toutes les institutions permettent la pratique de l’euthanasie. Il est donc présumé que le personnel de chacun de ces institutions soit favorablement disposé à l’égard de l’euthanasie (même si certains individus déjà en place ait pu s’en soustraire grâce aux exemptions de conscience). Par contre, avec l’ajout des demandes anticipées (conformément à l’exemple présenté ci-haut), il transpire qu’une nouvelle obligation ait été effectivement créée, soit: de suivre la condition du patient demandeur, en permanence, en évaluant constamment l’opportunité d’euthanasier celui-ci (en harmonie avec ses directives) un peu à la manière du jardinier attentionné qui surveille soigneusement le stade de maturité des différents fruits du verger dans le but de cueillir chacun au moment opportun.

Admettons, sans réserves, que telle situation répond parfaitement aux désirs exprimés par les patients ayant choisi de se prévaloir des demandes par anticipation. Admettons, aussi, que cela coïncide (également avec une concordance parfaite) à la vision de certains professionnels, ayant définitivement franchi le seuil d’une nouvelle interprétation de l’euthanasie: en véritable soin médical, utilisé pour répondre à des indices objectivement vérifiables, et non (en premier lieu) aux simples volontés du patient.

Pourtant, qu’en est-il des médecins qui croient que l’euthanasie n’ait aucun lien avec la médecine proprement dite (mais relève, à la rigueur, d’une revendication plus large de “droit-à-mourir”)? Que la demande d’euthanasie représente (logiquement) un refus de soins médicaux, qui requerrait (idéalement) un recours vers des professionnels procédant d’un mandat entièrement distinct ? Et qu’en est-il, enfin, de la majorité des patients, non-suicidaires:qui ne consentiront jamais à l’euthanasie; et qui ne peuvent, aucunement, se sentir en sécurité avec des professionnels qui croient, sincèrement, que la mort, pour eux, soit le “traitement” optimal?

Tout cela pour dire: qu’en créant un environnement clinique, qui réponde exactement aux désirs de certains patients (et certains professionnels), que –du même coup– nous en créons un qui soit parfaitement hostile aux autres.

— Des précisions numériques sur la répartition des choix exprimés

Il existe aussi une dimension quantitative à cette question, qui reflète celle de la popularité générale de l’euthanasie. Car, en dépit de toute attente (dans les premiers enthousiasmes suscités par l’événement de l’euthanasie), il parait clairement que l’instinct naturel rendra le choix de cette option fortement minoritaire, non seulement au Canada, mais partout ailleurs, et non seulement maintenant, mais (probablement) à tout jamais. Jusqu’à présent, par exemple, le plus fort taux d’euthanasie s’est manifesté parmi les patients cancéreux (de pronostic terminal) au Pays Bas, soit: 10% du total, (comparativement à 4% de l’ensemble des décès dans ce pays). Or, le point saillant qui ressort de ces faits consiste dans un constat, lucide, que les demandes anticipées d’euthanasie ne pourront que très difficilement dépasser ce taux de 10% (observé parmi les patients les plus éprouvés dans le pays qui en possède la plus grande expérience), et donc: que les patients éligibles pour l’euthanasie (par demande anticipée ou autrement) poursuivront toujours leur chemin vers la mort naturelle (chez nous) dans une proportion d’au moins 90%.

Voila, alors, qui militerait fortement pour une normalisation, institutionnelle, de la satisfaction du choix non-suicidaire.

— Une proposition méthodologique qui soit fondée, non dans le compromis, mais dans la satisfaction intégrale de besoins distincts

Selon l’opinion présente, la clé pour formuler une politique harmonieuse d’euthanasie, en milieu institutionnel, se trouve dans un constat franc de la division du marché médical: à la fois du côté des patients (les clientes); et de celui des professionnels médicaux (les fournisseurs de services).

Étant donné qu’il existent des patients qui désirent l’euthanasie (et d’autres qui n’en désirent pas), ainsi que des professionnels médicaux qui supportent l’utilisation médicale de l’euthanasie (et d’autres qui ne la supportent pas), il est évidente qu’il puisse exister d’occasions où clients et fournisseurs sont mal-assortis: que des patients désirant l’euthanasie puisse se sentir contrés, dans leur choix, par des professionnels non-sympathiques à cette pratique; et que des patients qui désirent vivre (malgré les circonstances) puissent se sentir en situation d’insécurité dans la présence de professionnels qui croient, sincèrement, que ce prolongement de vie soit inutile. Au mieux, je soumets, il serait désirable de faire soigner chaque patient par des professionnels avec lesquels les opinions à ce sujet, seront compatibles.

— Une recommandation de taches et de responsabilités, adaptée aux circonstances, et aux personnes

Pour favoriser l’apparition organique de cette distinction salutaire, je suggère que l’équipe soignante n’ait aucun rôle à jouer –ni dans l’évaluation, ni dans la réalisation– des euthanasies accomplies par demande anticipée; que toute responsabilité reliée aux volontés enregistrées reviennent, en exclusivité, à des professionnels spécialistes, servants du registre: pour faire des visites de constat périodiques auprès de la clientèle inscrite, et au besoin, pour exécuter les termes des directives en vigueur; et finalement, que tout signalement pertinent d’état, emmenant de l’entourage du patient, soit fait auprès des instances chargées à cette fin, et non auprès des soignants en devoir.

— Les effets positifs escomptés

D’après ce système, la réalisation des volontés (exprimées par le patient), seraient fidèlement exécutée –non par les agissements aléatoires de proches (ou de soignants cliniques impliqués dans cette responsabilité de maniéré accessoire)– mais par des professionnels spécialisés, dont les décisions relèvent d’une standardisation de pratique gagnée dans un contexte d’expérience routinière.

Le seul inconvénient, potentiel (pour le patient inscrit au registre), serait la possibilité d’une survie temporaire au-delà des limites contractées (dépendant du rythme des visites d’évaluation choisi par l’État). En contrepartie de cet inconvénient, cependant, se pose une garantie, certaine, de l’exécution des volontés enregistrées, impersonnellement, et à l’abri de toute ingérence (ou obstruction) emmenant de tiers (agissants –ou s’abstenant d’agir) sous l’effet de considérations personnelles, ou d’émotions résultant de leur familiarité avec le patient concerné.

La clientèle typique pour leur part, bénéficierait, ainsi, d’un gage supplémentaire de sécurité –pour eux et pour leurs familles– de recevoir des soins optimaux, offerts sans arrière pensée par une équipe soignante inconditionnellement vouée à soutenir la vie de chaque patient; et ce, sans considération de la gravité de son état, ni du degré de dépendance exhibé; un standard de soins, d’ailleurs, dont bénéficierait, également, le demandeur d’euthanasie par anticipation, aussi longtemps que cela lui soit convenable.

Pour les professionnels soignants, enfin, le chemin serait ouvert, de nouveau, pour cultiver une certitude partagée dans la nature de la mission thérapeutique: pour favoriser le maintien d’une culture clinique sans ambiguïté, uniquement informée –jusqu’à l’intervention ponctuelle d’autres choix, d’autres mandats, et d’autres professionnels– par les valeurs traditionnelles de la médecine hippocratique.

En somme, il est possible pour tous –patients et professionnels– de trouver satisfaction dans l’exercice de leurs choix individuels: tout en respectant la diversité actuelle du marché médical.

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Poursuivre la lecture du texte en séquence linéaire : (Tome Deuxième : Sous l’ombre de l’euthanasie — Partie D : L’euthanasie et la société — Section : Recommandations spécifiques — Chapitre: Une proposition d’accréditation, facultative et obligatoire, à l’intention des praticiens de l’euthanasie)

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