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La victoire sublime de la morale chrétienne: Friedrich Nietzsche; Sermon sur la Montagne; l’Empereur Constantin 1ier - Euthanasie : De la discussion jaillit la lumière

La victoire sublime de la morale chrétienne: Friedrich Nietzsche; Sermon sur la Montagne; l’Empereur Constantin 1ier

(Tome Deuxième : Sous l’ombre de l’euthanasie — Partie C : L’euthanasie et l’idéologie — Section III : Le patrimoine philosophique ancestral : le caractère sacré de la vie ; la valeur intrinsèque de l’individu humain ; les origines divines de « l’égalité » politique — Chapitre: La victoire sublime de la morale chrétienne: Friedrich Nietzsche; Sermon sur la Montagne; l’Empereur Constantin 1ier)

Le Sermon sur la Montagne; mosaïque byzantine; sixième siècle

— La critique morale de Friedrich Nietzsche: morale d’esclave, et morale de maître

La pensée de Friedrich Nietzsche (1844 – 1900), associe le Christianisme à ce qu’il appela “la morale d’esclave” (fondée sur la bonté et sur la compassion à l’égard d’autrui) par opposition à “la morale de maître” (qui se définisse, selon lui, par la fierté, et par le pouvoir).

Dans cette vision du monde, le “maître” (c’est à dire l’homme naturel) cherche son propre bien (parce qu’il le peut), tandis que “l’esclave” cherche le bien commun (parce qu’il y soit contraint). Le maître démontre sa noblesse en imposant son pouvoir sur les autres; l’esclave trahit son caractère ignoble dans l’acceptation de son impuissance.

En particulier nous trouvons la citation suivante:

“Au départ, la foi chrétienne c’est le sacrifice: le sacrifice de toute liberté, de toute fierté, de tout esprit de confiance en soi; c’est, à la fois: l’auto-assujettissement, l’auto-dérision, et l’auto-mutilation.” –Friedrich Nietzsche, “Par-delà le bien et le mal” (1886).

Ce qui manque dans cette analyse, pourtant, se trouve dans l’absence criante d’une question aussi évidente qu’essentielle, à savoir: Pourquoi la quête d’actualisation autonome et personnelle n’aboutirait-elle pas dans une conviction que la compassion, et une attention volontaire au bien commun (chez une personne qui possède le pouvoir de choisir à son gré) ne soit, en fait, le plus noble des choix?

Cette question, d’ailleurs, n’a pas toujours été uniquement théorique. Au contraire, elle s’est constamment posée, directement, à la conscience et aux cœurs des personnes de la classe maître. Et la réponse éventuellement fournie explique, à elle seule, la victoire gagnée par la religion chrétienne dans la compétition existentielle qu’elle livrait, à ses origines, avec les traditions antécédentes de l’Empire Romain (et de la civilisation antique tout court); une compétition perdue d’avance dans l’arène habituelle de la contestation violente, mais gagnée, pourtant, dans les cœurs et dans les esprits.

Car le Christianisme était, littéralement, une religion d’esclaves, et n’aurait jamais pu s’imposer autrement que par le choix, libre, de ses adeptes. Or, aussi invraisemblable que cela puisse nous paraître aujourd’hui: par la seule force de son exemple moral, le Christianisme vainquit deux-cent-cinquante ans de persécution officielle (parfois extrêmement sévère) pour devenir un culte légal (selon l’Édit de Milan, 313 AD), et la religion d’État de tout l’Empire (380).

— La morale Chrétienne d’après le Sermon sur la Montagne (circa 30 AD)

Pour dire l’essentiel, la morale Chrétienne en est une d’amour, où (selon les leçons de Abraham et Isaac, du Décalogue, et du Bon Samaritain): il est présumé que tout homme existe en relation filiale avec un Père divin dont l’attribut principal se résume dans un souci bienveillant à l’égard de sa progéniture; que les hommes (ainsi conçus comme des enfants de Dieu) s’abstiendront de faire du tort envers leurs semblables; que l’adepte ressente un souci bienveillant, à l’endroit de son prochain, qui soit égal au souci ressenti à son propre égard; et que cette bienveillance se porte non seulement aux personnes proches, mais à la famille humaine entière (incluant, même, les membres de races et de sectes antagoniques).

L’une des plus limpides des expositions de cette morale se trouve dans le Sermon sur la Montagne, raconté dans l’Évangile selon Mathieu, chapitres 5-7.

Dans ce discours, Jésus exhorte les fidèles à pratiquer une bienveillance à l’égard de tout le monde, sans exception, en imitation de l’amour de Dieu:

“afin (selon Mathieu, 5: 45) que vous soyez fils de votre Père qui est dans les cieux; car il fait lever son soleil sur les méchants et sur les bons, et il fait pleuvoir sur les justes et sur les injustes.”

En exemples particuliers, Jésus y donna les conseils suivants:

(Mathieu 5: 38) “Vous avez appris qu’il a été dit: œil pour œil, et dent pour dent.

39 Mais moi, je vous dis de ne pas résister au méchant. Si quelqu’un te frappe sur la joue droite, présente-lui aussi l’autre.

40 Si quelqu’un veut plaider contre toi, et prendre ta tunique, laisse-lui encore ton manteau.

41 Si quelqu’un te force à faire un mille, fais-en deux avec lui.

42 Donne à celui qui te demande, et ne te détourne pas de celui qui veut emprunter de toi.”

Aussi, cette injonction dépasse les actions, ouvertes et visibles, pour comprendre même (et surtout) les intentions et les sentiments:

“43 Vous avez appris qu’il a été dit: Tu aimeras ton prochain, et tu haïras ton ennemi.

44 Mais moi, je vous dis: Aimez vos ennemis, bénissez ceux qui vous maudissent, faites du bien à ceux qui vous haïssent, et priez pour ceux qui vous maltraitent et qui vous persécutent…”

En somme, selon les paroles réputées de Jésus, adressées il y à deux mille ans devant la foule à Galilée: cette bienveillance idéelle, cultivée par le fidèle en imitation de la bienveillance divine, se conduirait jusqu’à l’amour (volontaire) des ennemis, et au retour du bien pour le mal qui nous soit offert.

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L’Empereur (et Saint Orthodoxe) Constantin 1ier (272 – 337 A.D.) est crédité d’avoir rétabli l’unité de l’Empire Romain (324) avec une nouvelle capitale, Constantinople, bâtie sur le site grecque de Byzance (aujourd’hui Istanbul). Fait très notable, Constantin arrêta la persécution des Chrétiens (312), et adopta lui-même, sur son lit de mort, ce culte religieux. Soixante-dix ans plus tard (380) le Christianisme fut adopté par les Romains comme religion d’État.

Tête du colosse en bronze de Constantin, réalisée vers 326

— Une victoire philosophique du premier ordre

Friedrich Nietzsche nous invite à mépriser ces préceptes en évoquant le statut inférieur des personnes qui s’y adhéraient dans la première instance. Il prétendait, ainsi, que seulement l’impuissance totale (des Juifs devant les Romains, par exemple, ou de l’esclave devant son maître), ait pu produire un telle éthique; que seulement une personne incapable de résister aux méchants en ferait un vertu de la passivité (voir de la couardise), et encore plus de s’y accommoder en se disciplinant à aimer son persécuteur.

Soit. Le Christianisme fut réellement (au départ) une religion d’esclave. Mais d’où viendrait le mépris en conséquence ? Au contraire, il s’agissait de personnes qui ne possédaient aucun pouvoir, et qui se faisaient cruellement abusées par autrui; il s’agissait de personnes pour lesquelles les balivernes conventionnelles “de regarder du côté positif ” ne pouvaient plus porter secours, car effectivement, de côté positif, il n’y en avait point; il s’agissait, donc, de personnes qui habitaient un univers dont le bien fut entièrement absent. Et pourtant ! Ce fut aussi des personnes inconditionnellement convaincues d’une intention positive dans la création du monde; des personnes qui n’acceptaient pas de renoncer à cette vision idéelle; des personnes (à défaut de pouvoir constater ces qualités dans la réalité autour), qui s’efforçaient à trouver toujours le bien (et l’amour) dans la seule place qui se soit encore trouvée sous leur gouverne, c’est à dire: parmi eux; et dans l’extrémité finale: à l’intérieur de chaque individu –en résonance (uniquement) avec l’amour divin, à l’abri de toute volonté externe. Ce fut des personnes, alors, qui déterminaient, toutes seules, que le bien existerait malgré tout (comme Dieu a déterminé la création du monde) –simplement puisqu’elles aient voulu que cela en soit ainsi!

Loin, alors, de la servitude méprisable (si dédaigneusement dépeinte par M. Nietzsche), cette doctrine constituait une victoire inconditionnelle (et invincible) de l’esprit humain; pratiquée unilatéralement par les plus faibles à l’encontre des croyances –des préjugés et des superstitions– offerts en auto-justification par les plus forts. Ce fut (au moins pour ceux qui désirent de tout temps résister au discours nihiliste) l’une des plus importantes victoires dans l’évolution consciente de notre espèce.

Et loin, encore, d’un accommodement sordide à l’égard du pouvoir, concédé dans le but d’éviter la souffrance (et réalisé au prix de l’honneur personnel), cette doctrine permettait de persévérer, en témoin du vrai, malgré la souffrance présente; de choisir la vie, malgré les plus difficiles des épreuves; de réaffirmer, ainsi, l’intention positive de la création, en partenariat (volontaire) avec son Créateur.

— La victoire étonnante du culte Chrétien dans la crépuscule de l’Empire Romain

Au-delà des idées, au niveau de l’action: l’exemple universellement révéré parmi les fidèles, a toujours été un de fermeté devant le martyre. Non, veut-on dire par là, la simple lutte contre l’oppression et le tort (aussi longtemps que cela puisse être possible), mais devant l’inutilité manifeste de toute résistance: le refus de renier sa foi –passif et patient– quelque soient les conséquences. Et tel fut l’exemple souvent fourni par les Chrétiens dits “primitifs”, devant le pouvoir incontesté, et incontestable, de l’État romain.

Les Romains, pour leur part, ne demandaient même pas aux Chrétiens d’abjurer leur foi; ils demandaient seulement –au point de l’épée– que ces Chrétiens aient l’obligeance d’admettre, aussi, la divinité des Césars Romains (ce qui fut pour eux une simple formalité d’appartenance civique); et rien de plus! Décidément, alors (au cas qu’eussent été véridiques les charges d’infériorité morale portées par Friedrich Nietzsche) nous présumerions logiquement que toutes ces personnes eussent rendu cet hommage avec la plus grande facilité.

Pourtant, il n’en était rien.

Encore, et encore, du fond des cachots, sous la torture –en privé ou dans des endroits de supplice publiques comme la célébré Colisée– un nombre important de ces infortunés refusèrent, catégoriquement, de faire cette concession minime. Or ce fut ainsi que les Chrétiens, et le Christianisme, gagnèrent leur victoire invraisemblable sur l’État romain. Car parmi les spectateurs aux humiliations publiques infligées sur ces gens, il y avait des citoyens romains plus sensibles (ou plus réfléchis), qui étaient favorablement frappés par cette démonstration de supériorité morale, très évidente, exhibée par des personnes objectivement impuissantes, mais qui refusaient, quand-même, d’abdiquer leur jugement intérieur sous l’argument simple de la force.

Paradoxalement, donc, à l’opposé exacte des conclusions de Nietzsche, il semble que ces Romains pensifs (souvent parmi la classe élite), jugeaient que les martyres Chrétiens incarnaient –dans une mesure superlative– précisément les valeurs traditionnelles de leur propre “société de maître”; combinant, à la fois, les vertus stoïques de leur philosophes, et le courage altruiste de leur héros. Les Romains, dans un mot, étaient progressivement séduits par le Christianisme.

Une culture souterraine s’est développée au cours de ces trois siècles, souvent aux plus grands risques des adeptes Romains, qui s’est éventuellement propagée jusqu’à l’Empereur Constantin 1ier, et à sa mère Hélène (Sainte, aussi, des traditions Catholique et Orthodoxe), résultant non dans l’extirpation anticipée du Christianisme (par l’État romain), mais au contraire, par l’adoption éventuelle du Christianisme en religion d’État!

Friedrich Nietzsche décriait vigoureusement ces faits. Il regrettait amèrement que les maîtres se seraient laissés corrompre; pour adopter, à leur tour, la morale (et donc le statut) des esclaves. Pourtant, quand Nietzsche prétend que “l’humilité par choix” (revendiquée de tout temps par les Chrétiens) ne serait qu’une basse supercherie (étant au départ une humilité imposée par la force des maîtres), il y a faiblesse d’argument évidente. Car rien dans cette logique ne peut expliquer le choix, librement épousé (à leur péril personnel), par tant de membres de l’élite romaine.

Posons de nouveau, alors, notre question de départ : Pourquoi la quête d’actualisation –autonome et personnelle– n’aboutirait-elle pas dans une conviction que la compassion, et une attention volontaire au bien des autres, ne soient le plus noble des choix?

Ou comme la notion fut présentée avec tant d’éloquence par le chanteur britannique Mick Lowe (1947 -): What’s So Funny ‘Bout Peace, Love & Understanding? (Qu’y a-t-il de si drôle dans l’amour, la paix et la compassion?) (Brinsley Schwarz, 1974)

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Remémorée pour les cirques et pour les combats de gladiateurs, la Colisée servait, d’ordinaire, pour les exécutions publiques de tout genre. Quelques 500,000 personnes moururent dans ce lieu, dont environ 3,000 martyrs Chrétiens.

Un condamné tué par léopard, mosaïque romaine, Tunisie, deuxième siècle

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