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gordon friesen, auteur sur Euthanasie : De la discussion jaillit la lumière - Page 20 sur 20

Chaptire A-3 : suite et fin – la nature particulière du suicide assisté ; (suivie de) Chapitre A-4 : première partie

– la nature particulière du suicide assisté

     Il existait, certes, — et il existe toujours — une distinction de taille qui sépare le suicide, simple, du suicide assisté : car selon le code criminel du Canada …

      « 241 (1) Est coupable d’un acte criminel et passible d’un emprisonnement maximal de quatorze ans quiconque, que le suicide s’ensuive ou non, selon le cas :

     a) conseille à une personne de se donner la mort ou l’encourage à se donner la mort;

     b) aide quelqu’un à se donner la mort. »

     Dans ces statuts, nous pouvons déceler, clairement, une désapprobation fondamentale, ou à tout le moins un regret aigu, à l’égard du suicide. De plus, nous constatons un désir, évident, de limiter le phénomène, et un compréhension que les activités des facilitateurs de suicide — ceux qui « conseille » et « encourage » ; ceux qui « aide (sic) à donner la mort » — résulteraient, certainement, dans un plus grand volume de suicides réussis, à la fois puisque la personne suicidaire serait renforcie dans son désire, par une validation extérieure (possiblement de nature émotive très significative) et parce que la présence d’une autre personne, activement engagée, garantirait, à tout fin pratique, l’aboutissement du geste.

Surtout, la situation éthique serait altérée dans son essence : car, tel que nous l’avions précisé, le fait de légaliser le suicide n’implique aucunement son cautionnement, ni de la part de la collectivité, ni des individus qui la compose ; tandis que le suicide assisté implique, lui, une complice moralement responsable, et une société au moins passivement approbatrice.

     Bref, la distinction éthique (entre le suicide simple et le suicide assisté), qui soit reflété dans cette clause de loi – toujours en vigueur au moment d’écrire ces lignes — s’apparent à la différence entre accepter, sans plus, l’action de l’alcoolique qui décide soudainement de « prendre un verre », et le fait, pour un tiers, de lui verser ce verre et de l’encourager à le boire. Aussi, combien plus pointue serait cette distinction morale face au suicide assisté, là où la complicité implique une participation dans la prise volontaire d’une vie humaine !

     Tel fut, donc, la situation après 1972, avec le suicide simple décriminalisé, mais l’assistance au suicide toujours sévèrement réprimé.

     Mais, comme je tenterais de convaincre le lecteur au cours des chapitres subséquents, il ne faut absolument pas sous-estimer la force de la mouvance, séculaire, sociale et philosophique, vers la liberté personnelle subjective. Et il ne faut pas, non plus, sous-estimer la créativité avec laquelle ses partisans auront su avancer leur cause.

     Dans l’occurrence, la preuve était abondamment faite que la logique subjective pure ne pouvait pas remporter cette bataille (ou au moins pas dans l’immédiat). Mais par contre, les apôtres du droit à mourir s’en sont persuadés qu’une première brèche pouvait être pratiquée dans l’interdit, à condition que certains suicides (seulement) puissent être identifiés en bien objectif. Il serait, alors, de notre devoir collectif de permettre l’accès à ce bien, pour tout le monde, y incluant ceux qui ne pouvait pas y accéder tout seule, c’est-à-dire : de permettre, dans ces circonstances spéciales, le recours non seulement au suicide, mais au suicide assisté. Et c’est ainsi, que les ténors de la liberté subjective auraient trouvé suffisamment de fluidité, dans leur démarche stratégique, pour embrasser, de nouveau, le langage de la moralité objective : pour adopter, dans une certaine mesure, les armes de leurs adversaires ; pour chercher une exception objective à l’interdit.

      Or, fait tant significative mais pas, je soutiendrais, suffisamment remarqué : grâce à l’introduction de prétendus critères médicaux objectifs, cette manœuvre fut pratiquée avec un appel aux caractéristiques propres, non plus au suicide pur, mais à cet autre phénomène — que nous considérons d’encore beaucoup plus néfaste, c’est à dire : l’euthanasie.

Chapitre A-4 : l’euthanasie volontaire ou « aide médicale à mourir »

– distinguer l’euthanasie, avec sa tradition empoisonnée, de l’assistance au suicide

     L’euthanasie, proprement dit, sera traitée en plus de détail dans la deuxième partie de ce livre. Pour l’instant, disons seulement que l’euthanasie (qui soit la mise à mort directe du patient par son médecin) se pratique, en tout temps, sous la prétention théorique, que, dans tel ou tel cas particulier, elle représente la meilleure réponse médicale à la souffrance du patient. Il s’ensuit que la justification de la mise à mort n’en est plus uniquement subjective, mais bien objective. Et de ce fait, l’euthanasie n’est pas nécessairement volontaire.

     Or, le rejet à répétition des différents régimes d’euthanasie, qui furent proposés pendant la première moitié du vingtième siècle, fut surtout le rejet de cette idée de tuer des gens dépendants, contre leur gré, ou dans l’incapacité de comprendre ce qui les arriva (suite au jugement objectif des médecins que leurs vies ne méritaient pas d’être vécu). Et nous nous devons de réaliser, ainsi, devant la trame historique des discussions à ce sujet, que l’utilisation des justifications, propres à l’euthanasie, introduit un bagage tout autre — lourd, et pénible — dans notre démarche actuelle.

     Alors, même si « l’aide médicale à mourir » peut se confondre très facilement, dans l’esprit populaire, avec le « suicide assisté par médecin », il ne reste pas moins que la différence soit profonde : le suicide assisté demeure un geste non seulement volontaire, mais subjectivement arbitraire, tandis que l’euthanasie volontaire se veut, aussi, scientifiquement et médicalement — c’est-à-dire, objectivement – indiquée dans les circonstances définis.

     Cette distinction se reflète, encore, dans les détails techniques de l’accomplissement du geste. L’assistance au suicide classique implique, le plus souvent, la présentation au suicidaire d’une potion létale, qui serait ingéré par ce dernier d’un geste autonome. Et dans tel cas, il existerait, sinon la preuve, au moins un fort indice à priori, que la mort résultante soit volontaire ; aussi, personne d’autre ne pouvait être accusée d’avoir directement produit cette mort. Mais avec l’euthanasie, les faits se présentent sous un jour entièrement différent, car, dans ce cas, ce serait le médecin (ou autre technicien) qui tuerait le sujet ; ce qui ouvre immédiatement des questions extrêmement pointues, de consentement et de responsabilité, qui sont largement absentes face au suicide, qu’il soit assisté ou non.

     De par le passé, la clarté de cette distinction était quelque peu embrouillée par la possibilité qu’une personne puisse désirer la mort, mais demeurer physiquement incapable de se l’accorder, même avec l’aide d’autrui. Or, cette difficulté n’existe plus, car avec les moyens modernes d’automation et de contrôle des systèmes informatisés, n’importe quelle personne — qui serait capable de communiquer son désir suicidaire — serait également capable d’initier une suite d’actions mécaniques qui aboutirait dans sa mort.

     Voilà, donc, la possibilité d’un décuplement pratique et complet des notions, du suicide et de l’euthanasie, qui devrait nous imposer un regard très critique sur la pratique actuelle ! Car, au cas où le premier concerné ne se montrerait pas prêt, dans son moment personnel de vérité, à provoquer délibérément sa propre mort, — ne serait-ce qu’avec le clignotement d’une paupière ou le clic d’une souris — comment pourrait-on prétendre que le décès soit réellement volontaire ? Et dans ce cas, comment pouvions-nous permettre que le médecin traitant puisse évoquer cette justification pour en prendre une telle responsabilité létale ?

     Voilà, crument exposée, ce qui distingue l’euthanasie du suicide, et ce qui expose, aussi, la raison derrière ce fait observé, que le nombre de pays permettant l’euthanasie soit tellement plus restreint que celui de ceux qui autorisent le suicide assisté ; et que tant de médecins (et de corporations de médecins) puissent se montrer prêts, aujourd’hui, à envisager l’un, qui sont, pourtant, toujours catégoriquement opposés à l’autre : car, logiquement, une fois le droit au suicide assisté accordé, l’autorisation de l’euthanasie devient une superfluité complète en ce qui concerne les seules morts volontaires. Dans quel but, alors, demande-t-on, aussi, dans certains pays, un recours à l’euthanasie ?

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la regarde des bien-portants : différence de perception fondée dans la différence expérientielle ; nature changeante de l’opinion publique


 Marathon de l’Espoir : 12 Avril au 1 Septembre, 1980 ; 143 jours ;
5,373 kilomètres

     Pour la plupart, les gens bien-portants – incluant les professionnels de la santé — ne possèdent pas, encore, les expériences requises pour faire de jugements personnels — fondés dans la profondeur du vécu direct – ni de la maladie, ni de la souffrance, ni des déficits physiques. Ils sont, donc, susceptibles d’épouser les opinions de ceux qui en possèdent, et qui présentent, aussi, des histoires personnelles plus saisissantes ; ceux dont le sort et les gestes font vibrer les émotions et évoquent l’admiration.

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métiers traditionnellement associés à la mort : le bourreau

exécution de Milady de Winter, Les Trois Mousquetaires,
Alexandre Dumas, 1844

Une première possibilité de comparaison existerait, bien sûr, avec le bourreau traditionnel, qui œuvrait, à travers les siècles, dans l’élimination systématique des éléments criminels et subversifs de la société ; mais les tabous et le rejet social entourant ce métier, de nos jours, rendrait une étude rationnelle de la psychologie du bourreau difficile, ou impossible. Elle retiendrait, pourtant, un certain intérêt pour nous, dans la mesure qu’elle puisse illustrer la répugnance première — la méfiance, voire l’horreur à peine contrôlée — que les gens ordinaires ressentent, tout naturellement, dans la présence de personnes qu’ils savent être des homicides.

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Chapitre A-3 : Du suicide simple à l’euthanasie volontaire (1ière partie)


le suicide

     Derrière le suicide assisté, et derrière son pendant particulier, l’euthanasie volontaire — ou « aide médicale à mourir » — se trouve le fait cru du suicide simple.

     Que peut-on en dire ?

Dans chaque cas particulier, la motivation suicidaire demeure un mystère subjectif. Le nouveau terme « suicide rationnel » comporte, alors, un caractère fondamentalement oxymoronique, car l’essence de la rationalité, c’est-à-dire un accord obligé parmi des gens « raisonnables » n’existe pas : dans des circonstances identiques, deux personnes, également « rationnelles » choisirait différemment face au suicide, sans qu’on puisse expliquer pourquoi.

     Pour la personne suicidaire il y a, peut-être l’attrait d’une porte de sortie. Pour la collectivité, cependant, de sortie il n’y en aura point. Quelles que soient les conditions préalables au suicide – quelles que soient les malaises, les drames, les pots cassés — la vie continue, et doit continuer dans l’absence du décédé.

     L’absence…

     Des enfants sans parent. Des parents qui plaignent la perte d’une enfant. Rare sont les cas de suicide où il n’y aurait pas de séquelles dramatiques — émotives, psychologiques, et souvent financières — suite à cet arraché soudain, et inaltérable, de la fleur de la vie.

– deux réactions sociales au fait de suicide : tradition et choix

     De manière peut-être un peu simpliste, nous pouvons surtout dénombrer deux réponses philosophiques, adaptées au défi constant du suicide :

    Premièrement, à partir de notre histoire, et de nos traditions gagnées dans l’évolution organique de notre espèce, nous avions développé un système de moralité objective. Ce qui voulait dire, surtout, que les gestes considérés odieux par l’ensemble des gens ordinaires furent condamnés, prohibés, et habituellement, punis ; la dérogation personnelle aux règles communes n’était pas permise.

   Évidemment, jadis, le suicide pouvait avoir des effets très nocives dans un environnement évolutionnaire, des plus rudes, ou la survie du groupe dépendait, avant tout, de la persévérance inconditionnelle de chaque membre. Rien d’étonnant, alors, que le suicide se serait trouvé dans cette catégorie de gestes proscrits.  Le sacrifice de soi, pour le bien du groupe, fut une chose noble et admirée, certes ; mais le simple abandon, devant la vie et ses responsabilités, ne le fut aucunement. Et c’est ainsi que les gens disaient « Le suicide est mal », de la même façon qu’ils auraient pu dire « le ciel est bleu ». Pour eux, il s’agissait d’un fait objectif.

    En conséquence, les tentatives de suicide étaient illégales et punissables ; les suicides réussis furent punis avec la profanation des dépouilles et la confiscation des biens. Et devant le fait imminent, nous nous efforcions, non seulement à raisonner avec l’individu hésitant, qui menaçait de se projeter en bas du pont, mais aussi à empêcher son geste de force ; tandis que l’assistance au suicide, elle, fut catégoriquement exclu, légalement défini en homicide.

    Par contre, il y a une deuxième souche philosophique, qui championne, en toute circonstance, la volonté subjective de l’individu. Et vu son importance dans les transformations sociales que nous connaissons (incluant dans notre matière choisie de suicide assisté) je détaillerai quelque peu, dans la suite du texte, la nature de cette moralité de choix, avec référence aux épisodes pertinentes dans notre histoire récente, telle la défaite de la Prohibition, le refus du service militaire, le divorce, l’avortement, l’homosexualité non-dissimulée, et aussi, l’usage plus ou moins ouvert de drogues récréatives. Il serait, à mon avis, impossible de surestimer l’influence de cette idée, tant radicale, voulant que l’individu, seul, soit l’unique juge, légitime, de la moralité de ses comportements personnelles, ou, comme chantaient avec tant d’entrain les Animals  (1965, Roger Atkins et Carl D’Errico) « It’s my life and I’ll do what I want ».

– la décriminalisation du suicide

    C’était dans cet esprit que le suicide fut décriminalisé, au Canada (1972). Il fut également postulé que la décriminalisation puisse sécuriser les survivants de suicides ratés ; les encourager à s’identifier, et à chercher l’assistance nécessaire ; ce qui pourrait, possiblement, réduire l’ampleur du problème. À partir de cette date, donc, il n’y avait plus de pénalité criminelle ni pour la tentative, ni pour le fait.

    Cette décision fut coïncidente, d’ailleurs, avec un plus grand mouvement vers la « désinstitutionalisation  » par laquelle les malades mentaux furent libérés, ou (selon les préjugés du témoin), simplement éjectés du system d’asile. Ces gens n’étaient plus protégés de force ; mais furent renvoyés dans la population générale, pour y faire, essentiellement, à leur tête. Devant ces faits, on pouvait soutenir la thèse libertaire : que la dignité humaine et l’autonomie personnelle des malades furent respectées ; que la séquestration — parfois dans des conditions de cruauté inquiétantes — fut évitée ; et que des ressources publiques importantes furent épargnées. Mais on pouvait également prétendre que la société eût failli dans son devoir de fournir des solutions modernes, scientifiques et humanitaires, aux défis de la maladie mentale ; qu’on eût refusé d’y accorder des ressources proportionnelles à l’importance du phénomène ; qu’on eût contribué, ainsi, à la continuation de la souffrance et de la mortalité — autant évitable que largement répandue — parmi les souffrants des maladies mentaux. Ces deux arguments coexistaient à l’époque ; et ces deux arguments coexiste toujours.

    Toujours est-il, que cette décriminalisation du suicide simple puisse servir d’exemple édifiant sur l’opération de la morale subjective franchement appliquée (à l’encontre directe de ce que nous observons aujourd’hui dans la mise en place confuse de l’euthanasie) : car selon la forme retenue à l’époque, ni les citoyens individuels, ni l’État, ne se trouvaient moralement compromis dans la validation du geste mortel (outre le fait d’accepter passivement son accomplissement). Au contraire, les individus — et l’État — conservaient, en vertu d’un choix subjectif diffèrent mais également légitime, tout leur droit de désapprouver et de combattre le fléau du suicide (lutte à laquelle grand nombre se sont montrés effectivement d’accord, par la suite, pour y consacrer des ressources considérables).  Cependant, à travers la logique subjective –en vertu d’un respect envers d’autrui, et même d’un respect dans le différend –le droit au suicide fut admis. Désormais, tout certitude d’opinion à ce sujet relèverait de la préférence personnelle. Et c’est ainsi qu’au sein de la société canadienne, aujourd’hui, le suicide ne soit ni bien, ni mal ; ou au moins, pas de la même manière que le ciel soit bleu : le suicide serait bien ou mal, au choix, selon les préjugés de la personne avec laquelle nous nous entretenons.

    Pourtant, cette situation ouvrit des questions pointues, de discrimination et de justice, à l’égard des personnes qui auraient bien voulu se suicider mais qui n’en fussent pas capable, physiquement (ou peut-être psychologiquement) d’accomplir, sans aide, leurs desseins fatals

    Qu’en est-il, alors, de ces personnes ? Que fait-on de leur droit de faire ce qu’elles veulent bien faire ? En somme : s’il fallait accepter le suicide simple, qu’en serait-il du suicide assisté ?

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Pourquoi privilégier la discussion de l’euthanasie en langue française ?


François Rabelais  1483 (ou 1494 ?) – 1553

    1. Les pays du monde vivent actuellement des situations très différentes face à l’euthanasie. Pour la plupart, l’euthanasie et le suicide assisté sont proscrits. Tel est également le cas dans la diaspora Britannique (Royaume Uni, Australie, Nouvelle Zélande), ou ils’agit, encore, de pratiquer (ou de prévenir) une première brèche dans l’interdit. Les discours offerts à ce niveau pour opposer ces pratiques sont catégoriques (tel qu’illustré par cet article paru dernièrement dans le journal de l’Association Médicale Mondiale, 2018, Numéro 3, page 17), et donc d’un intérêt très limité dans un pays comme le nôtre ou nous devons, déjà, composer avec la réalité de l’euthanasie transformée en intervention routinière.

     2. Aux États-Unis, il n’y a que sept états qui permettent des formes diverses d’assistance au suicide. Pour la majorité des états (comprenant 82 % de la population), la dynamique ressemble à celle décrite ailleurs : une opposition (ou promotion) première, tactique et contextuel, mal-adaptée, donc, aux exigences de la légalisation. De plus, dans les états permissifs, il n’y a qu’une utilisation très marginale des autorisations d’assistance au suicide, qui se produit dans un environnement médical de choix, fondé dans un libre marché, et où les problèmes soulevés par l’introduction de l’euthanasie dans une panoplie de soins universellement garantis, par un monopole d’état, ne se posent pas.

     Pourtant, malgré ces faits, le débat nord-américain (en langue anglaise), est actuellement dominé par les débats et les enjeux américains, qui ne reflètent que les contextes et les discours pré-légalisation, ce qui tend à empêcher l’expression de réflexions et d’analyses mieux adaptées aux conditions canadiennes actuelles.

     3. Les pays ayant le plus d’expérience avec l’euthanasie sont la Belgique, les Pays-Bas et le Luxembourg (Bénélux). Celui avec le plus d’expérience du suicide assisté est la Suisse. Or, cette zone d’Europe exhibe une forte concentration de population et de scolarisation francophone. L’usage du Français, donc, faciliterait la participation souhaitable des intervenants de ces pays, c’est-a-dire : de ceux dont le vécu aurait le plus à nous enseigner.

     4. Ce n’est pas un hasard, que — sur la scène nord-américaine — l’euthanasie soit arrivée au Québec en première instance.  Ce fut l’effet naturel des liens entretenus par les intellectuels québécois avec leurs pairs outre-Atlantique ; et la langue préférée des intellectuels québécois demeure le Français.

     Pour toutes ces raisons, je crois, fermement,qu’il serait de la plus grande utilité, au Canada, que la voix et l’expertise québécoise, en matière d’euthanasie, ne se fasse pas diluée à l’intérieure de la conversation générale nord-américaine. Rien n’empêche la propagation (traduction) ultérieure de cette voix distincte, mais pour ce faire, il faudrait d’abord qu’elle existe. Et c’est ainsi que, malgré les difficultés évidentes que j’éprouve personnellement dans cet environnement linguistique, je me serais résolu à utiliser cette langue, poétique, précise, et exigeante.