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- Simplicité rassurante de prescription dans le régime de morale universelle - Euthanasie : De la discussion jaillit la lumière

— Simplicité rassurante de prescription dans le régime de morale universelle

(Partie B : l’euthanasie et la clientèle — Section II : la morale et la loi — Sous-Section II a): La morale dite « catégorique », « objective », « universelle », ou « absolue » — Chapitre : influence incontournable de l’ethos traditionnel dans la vie contemporaine — Simplicité rassurante de prescription dans le régime de morale universelle)

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Moïse reçoit de Dieu les dix commandements (1515) de Michel-Ange (1475 – 1564), mausolée du pape Jules II (Giuliano della Rovere, 1443 – 1513), San Pietro in Vincoli, Rome

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      Toujours est-il, que l’un des bénéfices principaux, du paradigme moral catégorique, demeure la clarté des prescriptions de conduit. L’être humain, de tout évidence, se trouve fortement rassuré quand les règles morales sont claires, même si les origines de ces règles peuvent lui rester plutôt obscures. Car les choix personnels peuvent être très difficiles ; et l’individu hésitant, au-delà des tortures de sa conscience propre, prendrait satisfaction à croire que — sur un plan plus élevé — son cas soit absolument réglé. (Et comme nous le verrons plus tard : l’abjuration traditionnelle de l’homicide médicale aurait servi, aussi, à fortement calmer les angoisses de conscience, chez le médecin d’antan, en écartant d’emblée cette option, et donc, en lui épargnant les questionnements et doutes, qui y sont afférentes.)

     D’autant plus grands sont les avantages de ce système que la simplicité des personnes concernées soit importante, ce qui explique, par exemple, la tendance naturelle de la jeunesse à se réfugier facilement dans des certitudes — souvent à l’ouverture du premier livre significatif rencontré — que les enthousiasmes ainsi produits soient durables ou passagères. Mais plus tard, aussi, et devant une expérience plus complexe et ambiguë (et parmi les plus sophistiqués d’entre nous) : l’individu serait souvent porté à faire confiance à l’endroit d’une sagesse supérieure.  Il peut, possiblement, conclure (et accepter) qu’il soit inutile (voir impossible) de comprendre, lui-même, les raisons profondes des dictats morals de sa communauté ; il peut même se trouver en conflit avec ceux-ci, et en contrevenir délibérément aux statuts. Mais tout cela n’empêcherait pas sa conviction simple, que la vérité existe, dans l’absolu – au mieux, telle que cisaillée dans la pierre des lois de sa collectivité — ou, à la limite, dans un ensemble idéel qui reste à découvrir, tel que les erreurs qui aient pu s’y glisser, de nos jours, seront éventuellement découvert et corrigé.

     Hamlet, par exemple, dans la célèbre pièce qui porte son nom, fort de la certitude de l’interdiction divine contre le suicide, invoque et rejette cette option dans une célèbre phrase ou deux (« être ou ne pas être… »), simplement parce qu’il croit que son Dieu en avait statué autrement. À travers sa personnage vedette, alors, Shakespeare fuit les choix multiples de ce qu’il pouvait, ou voudrait, faire ; il se réfugie plutôt dans la recherche rassurante de ce qu’il « devrait » faire — qu’il ait été, ou non, content du résultat.

     Plus généralement, le moraliste traditionnel, et encore de nos jours – tout comme Hamlet jadis — ne ferait pas appel à ses préférences subjectives, mais déclencherait un raisonnement objectif pour trouver la meilleure option. Et quand il l’aurait déterminé à sa satisfaction, il confirmerait son choix en écartant tous les autres. Il apparaîtrait, alors, avec la clarté souhaitée, un « bien » mis en contraste avec plusieurs « maux ». Ou, au pis-aller, il prendrait le moindre mal et l’élèverait en bien nécessaire. Mais en tout cas, il chercherait, de préférence, le bien unique ; et encore, le plus souvent, un moraliste en position d’autorité chercherait à privilégier le bien unique dans l’esprit populaire, en interdisant tous les autres choix, c’est à dire, en légiférant contre les manifestations du mal.

     Ces faits revêtissent une importance essentielle dans notre discussion présente, puisque tout notre code de loi existant, ou presque, serait le produit ancestral de ce procédé philosophique. Ainsi, que cela nous plaise ou non, toute prescription (ou proscription) légale, produirait, aussi, une association présomptive de « bien » ou de « mal » dans l’esprit populaire, de manière tout à fait involontaire. Ou autrement dit : quelle que soit la motivation du législateur, les individus qui constituent collectivement « le peuple » (autant les plus sophistiqués que les plus rustres) présumeront naturellement que les choses « légales » soient « bien » et que les choses « illégales » soient « mal ».

D’ailleurs, cet attribut des lois serait probablement devenu plus fort, et non plus faible, devant la montée des théories qui nierait la réalité d’une quelconque morale profonde et objective. Car dans la mesure grandissante d’une absence de foi générale dans la réalité d’une telle morale, la loi, elle, demeure comme seule balise objective des comportements, et alors, héritent par défaut de tout la confiance dépendante qui fut réservée précédemment pour celle-là.

     Plus encore, de par le passé, il fut généralement admis que la loi puisse diverger de la réalité morale de manière importante, mais que cette dernière préservait toujours sa précédence ; et s’ensuivit un respect important (même à l’intérieure des luttes de culte les plus féroces) pour les personnes qui refusèrent leur acquiescence devant la loi, sous prétexte d’un sincère doute à propos de la légitimité morale de celle-ci.

     Mais aujourd’hui, au contraire, où la morale est presqu’officiellement considérée comme un mirage infiniment malléable dans la relativité contextuelle, un changement de loi, aussi capricieux ou fantaisiste qu’il puisse nous sembler sur le coup, s’imposerait, presqu’immédiatement, avec une autorité incontestable. Et alors, dans un tel environnement social, le fait de risquer la censure légale, par souci personnel de conscience morale, exposerait probablement l’individu récalcitrant à des charges d’infirmité mentale, plutôt que d’évoquer l’admiration populaire devant l’intégrité de son caractère.

    L’erreur, bien sûr (si erreur il y en a) résiderait dans le fait de chercher, toujours, instinctivement et sans relâche, un bien qui soit universelle et vraie, même si nous nous sommes habitués, dans le discours public, à nous moquer ouvertement d’une telle idée. Cependant, quand-même bien que la loi, de nos jours, ne prétend même plus aspirer à l’exercice d’une telle autorité, le citoyen, dépourvu de toute autre ressource, s’obstine, tout de même, à rechercher la vérité morale dans ce lieu.

   Évidemment, les effets pervers d’un tel procédé – face, aussi, à l’assimilation sociétale de la décriminalisation de l’euthanasie – sont légion.

— L’Example du cannabis

    Au Canada, nous aurions assisté (2017 – 2018), à la déroulement d’un dynamique similaire en ce qui concerne la légalisation de l’usage récréatif du cannabis : au départ l’état n’épousait qu’un logique de réduction des torts devant un phénomène qui fut toujours considéré assez problématique ; mais par la suite, il s’est aussi improvisé en fournisseur, et ce qui plus est, se donne actuellement à des manœuvres très agressives de mise en marché, par la multiplication et la développement de nouveau produits qui sont ciblés vers des groupes démographiques jusqu’alors peu participants, et ce, dans le seul but d’en augmenter la volume. Comment expliquer ce revirement ? cette nonchalance ?

     En fait, rien ne serait plus prévisible dans la confusion théorique de la morale actuelle : car avec la légalisation de l’usage récréatif du cannabis, et devant la répudiation publique de tout autre autorité morale, toute doute sur la désirabilité de cette pratique fut dissipé (immédiatement, et comme par magie, c’est-à-dire : par définition). Désormais, si l’individu en aurait le droit (morale) d’en utiliser, l’etat en aurait, aussi, le droit (morale) d’en vendre, et plus encore : d’en augmenter délibérément l’usage de cette drogue parmi la population !

     Avec un trait de plume législative, un nouvel état de fait moral s’est instauré : dorénavant, « il n’y a rien de mal là-dedans ».

     Et tel fut, également, le cas de l’euthanasie, où la logique de décriminalisation ait pu, peut-être, à l’origine se relever seulement d’un paradigme relatif de « permission » neutre, mais dont l’application institutionnelle, elle, aurait procédé à répandre ce nouveau « bien » — sans perdre le moindre temps — avec toute l’autorité présumée de l’absolu. Car, quels que furent au départ les subtilités de discours (ou d’intention) : dans l’esprit populaire et dans l’espace publique, la légalisation de l’euthanasie — et surtout sa définition légale en soin médical bénin — aurait pragmatiquement impliqué l’affirmation du « bien », officiellement sanctionné, de cette pratique.

San Francisco, 1967

Poursuivre la lecture du texte en séquence linéaire……  (L’Euthanasie et le choix : Partie B – L’Euthanasie et la clientèle : Section II – La morale et la loi : Chapitre – L’Exception érigée en règle, ou : Ce qu’Alice trouva de l’autre côté du miroir)

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