Deprecated: Le crochet jetpack_pre_connection_prompt_helpers est obsolète depuis la version jetpack-13.2.0, sans aucune alternative disponible. in /hermes/bosnacweb01/bosnacweb01an/b2067/nf.euthanasiediscussion/public_html/euthanasiediscussion/wp-includes/functions.php on line 6078
- Le mépris de la faiblesse - Euthanasie : De la discussion jaillit la lumière

— Le mépris de la faiblesse

(Tome Deuxième : Sous l’ombre de l’euthanasie — Partie C : L’euthanasie et l’idéologie — Section II : Une description des sources idéologiques de l’euthanasie en Occident — Chapitre : Les racines de l’euthanasie dans les idéologies du dix-neuvième siècle — Le mépris de la faiblesse)

.

Wolfgang Menzel (1798 – 1873) fut un poète, professeur, journaliste et critique ; plutôt centriste, d’adhérence politique changeante ; mais toujours fidèle à l’idéal germanique. Ses œuvres d’histoire incarnent une recherche passionnée et littéraire de l’âme allemande.

Traduite en anglais, son « Histoire de l’Allemagne » fut largement disséminée dans les grandes collections d’« histoires nationales » qui étaient tant populaire au tournant du vingtième siècle (P.F. Collier ; Encyclopedia Britannica ; National Alumni ; Co-operative Publication Society). Dans ces recueils exhaustifs, l’œuvre de Menzel fut choisi pour représenter le véritable esprit de la « nation » allemande (encore divisée, de son époque, dans de multiples états et principautés), au même titre que furent incluses la « Courte histoire du peuple anglais » de John Richard Green (1837 – 1883), et « l’Histoire de France, racontée à mes petits-enfants » de François Pierre Guillaume Guizot (1787 – 1874).

.

     Décidément, nous serions en droit de soupçonner que cette identification enthousiaste (avec un passé légendaire ou la violence régnait en valeur suprême), ait pu s’accompagner d’un certain risque de dérapage dans la douceur des mœurs. Et comme de fait, cette vision de l’humanité robuste (qui présentait la force pure des individus, et des états, comme la seule justification de leur dominance), exacerbait très certainement les préjugés humains, préexistants, face à la faiblesse dans toutes ses formes ; et en particulier : validait le mépris instinctif ressenti à l’égard de tous ceux, et celles, qui en exhiberaient les taures. Peu surprenante, alors, que ces citoyens-guerriers rêveurs, aient pu si facilement adopter une attitude intransigeante, voulant que la vie amoindrie ne méritât pas de vivre.

— Une description des traditions préhistoriques, de suicide (et d’homicide), glorifiées sur les bancs d’école

     Spécifiquement, en ce qui traite de l’euthanasie, nous trouvons, des 1849, la description suivante présentée aux écoliers Allemands (voir Britanniques, et Américains) comme un idéal ancestral digne d’émulation :

     « Au temps les plus lointains, ce fut l’usage Germanique de détruire les enfants chétifs ou difformes, de noyer dans les marécages les hommes dont les corps furent honteusement mutilés (corpore infames), et une fois rendus improductifs sous le poids de l’âge, de se priver, volontairement, de la vie. Une existence dépourvue de force et de beauté leur semblait sans valeur, et selon leur culte, les joies du paradis ne furent accordées qu’à ceux qui tombèrent devant l’épée.

     Au Nord, les malades furent transpercés au point de lance, selon leur propre requête, à fin qu’une blessure, et non la maladie, puisse fournir la cause de leur décès. Au Norvège il y avait un rocher, d’où les vieux hommes se jetèrent à la mer, ayant précédemment célébré des fêtes d’adieu au cours desquelles ils auraient divisé leurs biens parmi leurs enfants. »

     — « L’histoire de l’Allemagne depuis les temps les plus reculés, jusqu’à nos jours » (1849) par Wolfgang Menzel (1798 – 1873)

— La récupération moderne de ces contes lointains

     Le lecteur reconnaitrait ici, peut-être, les sources romaines de M. Menzel (surtout Tacites, 58 – 120 A.D.) Et il pourrait, certes, surgir, un petit sourire ironique (à l’idée que ces quelques maigres traces des ancêtres glorieux de l’historien, aient pu survivre, grâce uniquement à l’érudition et à l’intendance prudente de la Némésis Romaine. Et pourrait se poser aussi, possiblement, des questions quant à la sagesse de présenter un tel ramassis de stéréotypes, de préjugés, et d’anecdotes lointaines, comme un portrait fidèle des origines germaniques.

     Notre but, cependant, ne serait pas, réellement, de chercher la vérité dans la préhistoire. Ce serait seulement d’examiner, plutôt, l’usage fait de ces traces ancestrales par Menzel et ses contemporains – auteurs, poètes et savants du nouveau nationalisme — dans la promotion de leur vision moderne des hommes du passé. Et à ce chef, nous constaterions que la préoccupation principale de cet historien (reconnu, d’ailleurs, comme un esprit modéré, et non radical, de sa génération), fut la représentation, et l’idéalisation, d’un état d’esprit qui faciliterait le sacrifice — de leur sang et de leurs vies — par les jeunes hommes de l’Europe moderne : sur des champs de bataille également modernes ; régimentés et industrialisés (autre grande ironie) dans un degré jamais vu auparavant ; et ce, dans une émulation romantique des guerriers libres et sauvages du mythe païen d’antan !

     Car en fin du compte, l’aboutissement de cette recherche exaltée de la liberté dans l’action, deviendrait, bientôt, l’anéantissement personnelle dans « la conscience nationale » de Georg Hegel ; et l’asservissement total de la volonté individuelle, sous la hiérarchisation perfectionnée de la militarisme Prusse.

     Mais toujours est-il, qu’au cœur de cette vague d’enthousiasme ethno-nationaliste, nous trouvions encore la proposition ancestrale d’une humanité plus jeune — choquante et intransigeante dans sa simplicité : que la mort soit préférable à tout compromis vivant. Et puisque toute vie mène, inéluctablement, vers de tels compromis : il serait mieux (dirait-t-on) de courtiser activement la mort, maintenant, dans l’enthousiasme enivrante de la jeunesse ; avant que la survie prolongée ne dégénère dans une vie méprisable ; une vie dont tout homme embu de la fierté naturelle des siens, voudrait prestement s’en libérer — de sa propre main, ou avec l’assistance des tiers.

     Car les portes vénérables, de Walhalla, ne s’ouvrent, guère, qu’aux vaillants immortels.

— Une continuité avec nos idées contemporaines : le culte de la jeunesse ; le suicide préemptif ; l’euthanasie

     Nous ne possédons pas de nos jours, peut-être, la même motivation martiale pour propager ces idées parmi nos jeunes. Cependant, nous avons, tout de même – et tel que notre analyse économique l’aurait voulu démontrer –d’autres forts mobiles d’utilité collective qui nous pousserait à promouvoir le même mépris de la vie amoindrie ; un mépris toujours puissamment appuyé par la vision héroïque héritée de la période dont nous traitions ici ; un idéal romantique de la vie naturelle et robuste — assimilé souvent sans réflexion critique —  d’une jeunesse qui se dépasserait en se sacrifiant, sans retenue, à sa propre intensité.

     Alors, aussi pénible que nous pouvions possiblement considérer la similitude évidente, nous trouvons dans ces paragraphes, échos de la violence anarchique de la préhistoire, — ainsi que de la violence systématique de la période nationaliste moderne — à peu près les mêmes notions de mépris de la vie imparfaite, que nous voyons avancées, actuellement, par les promoteurs du suicide et de l’euthanasie — accompagnées, d’ailleurs, par les mêmes prescriptions de remède.

     Car on trouve, notamment, dans ces paragraphes vieux de cent-cinquante ans : le suicide ; le suicide assisté ; le suicide en fête d’adieu ; l’infanticide sélectif ; le culte de la force et de la beauté ; la honte de la dégénérescence dans la maladie ; et la honte d’une existence inutile à la collectivité.

.

Voici, écrit sur un mur allemand (circa 1939), l’appel universel qui fut lancé à tout sympathisant de l’idéal pangermanique, des Pays Bas à la Prague, et de Copenhague à Vienne :

Un peuple ; un état ; un chef

Voilà, l’aboutissement pratique des deux courants dominants, de l’idéologie du dix-neuvième siècle, tels qu’exposés brièvement dans ces pages :

1) La conscience collective de Georg Hegel : « L’état-nation modern (sic) est un individu spirituel … ce serait seulement comme membre de l’État que l’individu puisse posséder … une vie éthique … (et) au sein de l’État, le droit et le devoir sont unis dans un seul » (Principes de la philosophie du droit, G. Hegel, 1820)

2 ) La vision héroïque de l’histoire, dont le plus influent des partisans anglo-saxons fut Thomas Carlyle (1795 – 1881), ardent enthousiaste de Cromwell et de Napoléon : « Trouvez-moi le véritable Könning, le Roi, l’Homme Capable, et il aurait le droit divin de me commander… » (« Sur les Héros, le culte des Héros, et l’Héroïque au cours de l’histoire » T. Carlyle, 1840)

Et puis, comme une toute petite note, aux grands contours de cette histoire, nous trouvions également les racines du mouvement modern en faveur du suicide assisté et de l’euthanasie.

.

Poursuivre la lecture du texte en séquence linéaire… (Tome Deuxième : Sous l’ombre de l’euthanasie — Partie C : L’euthanasie et l’idéologie — Section II : Une description des sources idéologiques de l’euthanasie en Occident — Chapitre : La science et l’idéologie : matérialisme, évolutionnisme, collectivisme)

Laisser un commentaire