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- Comment expliquer cet acharnement débridé dans la victoire des promoteurs de l’euthanasie, à l’intérieur, comme à l’extérieur, de la profession médicale ? - Euthanasie : De la discussion jaillit la lumière

— Comment expliquer cet acharnement débridé dans la victoire des promoteurs de l’euthanasie, à l’intérieur, comme à l’extérieur, de la profession médicale ?

(Tome Premier : L’euthanasie et le choix — Partie C : l’euthanasie et la médecine —  Section VI : L’avis des médecins — Chapitre : De la manière dont les médecins canadiens furent servis par l’état — Comment expliquer cet acharnement débridé dans la victoire des promoteurs de l’euthanasie, à l’intérieur, comme à l’extérieur, de la profession médicale ?)

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En vertu d’une motion adoptée le 4 décembre 2009 par l’Assemblée nationale du Québec, une commission a été créée en vue d’étudier la question du droit de mourir dans la dignité. Le rapport de la Commission a été déposé le 22 mars 2012.

Sous la présidence de la Docteur Justine Farley (portrait ci-haut) l’Association québécoise de soins palliatifs s’est prononcée devant cette commission dans les termes suivants « Les soins palliatifs ne reconnaissent pas l’euthanasie et le suicide assisté comme un soin, un soin approprié ou un droit »

Et aux dires personnels de la Docteur Farley : « des soins palliatifs de qualité ne peuvent considérer l’euthanasie ou le suicide assisté comme un élément de l’approche palliative »

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     Considérant l’état très divisé de l’opinion médicale au sujet de l’euthanasie ; considérant que 70% des médecins annonçaient, au départ, leur refus de participer personnellement à cette pratique ; considérant, encore, que 30% exprimaient toujours leur conviction qu’aucun médecin ne dût posséder cette option létale : nous étions en droit, je soumets, de nous attendre à ce que le nouveau régime d’euthanasie volontaire eût été introduit avec la plus grande sensibilité, et surtout, en prenant grand soin de déranger, le moins possible, les conditions de pratique des médecins qui demeuraient opposés, ou ambivalents.

     Étrangement, par contre, il n’en fut rien.

     Il est vrai que soit apparu, depuis quinze ou vingt ans, la perception d’une certaine inévitabilité autour de la légalisation éventuelle du suicide assisté. Mais cette attente aurait pu être pleinement satisfaite avec une simple décriminalisation de cette aide. Comment comprendre, alors, que l’assistance au suicide ait été transformée en euthanasie ; que la simple possibilité légale pour un patient de chercher une telle aide ait été transformée en droit universelle de tout citoyen ; et pour les médecins : que la possibilité d’offrir de l’aide au suicide ait été transformée dans une obligation collective de collaborer, toujours et partout, avec un régime omniprésent d’euthanasie institutionalisée ?

     Impossible, je crois, d’éviter le constat d’un acharnement maladif de la part des vainqueurs dans cette lutte idéologique, qui se manifesta, et à l’intérieur de la profession médicale, et dans les rapports extérieurs de celle-ci, avec son partenaire d’état : car la pression exercée sur cette profession avait bien des composants, à la fois interne et externe.

     Dans le deuxième de ces cas, les circonstances décrites doivent être placées dans le continuum historique particulier qui caractérise l’évolution de la médecine sociale, au Canada. Car tel que nous l’avions déjà intimé, l’implémentation de ce régime dépendait surtout d’une promesse préalable : que la liberté décisionnelle, dont jouissaient auparavant les médecins, ne serait jamais enfreinte, ou plus simplement, que la pratique médicale ne serait pas modifiée par l’État payeur.

     Cependant, il serait immédiatement apparent, je soumets, qu’une telle division d’autorité ne pouvait jamais se présenter comme d’autre chose qu’une juxtaposition de priorités — médicales et économiques — en situation d’instabilité permanente. Et il ne devait surprendre personne, donc, que les cinq premières décennies, canadiennes, entre la socialisation de la médecine (1968) et l’introduction de l’euthanasie (2016), se soient passées dans une série de conflits quasi inévitables (et presque continuels).

   À l’interne de la profession, aussi, il y avait âpre conflit, car les quelques médecins favorables aux interventions homicides (et même très vocaux à la revendication de cette pratique), se sentaient très naturellement les cibles d’un procès d’intentions éthique, dont ils refusèrent, d’emblée, les prémisses. Et selon le principe du petit chien qui jappe plus fort, l’infériorité numérique de la faction euthanasiste, rendait leurs comportements toujours plus provocants et agressifs. Bref, à l’interne, comme à l’externe, il y avait des anciens comptes à régler, et un danger corollaire : que le parti vainqueur ne se montre moins que gracieux.

     Mais quelle que soit l’explication, les faits sont là, significatifs et indisputables.

— Un dépassement regrettable des intentions annoncées

Comme des mariées de circonstance, décidées à accueillir aimablement les violences inévitables qui les seraient imposées de toute façon, les corporations médicales canadiennes avaient choisi de réagir à cette démonstration de main forte avec la résolution docile — annoncée bien avant l’imposition du fait accompli — d’accepter avec indulgence (et sans trop d’analyse) les assurances proférées préalablement avec tant de profusion par l’autorité législative : qu’il n’y aurait pas d’effet global sur la pratique médicale ; qu’il n’y aurait pas de « pente glissante » ; et surtout, que la « liberté de conscience », de chaque médecin, serait respectée.

      Mais cette attitude formellement collaboratrice ne suffisaient pas pour autant. Car dans leur moment de victoire, les acteurs gouvernementaux, ainsi que les architectes médicaux du nouveau régime, se sont montrés insatisfaits à l’idée de cacher leur enthousiasme triomphaliste sous une telle feuille de vigne protectrice des sensibilités des vaincus. Non ! Non seulement vaincraient le pouvoir politique (et les frondeurs médicaux), mais ils insisteraient, aussi, pour vaincre visiblement ; pour mettre, publiquement, à la main et au pas, leurs adversaires historiques.

     Et pour rendre cette leçon absolument claire vis-à-vis des plus récalcitrants, le pouvoir politique s’est immédiatement attaqué au cœur de la résistance résiduelle, soit : aux Soins Palliatifs.

— Le défi au pouvoir qui fut posé par les praticiens, et par les institutions, des Soins Palliatifs

     Les spécialistes des Soins Palliatifs, sont, pour rappeler ce fait essentiel, les adversaires naturels du projet euthanasique ; et leur opposition — fondée dans une théorie, et dans une pratique des plus réussies, élaborées sur une période de cinquante ans et plus — représentait un des plus forts obstacles à l’implémentation de ce nouveau programme. Pour être plus précis : ces médecins manifestèrent, sur le coup, un rejet quasi-unanime du principe même de l’euthanasie ; ils annonçaient leur intention de s’abstenir de cette pratique ; et ils procédaient résolument avec la promesse que l’ensemble des institutions, résidences, et départements d’hôpital sous leur responsabilité, se soustrairaient d’emblée de tout implémentation entrepris ailleurs.

     La rebuffade ainsi offerte aux auteurs du programme officiel d’euthanasie fut d’autant plus sérieuse que l’existence d’unités de Soins Palliatifs non-participantes fournirait la base structurelle nécessaire à la survie, et au développement, d’un deuxième modèle de soins. Évidemment, une telle coexistence porterait, en elle, la possibilité d’une véritable comparaison clinique, et même (à terme) d’une répudiation formelle, et scientifique, de la légitimité médicale de l’euthanasie. Et même dans l’absence d’une telle clarté de dénuement (c’est à dire, même en admettant la continuation d’un différend professionnel sans résolution prochaine), la poursuite, organique et autonome de la théorie, et de la pratique, des Soins Palliatives, promettrait une compétition permanente qui aurait tendance, toujours, à enfreindre la perception, la demande — et donc la normalisation — de la pratique institutionnelle de l’euthanasie.

     Dans un mot : la menace proférée par les spécialistes des Soins Palliatifs — à tout le projet d’euthanasie — en été une de la première importance ; et le pouvoir politique, instinctivement jaloux devant toute contestation directe, répondit avec force et avec énergie.

— Le triste sort réservé pour ces spécialistes, et pour cette spécialité

     La réponse, d’ailleurs, ne tardait aucunement à venir. Car en vertu de la loi 52 (Québec, 2014), « l’aide médicale à mourir » avait été proclamée en « soin de fin de vie » universellement garanti par l’État, dont toute la population avait le droit, désormais, de s’en prévaloir. En conséquence, ce « soin » devait être disponible dans tous les recoins du vaste système du monopole publique ; et plus particulièrement : les unités, institutions et résidences qui offraient les Soins Palliatifs, furent informées qu’ils devaient immédiatement offrir ce service. C’est à dire : les fournisseurs des Soins Palliatifs — tous sans exception — furent commandés d’intégrer cette nouvelle option d’euthanasie, qui était (et qui reste toujours) antithétique dans sa nature essentielle, et à la philosophie, et à la théorie clinique, dont ces professionnels avaient tiré, jusqu’alors, leur inspiration identitaire.

   En même temps, Les médecins promoteurs de l’euthanasie, fort aise de leur victoire apparemment concluante, se sont lancés dans un jeu institutionnel extrêmement agressif — de place et de pouvoir — dans le but d’assimiler carrément les Soins Palliatifs traditionnels ; en se présentent, eux-mêmes, comme les disciples fidèles (ainsi que les chefs naturels) d’un nouveau régime « unifié », de soins de fin de vie, tel qu’imaginé par le législateur.

     Non seulement l’État aurait choisi, alors, d’affirmer son droit ultime d’employeur monopoliste, mais, dans le dossier des Soins Palliatifs, il choisit de ce faire avec une méthode qui semblait positivement étudiée pour humilier ses adversaires : en les forçant d’accepter ses dictats sans réserve ; en modifiant effectivement le sens théorique qu’ils eurent donné à leur propre spécialité ; et (chose non-négligeable dans une perspective future), en faisant de leur cas un exemple objet des suites prévisibles de toute contestation.

     À la vue des observateurs lucides, donc, le gant de velours proverbial de la politique appliquée avait glissé suffisamment, dans ce moment, pour exposer avec clarté la main de fer, nue, avec laquelle l’état offrit délibérément cet affront indéniable et tant significatif : des lors, la définition de la meilleure pratique médicale ne serait plus l’affaire des médecins, ni individuellement, ni collectivement ; elle ne procéderait plus sur un base de compétition philosophique, scientifique, ou commerciale ;  elle dépendrait, désormais, d’un simple exercice politique ; elle serait une prérogative de l’État.

— Un réveil rude ; un constat désagréable

     Et c’est ainsi que la confiance témoignée par les plus optimistes, s’est brusquement montrée fausse dans les faits : la décriminalisation de l’euthanasie ne s’est pas accompagnée par une réaffirmation globale de la liberté professionnelle. La nouvelle possibilité de « soigner » les patients avec une mort volontaire n’était pas équilibrée par la confirmation d’un pouvoir équivalent, pour la majorité, de poursuivre sans entrave leur pratique traditionnelle. Au contraire, la crédibilité de ces sophismes et de ces platitudes s’est subitement évaporée devant le mandat forcé de l’euthanasie au cœur même de l’opposition résiduelle qui furent les Soins Palliatifs.

Oui. Le « droit de conscience » de chaque médecin serait respecté (au moins dans le sens archaïque le plus restrictif de celui-ci), mais l’État — fort de son autorité budgétaire, administrative et structurelle — décréta qu’il n’y aurait plus de département — d’unité, ou d’institution — dont l’euthanasie serait exclue. Désormais, aucun médecin (ou groupe de médecins) hippocratique, travaillant dans le régime étatique unique, pouvait poursuivre la réalisation de son idéal professionnel de façon conséquente : finies, la formation et la gérance d’équipes de travail (et encore plus d’institutions) voués à la proposition que l’euthanasie soit contraire au bien du patient, et cela, en dépit de la crédence largement répandue dont jouit cette idée, toujours, au sein de la profession médicale.

     Même dans le microcosme de l’unité clinique individuel, la médecine intégralement hippocratique fut devenue impossible, c’est-à-dire, littéralement illégale, au sens des interprétations règlementaires et administratives.  Il n’y aurait, donc, plus de compétition pluraliste ; il n’y aurait plus de recherche libre dans la méthode clinique ; et le statut particulier d’indépendance professionnelle possédée autrefois par les praticiens de l’Art Médical serait effectivement remplacée, au Canada (au moins face à cette question fondamentale de l’euthanasie), par une relation simple de mandataire/technicien vis-à-vis de l’employeur unique, monopole d’État.

Tel est le triste constat de fait.

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Poursuivre la lecture du texte en séquence linéaire… (Tome Premier : L’euthanasie et le choix — Partie C : l’euthanasie et la médecine — Section VI : L’avis des médecins — Chapitre : La crise effective des médecins : Voulez-vous entrez dans mon Salon, Madame (dit l’Araignée à la Mouche) ?)

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