Deprecated: Le crochet jetpack_pre_connection_prompt_helpers est obsolète depuis la version jetpack-13.2.0, sans aucune alternative disponible. in /hermes/bosnacweb01/bosnacweb01an/b2067/nf.euthanasiediscussion/public_html/euthanasiediscussion/wp-includes/functions.php on line 6078
- Les bienfaits du modèle législatif de droit universel à justification subjective, pour les handicapés, pour les mourants, et pour les malades chroniques - Euthanasie : De la discussion jaillit la lumière

— Les bienfaits du modèle législatif de droit universel à justification subjective, pour les handicapés, pour les mourants, et pour les malades chroniques

(Tome Premier : L’euthanasie et le choix — Partie B : l’euthanasie et la clientèle — Section II : la morale et la loi — Sous-Section II c): Quelle morale choisir ? — Chapitre : Une comparaison des avantages d’un droit de mourir universel, versus ceux du régime actuel d’exceptions médicales à l’interdit — Les bienfaits du modèle législatif de droit universel à justification subjective, pour les handicapés, pour les mourants, et pour les malades chroniques)

.

     Au cours des chapitres précédents, nous avons regardé, en quelque détail, les torts auxquels sont exposés les handicapés, les mourants et les malades chroniques, sous le régime d’exceptions à l’interdit (justifiées par des critères médicaux objectifs), tel que nous le connaissions aujourd’hui. Or, la description des bienfaits potentiels, d’un régime universel, de choix purement subjectif, ne serait autre chose que la répétition de cette liste de torts, regardée à l’envers. Car pour chaque difficulté imposée par la méthode objective, la liberté subjective nous fournit une solution correspondante.

     Ainsi, au lieu d’identifier les gens, bon gré, mal gré, comme des candidats médicalement aptes à se suicider (tellement aptes, en fait, que nous nous devions de créer des exceptions médicales, ad hoc, a l’interdiction absolue de tuer nos semblables), nous pouvions simplement reconnaître à toute personne capable (sujet à des conditions de capacité cliniques avancées par les professionnels de la santé mentale), le droit ultime de disposer de sa propre personne, sans y attacher le moindre jugement collectif sur la moralité du geste.

     J’ose espérer que les exigences des promoteurs actuels du droit de mourir seraient, ainsi, pleinement satisfaits. Car dans un tel cadre légal et philosophique, la personne suicidaire, malade ou handicapée, pouvait définir pour elle-même le sens et la valeur de sa propre vie ; et au choix, pouvait décider librement d’y mettre terme. Mais il y a plus, et plus important : car avec ce modèle de droit subjectif, l’accès de telle personne à l’option suicidaire ne serait accordé, ni grâce à sa maladie, ni grâce à son handicap, ni à sa déficience, ni à sa dépendance, voir : ni grâce à son absence de dignité dans sa condition de créature vivante.

     Elle en bénéficierait, au contraire, en fonction d’un droit universel, dont l’universalité partagée (par tous) constituerait le gage non-équivoque d’une recognition — social et légale — de la valeur inconditionnelle de sa vie, et de sa dignité d’être humain à part égale ; égale, pour y insister, à toute autre.

     Elle ne subirait pas, pour être précis, l’exigence discriminatoire de justifier son choix en fonction de critères médicaux propre à son cas ; de prouver, en quelque sorte — à la satisfaction de tiers personnes nommées capricieusement par l’état — que sa vie ne vaille pas (objectivement) la condition vivante.

— L’importance transcendante du principe de l’égalité

     Il n’y a rien de trivial dans ces faits ; et même que, d’une perspective sociale plus large, l’affirmation de cette égalité serait — et de loin — plus importante que la seule nature des conditions désignées pour autoriser la mort volontaire.

     Et encore, nous n’avons pas tout dit à ce sujet ! Car il n’y aurait pas, non plus, de discrimination (voir de persécution), à l’égard des personnes, mourantes, handicapées ou malades, qui font partie de la grande majorité non-suicidaire (ce groupe beaucoup plus large, dont les droits les plus élémentaires sont actuellement sacrifiés dans le désir de faciliter les souhaits autodestructeurs de quelques-uns).

     Ces gens enfin, de nombre tant important, qui s’attachent à la vie (ou simplement à la survie, plutôt qu’à la mort) seraient épargnés des fâcheux effets d’une association, fortuite et involontaire, avec les indications médicales exigées pour l’euthanasie volontaire ; épargnés, ainsi, des attitudes interrogatoires et impertinentes, trop souvent affichées par les membres de la majorité bien-portante, environnante, qui se permettent à demander (fait toujours étonnant) — parfois tacitement, et parfois ouvertement — pourquoi de tels mourants, handicapés et malades s’obstinent à vivre, plutôt que de se faire euthanasier, quand ils rencontrent, manifestement, tous les critères exigés pour ce faire.

     Imaginez le soulagement de celui, ou de celle, qui, dans son moment de vulnérabilité et de dépendance suprême, serait épargné l’exercice du devoir du médecin traitant, obligé aujourd’hui par la force des normes corporatifs – bien que très possiblement récalcitrant devant celles-ci — d’informer son patient de son « droit » de recours à l’euthanasie ! Et imaginez même, au pire, la protection ainsi accordée contre l’influence exercée par certains docteurs, parmi cette minorité qui s’enthousiasment réellement pour l’option mortelle, et qui s’en profitent actuellement, du « devoir d’informer », pour en faire ouvertement la promotion.

     Imaginez, enfin, un argument de moins aux mains des proches, excédés, et impatients d’arriver à la fin prévue.

     Imaginez, plutôt, un contexte thérapeutique où la volonté majoritaire, de survivre, serait accordée la préséance d’une présomption par défaut (sans égard, ni à la capacité, ni même à l’état conscient), tandis que l’option suicidaire (en concordance avec son statut clairement minoritaire) ne serait jamais évoquée sans une demande directement présentée par l’individu en cause.

     Imaginez, encore, que la personne handicapée, ou malade chronique, puisse bénéficier (à priori) des mêmes ressources de prévention de suicide qui seraient proposées à toute autre personne, plutôt que d’un encouragement institutionnalisé vers l’anéantissement accéléré. Imaginez …

     Comme seule exigence, en fait, ce modèle ne demanderait, uniquement, que les électeurs « bien portants » se déclarent consentants pour assumer (personnellement) les mêmes périls du choix — associés, ceux-ci, à toute facilitation des désirs suicidaires — auxquels ils se montrent tant aises, aujourd’hui, d’exposer leurs voisins malades et handicapés.

– Une prévention possiblement accrue, grâce au dépistage de pathologies traitables

     Paradoxalement, il serait même possible que l’incidence de suicide soit réduite, dans les faits — et ce malgré la légalité de la mort assisté — grâce aux différences dans la manière dont nos deux modèles législatifs répondraient à la tendance naturelle, de tout individu, à chercher une validation extérieure pour ses gestes. Car si, par exemple, une personne suicidaire décidait de chercher de l’assistance au suicide (sachant qu’elle en possède la possibilité, et plutôt que de se suicider seule), il serait tout à fait possible que les professionnels chargés de l’évaluation de ses capacités puissent réussir, au contraire, à  déceler un problème psychiatrique spécifique, assorti d’un traitement efficace ; que ce traitement puisse aboutir à une résolution heureuse de la crise ; et alors, que même la tentative d’utiliser un service légal d’assistance au suicide, puisse résulter dans un protocole réussi de prévention.

     Tel fut, en fait, un élément important dans la justification de la décriminalisation du suicide simple en 1972 (Canada). Car il semblait dès lors (d’après certaines), plus facile de travailler à la prévention bénigne d’un phénomène légal et visible, plutôt que d’une pratique qui eût été dissimulée sous la hantise de la criminalité. Et, dépendant, toujours, des modalités d’implémentation éventuellement retenues, cette logique pourrait trouver son écho, également, dans nos politiques actuelles.

    Malheureusement, cependant, il devient encore plus difficile de travailler à la prévention d’un phénomène qui soit officiellement proclamé en bien (grâce à la justification objective). Et telle serait, sans détours, notre situation présente.

— Un effet dissuasif de la responsabilité, face au choix libre

      Finalement — et toujours en relation avec ce désir de validation extérieure – nous observons que les gens peuvent hésiter, longtemps, devant des décisions tant significatives, en se demandant si leurs gestes sont vraiment « bien », ou non. Or, dans ce cas, quand telle personne interrogerait les professionnels indiqués (pour savoir si oui ou non — pour elle – la mort volontaire serait un bienfait) la réponse se présenterait de manière très différente, et très strictement selon lequel des deux modèles législatifs serait employé :

     Car sous un régime de critères médicaux objectifs, la réponse serait pragmatiquement affirmative — toute de suite — dans la mesure où les critères étaient respectés, sans plus.

     Mais sous un régime de droit universel subjectivement justifié, la réponse demeurerait toujours équivoque ; car l’esprit même, d’un tel régime, s’appuie sur l’affirmation qu’aucune autorité ne puisse se substituer pour l’opération de la conscience personnelle. Et il en résulte, comme conséquence, que la pleine responsabilité (d’assumer, seule, ce poids décisionnel), reste entièrement à la charge de la personne demandeuse ; et que telle personne ne pourrait jamais s’en délester à l’obligation des tiers. J’ose même croire, d’ailleurs, que face à ce refus collectif, de valider les suicides particuliers, plusieurs personnes pouvaient se retirer devant le choix fatal ; ou à tout le moins… aucune ne s’y précipiterait.

— En somme : des bienfaits (relatifs) de la justification subjective ; pour le médecin, pour le patient, et pour la société  

     Nous nous apercevons, donc, de plusieurs différences dramatiques dans la vie des médecins et de leurs patients, quand l’accès légal à la mort « assistée » soit envisagé à l’intérieur du régime actuel (d’exceptions médicales à l’interdit d’homicide), ou de cet autre paradigme (qui n’existe encore qu’à l’état d’hypothèse théorique) qui soit celui du libre exercice du choix subjectif. Aussi, nous constatons — et peut-être avec un petit brin de surpris trouble — que cette comparaison se fait largement à l’avantage de la liberté.

     Mais pour rappeler ce fait essentiel : le vice principal associé aux critères médicaux (objectifs) de l’euthanasie volontaire, se fait sentir, de prime abord, au niveau de la philosophie sociale. Car pour la première fois, depuis la chute des régimes Fascistes au milieu du vingtième siècle, les vies humaines sont, de nouveau, formellement classées, par catégorie de valeur inégale. Il est officiellement déclaré, ainsi, que certaines vies méritent moins la protection collective que n’en méritent d’autres.

     Fâcheusement, alors, de portée tant sérieuse (et de motif tant discutable), cette doctrine sera enseignée aux générations à venir, en contradiction directe avec le mythe fondateur de notre société ; c’est-à-dire : en contradiction avec la présupposition de la valeur égale de chaque vie humaine (sans égard à l’âge, la race, le sexe, l’orientation, ou plus spécifiquement dans le discours présent …) sans égard à l’état de santé, ou des habilités physiques.

     Je dis bien « le mythe fondateur de notre société », car nous savons tous, intuitivement, que les personnes — leurs capacités, leurs potentiels et leurs vies  — ne sont absolument pas égales. Mais nous avons aussi appris (de par la dure école de notre évolution sociale) que le respect de ce mythe — dans l’exigence idéale d’une égalité de respect et de considération légale à l’égard de chacun — soit à la base de ce que nous appelons communément la vie « civilisée » en société.

     Or, la promulgation de critères objectifs (pour cautionner les euthanasies spécifiques) frappe à la base dudit mythe ; elle y introduit une conditionnalité empoisonnée ; et ne peut qu’affaiblir son autorité morale. La liberté de choix subjectif, par contre, ne ferait peut-être rien pour enfreindre l’incidence du suicide — assisté ou autre — mais elle réaffirmerait ce principe, ce credo, tant essentiel au maintien du visage humain de la société moderne de droit (libre et démocratique) telle que nous la connaissions.

      Bien sûr, il ne s’agit pas, dans cette vision libertaire, d’enrayer la mort volontaire de notre société. Au contraire, il semblerait pragmatiquement inévitable — et ce pour le futur prévisible — que le choix suicidaire soit publiquement cautionné d’une manière ou d’une autre. Le mal ne serait pas, alors, extirpé pour autant.

     Toutefois, la revendication du principe de choix libre se recommande à nous nonobstant ces limites : par sa capacité de permettre un juste rétablissement des faits ; de réaffirmer l’égalité des personnes ; de réaffirmer l’indépendance de l’éthique médicale et la liberté de conscience des médecins ; de soustraire l’État (et tous ses membres/citoyens) de l’obligation de soutenir le bien-fondé des désirs suicidaires ; de souligner la marginalité du choix autodestructeur ; et enfin, de faciliter la promotion (et la jouissance) du choix vital majoritaire.

    Le lecteur, pourtant, sera toujours en devoir de poser cette dernière question, tant importante, et dont nous ne pouvions nullement nous esquiver : « La liberté, oui… mais à quel prix ? »

.

Poursuivre la lecture du texte en séquence linéaire… (Tome Premier : L’euthanasie et le choix — Partie B : l’euthanasie et la clientèle — Section II : La morale et la loi — Sous-Section II c) : Quelle morale choisir ? — Chapitre — À quel prix la liberté ?)

Retourner au début de la section en cours (Tome Premier : L’euthanasie et le choix — Partie B : l’euthanasie et la clientèle — Section II : la morale et la loi)

Laisser un commentaire