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La Philosophie et la Religion : le contenu et le contenant - Euthanasie : De la discussion jaillit la lumière

La Philosophie et la Religion : le contenu et le contenant

(Tome Deuxième : Sous l’ombre de l’euthanasie — Partie C : L’euthanasie et l’idéologie — Section III : Le patrimoine philosophique ancestral : le caractère sacré de la vie ; la valeur intrinsèque de l’individu humain ; les origines divines de « l’égalité » politique — Chapitre : la Philosophie et la Religion : le contenu et le contenant)

— Une distinction nette, entre « forme » et « fond »

Avant d’aborder les faits qui entourent notre compréhension traditionnelle de la « valeur intrinsèque » (ou « caractère sacré ») de la vie, il faudrait faire une distinction importante entre le contenu et le contenant, c’est à dire : entre les idées en soi, qui doivent éventuellement se défendre toutes seules sur leurs propres mérites — dans l’esprit et dans l’imaginaire– et le contexte traditionnel dans lequel ces idées se sont originalement articulées. Car notre but serait d’éviter les erreurs jumelles qui consistent, d’une part : à créditer une mauvaise idée simplement parce que nous sommes favorablement disposés envers ses auteurs ; ou au contraire : de rejeter une bonne, grâce aux sentiments d’aversion que nous éprouvions à l’égard de ces derniers.

Dans le cas présent, cela impliquerait une considération loyale de cette notion controversée (qu’il puisse exister une « valeur intrinsèque » à la vie, de tout être humain sans distinction) ; et de faire cette opération de manière que nos conclusions ne soient teintes par nos préjugés personnels, ni à l’endroit de sa source, ni de son origine, c’est à dire, de la véhicule qui l’ait introduit dans notre histoire : cette tradition millénaire qui se trouve, encore, à la base de presque toutes nos lois, et de toute notre culture populaire. Je veux parler, bien sûr, de la tradition religieuse, et plus particulièrement, de la doctrine Chrétienne.

Pourtant, scinder ne peut signifier ignorer. Car, même si notre but ultime serait de séparer l’idée des attaches de ses origines (ou de séparer le contenu du contenant, tel que nous avions présenté notre tâche en partant), pour comprendre l’un il serait indispensable, néanmoins, de nous engager dans l’étude de l’autre. Car ultimement, le seul moyen pour comprendre le sens de cette idée, tant influente dans notre évolution intellectuelle, demeure dans une description de sa signification au départ, précisément dans le contexte religieux.

— Une recognition de la difficulté, post-moderne, d’aborder le phénomène religieux, et une explication politique de cette difficulté

Cela étant dit, je suis très conscient que ce soit un sujet intensément déplaisant pour certains. Et je dois m’en excuser à l’avance pour tout inconfort ressenti. Car c’est un indice incontournable de l’acrimonie des débats dans ce dernier siècle houleux, que même maintenant, et même dans la solitude paisible de mon écritoire, j’entends (figurativement, peut-être, mais pas moins clairement) des véritables grincements de dents — et même des cris plus menaçants — à la seule mention de ce nom méprisé, de « chrétien ».

Pourtant, je me permets toujours l’impertinence de demander l’indulgence du lecteur, car la compréhension du Christianisme (et de son évolution dans la sphère politique à travers les longues controverses précipitées par la Reformation Protestante) — tout autant que celle du Socialisme, et du Fascisme, d’ailleurs — serait indispensable pour comprendre notre sujet présent.

Ainsi faudrait-il réaliser, j’en ai bien peur, qu’une bonne partie de l’hostilité témoignée, par le parti anti-traditionnaliste à l’égard de leurs anciens compétiteurs, tient du fait qu’une fraction appréciable de la population continue, encore, dans les formes religieuses, exactes, du passé ; tandis qu’une autre partie, bien plus grande celle-ci — et très probablement majoritaire — en épouse toujours l’essentiel des principes moraux qui y soient enracinés. Et puisque la colère et le refus d’entendre ne sont jamais des indices de force dans le débat intellectuel, ces faits soulignent, surtout je soumets, la résilience (et l’importance politique) des idées en question (et des personnes qui les soutiennent).

— La nécessité de pénétrer la pensée religieuse pour accéder à la sagesse collective de l’homme

Oui, la démarche religieuse présente des failles importantes. Oui, la démarche empirique nous a fourni des possibilités d’analyse jusqu’alors impossible. Mais par contre : la démarche religieuse (selon la définition que nous en retenions ici) eut servi comme véhicule principale, pour la spéculation humaine, depuis au moins de nombreux millénaires, sinon depuis le début de notre existence en espèce distincte. Et quels que soient nos préjugés à cet égard, à peu près toutes les intuitions morales de l’homme se trouvent articulées (et enregistrées) dans une forme directement attachée au corps central de la tradition religieuse, ou — ce qui en vient essentiellement au même — dans des formes culturelles, de source populaire, qui s’y soient étroitement liées au point d’en faire effectivement partie. Aussi, la science ne peut jamais « remplacer » les réflexions religieuses, puisque cette science ne peut point opérer dans le domaine métaphysique (là où se cachent la plus grande partie des préoccupations significatives de l’être humain).

Alors dans cette optique, il ne s’agirait pas de savoir si la méthode religieuse soit parfaite ; ni de savoir s’y elle serait la meilleure méthode pour explorer notre humanité au futur ; ni même, de savoir si des erreurs passées eussent pu être évitées en épousant un autre paradigme (une proposition, d’ailleurs, qui soit hautement disputable). Ce que nous devions décider, aujourd’hui, est à la fois moins compliqué et plus fondamental, à savoir : Est-ce que nous nous permettrons de perdre les fruits des méditations, spéculations et expériences de notre passé collectif — sans ni discrimination, ni nuance — du simple fait que ce contenu conceptuel soit associé au contenant (ostensiblement répudié) de la religion ?

Ne serait-ce pas préférable, au contraire — et tout en saluant les limitations de nos ancêtres – de cultiver l’humilité requise pour en remercier leur mémoire du don, gratuit et immense, qui nous fut ainsi légué ? Ne serait-ce pas préférable, aussi, de trouver le sérieux requis pour en faire délibérément le tri, de ces idées héritées du passé, sans nous abandonner dans la paresse, dans le caprice — ou dans un zèle ponctuel nouveau — à la tentation facile de rejeter toutes, sans examen ?

La question est sérieuse : car dans le vide de connaissance du passé, auquel certains préjugés courants semblent attirer nos générations présentes, il y a des principes fondamentaux de notre société (tels la « valeur inhérente » traitée dans ces pages) qui se trouvent grièvement — et gratuitement, je soumets — hypothéqués au passage.

Alors sans abandonner notre droit (et notre devoir évident) de choisir pour nous-mêmes les balises philosophiques de notre génération, nous devions aussi admettre que d’autres générations aient déjà lutté, longtemps, avec les mêmes questions morales, coriaces, qui nous préoccupent toujours ; admettre, parmi tous les arguments inventés — pour appuyer telle ou telle conclusion voulue – que les leçons pratiques, de l’expérience passée, mériteraient d’exercer une influence toute particulière dans nos calculs ; admettre, aussi, que seulement une étude sérieuse (et respectueuse) puisse nous équiper pour en extraire de telles leçons ; et finalement, si notre but soit réellement de comprendre nos ancêtres (plutôt que de nous complaire dans un sens facile de notre supériorité) : admettre que nous devions apprivoiser les véhicules — de langue et de culture — par lesquelles ces gens s’exprimaient.

Or, quant à la valeur que nous accordions à la vie humaine, le seul chemin vers une compréhension adéquate des conclusions retenues par nos prédécesseurs (des conclusions, soit dit en passant, qui les aient permis à survivre non seulement dans la théorie — ou dans les limites artificielles d’un modèle informatique — mais bien à survivre dans la réalité), passe nécessairement par une compréhension minimalement généreuse à l’égard de leurs croyances religieuses : dans les racines, dans l’évolution, et dans la signification des choix essentiels qui informaient, pendant deux milles ans, cette influence prépondérante dans les vies, et dans les institutions, humaines.

— l’importance fondamentale de la « valeur intrinsèque » et l’importance connexe de la question « euthanasie »

Aussi, ce jeu en vaut largement la chandelle : puisque la notion de vie « sacrée » touche non-seulement au respect particulier qui nous soit enjoint envers la sécurité physique (de nous-mêmes et de nos semblables), mais qu’il en va de même, également, pour l’inviolabilité de la conscience individuelle. Or, dans notre étude présente, ces deux questions — de sécurité physique, et de liberté de conscience — rejoignent directement les inquiétudes principalement soulevées, devant la pratique utilitaire de l’euthanasie, et par les patients, et par les médecins.

Plus largement, encore, ces principes touchent à l’ensemble des acquis de notre société égalitaire (chaudement critiquée, actuellement, pour cause d’ « injustice », mais à laquelle aucune autre de notre connaissance — ni du passé ni du présent — ne peut avantageusement se comparer sous ce jour). En conséquence, donc, puisque la pratique de l’euthanasie nous place devant l’obligation de réexaminer ces principes fondateurs, elle ne peut aucunement se concevoir en phénomène isolé. Au contraire : rétrospectivement contemplée, la réapparition récente de l’euthanasie se présente à nous comme l’un des symptômes les plus évidents de cette crise philosophique, globale, que nous vivions présentement (et ce depuis au-delà de cent ans déjà).

Sans doute, alors, les décisions prises à cet égard produiront un impact aussi fort (sur notre société future), que les questions soulevées par l’euthanasie soient profondes. Impossible, donc, de traiter significativement de l’euthanasie, sans aborder, au moins en passant, ces mêmes questions.

Et c’est ainsi que je me sens obligé, de nouveau, à demander la patience du lecteur pour déballer quelque peu ce coffre à trésor, intellectuel et spirituel, si gracieusement légué de par nos aïeux — une parenthèse obligatoire, certes, mais aussi, comme j’oserais l’espérer, pas entièrement vide d’intérêt propre.

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