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Entre le fatalisme moral d’une société préindustrielle, de subsistance précaire et de stratification extrême ; à l’opulence du choix post-moderne : un passage d’à peine deux siècles - Euthanasie : De la discussion jaillit la lumière

Entre le fatalisme moral d’une société préindustrielle, de subsistance précaire et de stratification extrême ; à l’opulence du choix post-moderne : un passage d’à peine deux siècles

(Tome Premier : L’euthanasie et le choix — Partie C : l’euthanasie et la médecine — Section III : Une société en rupture — Chapitre : Entre le fatalisme moral d’une société préindustrielle, de subsistance précaire et de stratification extrême ; à l’opulence du choix post-moderne : un passage d’à peine deux siècles)

Henry Fielding, 1707 – 1754

— Témoignages contemporains d’une période rapidement rendue « idyllique » (surtout) dans le souvenir complaisant des successeurs nostalgiques

Tout dernièrement encore (au moins en termes historiques), c’est à dire, au début du dix-huitième siècle : la vie était encore presqu’entièrement préindustrielle. Le vice était propre aux aristocrates-propriétaires. La jeunesse du peuple servait, en passant, de jouets dans son assouvissement. La brutalité, l’ignorance, et la soumission du peuple, lui-même, furent présumé d’abord, et figuraient dans la littérature de l’époque en autant d’occasions d’humeur grossier, tel qu’exhibé à l’intérieur des écrits sublimes de Henry Fielding (1707 – 1754), comme « Joseph Andrews » (1742) et surtout, « Tom Jones » (1749).

Au climax de ce dernier livre, l’enfant de charité, enfin grandi, repoussé (temporairement) avec défaveur et parti en révolte ; Tom (l’héro malaimé de ce récit) apprend, avec grand malaise, qu’il s’est trouvé couché (à son insu) dans une auberge de campagne (aux cours des débauches regrettablement courants dans tels lieux) couché pour être plus exacte : avec sa propre mère biologique ; préalablement chassée (celle-ci) du service de la même famille illustre qui avait accueillie Tom ; et ce, pour l’indiscrétion imputée de lui avoir donné naissance. Mais (comme les lecteurs complices de cette hilarité scandaleuse seront heureux de découvrir), Tom fut éventuellement capable d’échapper à l’opprobre de cette honte d’inceste accidentelle, en apprenant que sa véritable mère fut nulle autre que la sœur de son bienfaiteur/gentilhomme (le Squire xxx), et que la destitution de son ancienne servante n’avait été que le résultat nécesssaire d’un stratagème de dissimulation, manigancé à l’avantage de la sœur célibataire, maintenant défunt.

Voilà, donc, le genre de prétexte social, teint de tragédie et de grosse farce, qui alimenta l’humeur de ce qui se voit célébré, souvent, comme le premier vrai « roman » de la langue anglaise !

Douze ans plus tard, aussi, parut « Le Vicar de Wakefield » (1761) d’Oliver Goldsmith (1728 – 1774) dans lequel livre un simple mais saint homme, le Vicar Charles Primrose, part à pied en quête sacrée, mu d’un amour paternel sans borne, à la recherche de sa fille Olivia, conçue par le Vicar en brebis égarée. Au cours de son pèlerinage, au fond du pays, Primrose vit une série d’aventures aussi édifiantes qu’absurdes – très révélatrices d’ailleurs des détails intimes de la vie d’époque — mais dont il retourne déconfit et sans satisfaction ; pour trouver, en fin, l’être chère, tout bonnement établi en favorite à quelque pas de chez lui, dans la maison du seul noble du village, le Squire Thornhill ; être perfide et débauché par excellence, qui entraîne les beautés des classes serviles des environs — les unes après les autres — dans des faux espoirs, et même dans des faux mariages ; pour les répudier ensuite ; et pour recommencer avec de nouvelles.

Et voilà, encore, à la manière Fielding, que les plus tragiques des supplices, des pauvres, aient été représentés en absurdités inévitables, sujets autant à la plaisanterie supérieure qu’aux regrets passagers, suscités parmi des lecteurs à peine plus sophistiqués ; sorties, pourtant, des classes plus aisées.

De part et d’autre de la division sociale, alors, il y avait une perception d’inévitabilité dans les faiblesses humaines, qui ne suscitât que très peu de sympathie : ni à l’égard du fils de famille qui eût joué (et perdu) sa fortune familiale avant même d’arriver à la mi-vingtaine ; ni à l’égard de la domestique, dépendante, jetée à la porte pour un oui ou un non (et souvent même pour châtier des transgressions proprement exigées par le pouvoir) : sans références, et donc, sans ressources.

Les écarts de comportement, pour les uns comme pour les autres, furent tour à tour : regrettés, acceptés, et tournés en dérision ; tandis que dans leurs conséquences réelles, ils n’avaiemt pas grand caractère comique, étant, aussi, vigoureusement réprimés ; le tout se résumant dans la sagesse commune, au sujet de l’éducation des garçons : « Vous ne savez peut-être pas, vous, pourquoi vous le battez. Mais lui, soyez-en assuré, il le sait bien ! » ; ou encore, selon ce jugement typiquement léger, préservée à notre escient par Henry Fielding dans « Joseph Andrews » : « (elles, sic) ne sont guère mieux qu’elles ne sont supposées de l’être »

— L’urbanisation, l’enrichissement, et la démocratisation d’un vice (voire : d’une criminalité) de choix.

Avec le dix-neuvième siècle, cependant, le centre de gravité social se transféra de la nobilité rurale à la bourgeoisie urbaine, typifiée culturellement dans ces pages par le Paris postrévolutionnaire. Le vice se démocratisa dans la même mesure, mais encore là, jusqu’au début de la « Belle Époque » (circa 1880), la vie « mondaine » se structurait presqu’uniquement autour des appétits des bourgeois plus riches, utilisant toujours la pauvreté (et l’ambition) en matières premières de divertissement. Les plaintes désabusées d’un Baudelaire, ou d’un Musset, en fournissaient, pour nous, les témoignages privilégiés, en illuminant, franchement, les coulisses de cette vie d’amusement stratifiée.

Pendant ce siècle, pourtant, le taux d’urbanisation en Europe (hors la Russie) passa de 12 à 36 pourcents, et en Amérique de 5% à 42. Les jeunes transfuges de la campagne étaient ainsi libérés des contraintes de leurs communautés étroites d’origine. Ils disposaient des salaires des nouvelles fabriques. La production de la boisson distillée fut industrialisée, et le vice s’industrialisa en proportion. Pour tout dire : les classes populaires devinrent autosuffisantes à la fin du dix-neuvième : dans la production, et dans l’achat, des plaisirs jadis réservés pour les riches. Et les salles de bal des bien nantis furent dépassées, ainsi, par les salles de danse des ouvriers.

Évidemment, il advint des problèmes de toute sorte, découlant de cette urbanisation sauvage et précipité. Et les effets choquants de cet enrichissement subit (accompagné par une déconstruction équivalente des mœurs traditionnelles), provoquèrent l’éclosion de divers programmes de « progrès », théoriques et pratiques, matériels, et moraux, qui reflétèrent tous un désir largement partagé, d’employer une partie de la nouvelle richesse au service de la compassion, et donc au secours des classes souffrantes.

Mais malheureusement, aussi, au cours des dernières décennies tant bénies qui précédèrent à la catastrophe de 1914 (et au grand dam des moralistes progressistes), il devint de plus en plus évident que le vice ne pouvait aucunement être chassé seulement par la compassion et par la générosité ; que la criminalité « de victime » devint de plus en plus difficile à justifier ; que la débauche populaire ne pouvait plus s’expliquer, à la manière d’un Charles Dickens, ou d’un Victor Hugo, uniquement par l’asservissement indigent du peuple ; qu’il y avait, enfin, aussi le vice volontaire (déjà subtilement signalé, en fait, par Goldsmith, dans le comportement ambigu d’Olivia, victime à la fois innocente et complaisante) ; que la nouvelle liberté, et la nouvelle prospérité, en avaient maintenant fait un choix ; et que la délinquance ne fut pas tant un attribut de la misère ; mais semblait croitre, au contraire, avec la liberté.

Comment expliquer autrement, d’ailleurs, cette évidence limpide que, depuis tout temps, les comportements les plus « criminels » eussent été le fait des personnes les plus riches et les plus libres ? Pourquoi les classes plus modestes agiraient-elles de manière différente, une fois placées devant la même réalité de choix ?

Aussi, arrivée circa 1900, à la fine pointe de cette dynamique, la société avait clairement identifié un nouveau danger, important, qui résidait dans l’industrialisation de la production des stupéfiants (voire : l’alcool). Et cette société avait même imaginé un remède rationnel, pour ce fléau, qui fut la Tempérance volontaire. Mais, encore là, face à la généralisation grandissante de la délinquance de choix, ce programme de persuasion s’est vu transformé, peu à peu, dans une nouvelle proposition de méthode plus musclée (de nature franchement répressive, celle-ci) qui fut la Prohibition.

Et puis, sur ces entrefaites (et tel que décrit plus avant) arriva la « Grande Guerre pour en finir avec toutes les guerres ». Et puisque ce conflit fut décidé par la force nouvelle, économique et militaire du nouveau monde, la culture populaire américaine débuta, également, son ascendance centenaire.

À suivre …

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Poursuivre la lecture du texte en séquence linéaire… (Tome Premier : L’euthanasie et le choix — Partie C : l’euthanasie et la médecine — Section III : Une société en rupture — Chapitre : La rencontre des cultures, américaine et continentale, occasionnée par la rassemblement des armées alliées sur le sol français, 1914 – 1918)

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