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Chapitre : Au-delà du cadre médical : la mort assistée en phénomène de mode populaire - Euthanasie : De la discussion jaillit la lumière

Chapitre : Au-delà du cadre médical : la mort assistée en phénomène de mode populaire

(Tome Premier : L’euthanasie et le choix — Partie B : l’euthanasie et la clientèle — Section III : La « Pente Glissante » — Chapitre : Au-delà du cadre médical : la mort assistée en phénomène de mode populaire)

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Derek Humphry (1930 – ) : Auteur du livre fétiche « Final Exit » et fondateur du « réseau d’auto délivrance » du même nom. Humphry fut probablement le plus influent des architectes post-fascistes du « droit de mourir ».

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— La satisfaction mal ébauchée du droit de mourir présenté en phénomène médical

     Quand nos législateurs s’accouchèrent des mandats de mort médicalement assistée (Québec 2014, Canada 2016), le but de ces innovations visait, avant tout, les soins de fin de vie ; car pour bénéficier de « l’aide médicale à mourir » fallait-il, d’abord, que le patient ait été très près de la mort naturelle. De plus, ces lois furent assorties de d’autres « sauvegardes » diverses qui se voulaient très sévères.

     Cependant, des deux personnes les plus influentes dans la suite des contestations légales qui avait abouti à ce résultat – c’est à dire, Sue Rodriquez et Kay Carter – ni l’une ni l’autre ne se trouvait objectivement en « fin de vie » (ni, d’ailleurs, en proie aux « souffrances intolérables »).

     Dès le départ, alors, la réponse législative se trouvait non seulement nettement en deçà des revendications présentées, mais aussi : franchement à la remorque de la réalité courante.

— La vraie histoire récente de la mort assistée par médecin

     Tel que relaté — il y a trente ans, déjà, et plus de cela — il y avait nombre de médecins (et de pharmaciens) prêts à collaborer dans l’accomplissement de suicides assistés, et notamment parmi ceux qui se soient associés au mouvement de sympathie qui accompagna l’épidémie du SIDA.

     En plus, nous avons remarqué que l’un de parmi eux – jamais publiquement identifié – agissant de concert avec Sue Rodriguez, demanderesse vedette devant la Cour Supreme, et avec Svend Robinson Membre du Parlement — aurait carrément mis le Gouvernement du Canada au défi, en pratiquant la mort assistée de Mme. Rodriguez, à l’encontre exprès du jugement rendu, et ce de manière quasi-publique.

— Les implications pour l’évolution des lois futures

     Il s’en suivrait, je soumets, de simple logique devant les faits observés, qu’un médecin volontaire, agissant de nos jours avec le même éclat public et avec le mémé désir de provoquer l’engagement d’une véritable cause célèbre – un médecin qui enfreindrait délibérément les paramètres actuels, par exemple, à l’instaure du feu Dr. Henry Morgenthaler (1923 – 2013), qui commercialisa ouvertement sa pratique illégale d’avortement dans les années 1980 — serait ignoré, lui aussi, par un pouvoir peu incline à subir, encore, telle humiliation devant une épreuve semblable.

     Plus encore, et de toute façon : aucun médecin Canadien n’a jamais été condamné (ni même formellement inculpé) pour des gestes semblables, et ce, depuis la décriminalisation des tentatives de suicide de 1972. Ajouter à cela que toute supervision des pratiques actuelles de l’euthanasie dépend d’une récolte de données effectuée sur la simple déclaration du professionnel pratiquant ; et représentez-vous, alors, la véritable efficacité des « protections » « limites » et « sauvegardes » incorporées avec tant de sincérité naïve dans les lois que nous connaissions !

     En réalité, je soumets, regardée sans complaisance et avec une réflexion conséquente, il nous apparaitrait que la fourberie cynique avec laquelle ces garanties furent offertes, à l’époque, n’avait d’égale que dans l’auto-déception accommodante par laquelle elles furent reçues.

     Mais encore là, ce n’est pas tout : car l’assistance au suicide n’est manifestement pas le monopole des seuls médecins.

     Ce fut — et ce l’est toujours — l’affaire d’un peu tout le monde.

— La nature contextuelle du lien malheureux qui associe le suicide assisté aux professions médicales

     L’acte de tuer n’est pas très compliqué. Quand nous parlons, en fait, des difficultés d’effectuer une mort paisible, il s’agit surtout des difficultés de produire une mort qui soit acceptablement paisible pour des tiers. Car l’application de force brute, telle l’application traditionnelle de l’arme à feu à la boite crânienne, résulte dans une mort essentiellement instantanée, et objectivement sans douleur. Une grande partie, alors, de l’avantage de la médicalisation de la mise à mort se trouve dans la dissimulation de la violence intrinsèque du geste ; si bien que dans la longue période d’illégalité antécédente, le médecin complaisant pouvait agir, face à l’assassinat simple — autant que le suicide — avec une discrétion presqu’indétectable. Une légalisation, par contre, et surtout une légalisation informelle à l’image de la période intérimaire de vingt ans qui suivait la mort impunie de Sue Rodriguez (1993), joue dans le sens d’une démocratisation plus large de la mise à mort.

     Déjà au cours de l’épidémie suicide-sida, les médecins ne servait habituellement qu’à fournir les substances nécessaires. Et ensuite, avec un appel plus fréquent à d’autres méthodes létales, les médecins, et la médecine, se trouvaient progressivement écartés de cette pratique. Il ne serait pas trop, même, à imaginer que la légalité du suicide assisté — et possiblement la création d’une nouvelle profession règlementée à cette fin — ait pu épargner les médecins et libérer la médecine, une fois pour toutes, de cette association sordide. Ce qui en fit, très possiblement, une belle occasion ratée.

   — Les apôtres de l’assistance non-médicale : Hofsess et Humphry

     À l’époque, John Hofsess, celui qui promit à Sue Rodriguez une voie de justice médiatisée vers la mort et l’immortalité, s’est peut-être révélé d’un amateurisme peu flatteur à côté de l’efficacité sobre de Sven Robinson. Mais par la suite (circa 1997), son organisation (Right to Die Society, Canada) s’est transformée, d’une organisation vouée uniquement à la contestation politico-légale (à l’image de la Voluntary Euthanasia Society en UK), dans un réseau d’assistance pratique au suicide (Right to Die Network, Canada), selon la tendance lancée par Derek Humphry (1930 – ), qui fut successivement fondateur de l’Hemlock Society (1980), l’Euthanasia Research & Guidance Organization (1993), et le Réseau Final Exit (2004) ainsi que l’auteur de plusieurs livres populaires sur la méthodologie du suicide, dont : Jean’s Way (1978), Let Me Die Before I Wake (1982), et Final Exit (1991).

     Suivant l’inspiration de Humphry, et selon son propre récit posthume, John Hofsess affirma avoir tué huit personnes sans être incommodé par la loi.  De plus, même si sa collaboratrice principale, Evelyn Martens, fut arrêtée en rapport avec deux autres cas pour lesquels Hofsess nia toute connaissance, la poursuite s’est terminée, cette fois aussi — à la Rodriguez — sans condamnation.

     Or, les actions de Hofsess, et de Martens, ne se produisirent pas dans un vacuum.

— Une description schématique du mouvement « Right to Die »

     À l’heure actuelle, les professions médicales agissent selon un mandat d’euthanasie ostensiblement limité par des critères d’éligibilité, et par des modalités d’application, qui se veuillent très strictes. Pourtant les quelques médecins enthousiastes de cette tendance ont déjà trouvé les moyens pour élargir ces barèmes, considérablement, de manière informelle. Et compte tenu du fait qu’il n’y a jamais eu (de mémoire récente) des punitions pour de telles infractions (même avant l’assouplissement de la loi) : pourquoi en craindraient-ils maintenant ?

     En même temps (fait qui milite encore plus fortement pour une interprétation complaisante des règlements en vigueur), le cadre médical existant se trouve attaqué en permanence par un lobby dont le but annoncé serait d’atteindre, par étapes, un aboutissement final qui garantirait, à toute personne « rationnelle », un droit de décision libre face au moment, et à la méthode, de sa mort.

     Au niveau structurel, ce mouvement comprend des organisations tel « Dignity in Dying », et « Compassionate Choices », qui sont les successeurs modérés des anciennes sociétés « Voluntary Euthanasia » (UK) et « Hemlock » (U.S.A.), et dont le rôle se résume à pousser ouvertement un agenda législatif.

     Mais ce n’est pas tout, car selon la meilleure pratique de toute tendance révolutionnaire, le mouvement « Right to Die » se trouvent aussi représenté par plusieurs échelons d’organisations, et d’individus, dont les agissements se veuillent distincts mais complémentaires. Et en premier parmi ces groupes — de visage plus discret mais d’action plus directe — se trouvent le Réseau Final Exit (Final Exit Network), qui fut la dernière métamorphose organisationnelle inventée par Derek Humphry (2004), et l’Exit Internationale de Philip Nitschke (1997).

— Les « réseaux d’auto-délivrance »

     Nés dans la frustration, et dans l’impatience, les « réseaux » (dits « d’auto-délivrance ») s’accordent pour définir leur raison d’être dans un besoin d’agir (maintenant et partout), pour faciliter le suicide : quelles que soient les raisons invoquées ; et quelles que soient les conditions de légalité dans chaque endroit. Leur doctrine, donc, en est une de désobéissance civile, c’est à dire de contravention stratégique des lois existantes.

     En priorité, ces organisations se donnent à la formation d’accompagnateurs de suicide (nommés par eux des « guides ») ; au développement d’informations et de moyens techniques pour faciliter la mort ; et à la diffusion de ces ressources auprès des suicides potentiels. Cependant, quoique très résolues dans leur appel aux actions poussées à l’extrême limite de l’acceptable, elles demeurent prudentes, également, et se tiennent toujours prêtes à se dissocier des actions plus controversées de leurs adhérents … sans désapprouver celles-ci, ni les condamner pour autant.

    Or, en dernier lieu, là où la vraie besogne s’accomplit, il se trouvent les militants « guides » formés par ces réseaux souples et décentralisés ; des personnes de ressource et de soutien, qui choisissent de se mettre à la disposition des individus suicidaires selon le principe que « personne (sic) ne doit se croire obligée de mourir seul ».

— Les « guides » au service des suicides

          Il existe, bien sûr, une ambiguïté entre le rôle simple de témoin au suicide et l’implication active qui se définisse toujours en crime (sauf exception médicale). Ces individus, donc, demeurent responsables devant la loi pour leur comportements personnels, même s’ils exploitent les portails de communication de leurs organisations pour entrer en contact avec des suicides potentiels. Or, selon ce modèle d’action, les relations entretenues, les informations et les encouragements offertes, ainsi que les gestes possiblement posés, restent des faits privés dont la portée se baliserait uniquement par les dictats personnels de la peur et de l’audace.

— Les aboutissements pratiques de toute cette énergie organisationnelle, pluri-générationnelle : le témoignage de John Hofsess

     Voilà donc, pour la théorie (de la séparation des rôles qui caractérise, à la fois, la revendication ouverte, et la pratique clandestine, des mouvements révolutionnaires). Les êtres humains, cependant, étants ce qu’ils ne le sont, il existe toujours des individus pour enjamber et confondre ces barrières structurelles et stratégiquement protectrices.

     Et c’est ainsi que nous nous apercevions encore de l’exemple révélateur de John Hofsess, homme qui eut poussé l’audace jusqu’à tuer huit personnes — se rééditant clandestinement en ange de la mort – au moment même où il cultivait assidument l’image publique d’un chef organisationnel voué exclusivement aux méthodes légales !

     Décidément, nous portons une dette importante à l’endroit de l’orgueil et du narcissisme qui nous ait légué les précieuses informations recueillies dans ses « explications » outre-tombe ! Car grâce à cet homme, et grâce à de nombreux autres qui se contentèrent d’agir dans un anonymat plus modeste, nous nous devons maintenant de constater l’existence d’un phénomène de suicide, et de suicide assisté, en partie légal, et en partie clandestin, qui dépasse de loin la portée, non seulement des lois existantes, mais du cadre médical à l’intérieur duquel ces lois furent érigées.

— L’importance du phénomène suicide en mode populaire

     Quelle est l’étendue réelle de ce phénomène ? Au juste, nul ne le sait ; mais une porte-parole, à l’époque, nous en aurait donné un indice à cet égard : car celle-ci tenait à signaler très particulièrement le sacrifice et la générosité de Sue Rodriguez, — témoignés en offrant son expérience personnelle comme matière de réflexion publique – « plutôt (sic) que de se prévaloir, tout bonnement, des services clandestins d’assistance au suicide existants, comme faisaient de centaines de Canadiens chaque année ».

     En avait-il, peut-être, de la bravade exagérée dans ces paroles ? Il semblerait, pourtant, impossiblement naïf de les discréditer entièrement.

— La fameuse « pente glissante » se révèle en illusion ; une métaphore depuis longtemps dépassée

    Voilà, à la fin, un portrait fidèlement peint, non de la spéculation au sujet du futur, mais de la réalité passée et présente. À tout fin pratique : nous avons déjà un régime de liberté quasi-complète à l’égard du suicide assisté. Et le réalignement de nos lois avec cette évidence ne serait, vraisemblablement, qu’une simple question de temps.

     Or, vue de cette perspective, je crois pouvoir affirmer que la pente glissante spéculative soit, en réalité, une image inadéquate ; car il s’agit, plutôt, d’un iceberg existant dont l’ampleur submergée ne fait que se révéler progressivement. Et les élargissements visibles dans le phénomène pratique du suicide assisté — remarqués au présent (et redouté pour le futur) — ne sont pas des nouveautés dues aux dérapages, mais simplement des découvertes faites à la lumière d’une retraite de la clandestinité, rendue progressivement superflue.

     Dans une société où l’internet abonde de sites consacrés à la discussion et à la facilitation du suicide ; l’on y trouve autant l’encouragement et la validation des désirs que les descriptions techniques — limpidement détaillées — des moyens « sécuritaires » qui en permettraient l’accomplissement ; dans une société, enfin, où de tels propos et de telles informations circulent sans entrave, et où l’on y entre facilement en contact avec des gens qui se montrent empressés de nous en faire la recommandation intime ;  où des gens bien en vue organisent, impunément, des célébrations publiques de suicides particuliers, au terme desquelles les convives se félicitent d’avoir prêté une assistance au moins symbolique (et bien plus pour certains) ; dans une telle société : ce serait difficile de soutenir la prétention qu’il existe encore des barrières réelles au suicide libre, assisté où autre.

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Evelyn Martens (1931 – date inconnue) : collaboratrice homicide de John Hofsess, et agente indépendante de « suicide » assisté. Malgré la pratique établie dans ces pages, de montrer tous les acteurs principaux à cette histoire, je trouve, personnellement, la physionomie de cette femme trop troublante pour exposer.

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Poursuivre la lecture du texte en séquence linéaire… (Tome Premier : L’euthanasie et le choix — Partie B : l’euthanasie et la clientèle — Section III : La « Pente Glissante » — Chapitre : Au-delà du suicide et de la mort volontaire, au bas de la Pente, se trouve l’euthanasie simple)

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