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De retour à la liberté - Euthanasie : De la discussion jaillit la lumière

De retour à la liberté

(Tome Premier : L’euthanasie et le choix — Partie B : l’euthanasie et la clientèle — Section III : La « Pente Glissante » — Chapitre : De retour à la liberté)

— Un constat (provisoire) d’incohérence et d’échec

Au début de notre évocation de la fameuse « pente glissante », nous nous sommes interrogés sur l’efficacité de strictes critères médicaux pour limiter la descente.

Décidément, il semblerait que cette enquête nous ait mené directement vers un constat aussi déroutant que catégorique : Non seulement les critères retenus ne font aucun obstacle fiable à la libéralisation progressive du suicide assisté comme tel (sous couverte de l’euthanasie volontaire), mais ces critères ouvre inévitablement la voie, aussi, vers une pratique — tout à fait étrangère aux justifications originalement offertes — d’euthanasie simple. Et ce qui plus est : la nature, même, de ces critères est largement sans importance. Car seule importe, à la fin, l’acceptation du principe de médicalisation qui s’en trouve sous-entendu.

Forcement, c’est la simple existence de tels critères qui garantit, à toute fin pratique, la dévalorisation des vies des personnes malades ou handicapés (en fonction de leur état médical) et en suite logique : garantit un dérapage vers l’euthanasie des malades et des handicapés incompétents également (en autant que les critères soient autrement satisfaits). Nous nous trouvons, même, accablés devant ce constat terrible : qu’il ne manque plus que la définition de l’incompétence en soi — ou si l’on préfère, de « l’incapacité » — comme une « affection ou un handicap grave et incurable » pour justifier l’évacuation simple de toute cette classe de personnes !

Aussi, en attendant, il existe une dynamique de renforcement mutuel entre ces deux phénomènes, de sort que : plus soit élargie l’enveloppe autour des conditions jugées appropriées pour l’euthanasie des gens compétents, d’autant plus sera élargi le champ autorisé des interventions euthanasiques pratiquées sur ceux qui ne le sont pas ; et plus l’euthanasie des incompétents sera normalisée, plus la demande d’euthanasie des compétents s’anticipera comme une conclusion attendue.

En somme, les prétendus bénéfices limitatifs des critères médicaux sont essentiellement nuls. Mais les pertes, elles, sont bien réelles, et se révèlent comme telles, progressivement, avec le passage du temps.

— Une comparaison surprenante à l’avantage de la liberté subjective

Par souci de comparaison, nous avions également identifié des avantages certaines dans l’octroi simple d’un droit de mourir sans justification médicale aucune. Il n’y aurait pas, dans tel scenario, de nouvelle discrimination directe à l’égard de la personne malade ou handicapée ; il n’y aurait pas de vandalisme pratiqué à l’égard des institutions médicales ; et surtout, il n’y aurait pas de dérapage social vers une validation objective du suicide, et donc, vers un régime d’euthanasie utilitaire.

Surgit, alors, de nouveau, — et même pour ceux qui demeurent opposés, en principe, à toute forme de suicide — la question d’épouser franchement la liberté subjective dans cette matière. Car du moment que nous nous trouvions obligés à vivre avec les séquelles négatives d’une telle liberté, il serait inutile de s’en priver des bénéfices. Il serait, surtout, proprement horrifique de subir, en plus, les effets pervers des mécanismes tant maladroitement choisis pour les contenir.

Toutefois, la simplicité du théorique ne peut que difficilement s’exprimer dans le contexte actuellement embrouillé des compromis du réelle. Car, nous nous trouvons déjà franchement engagés sur la voie horrible de la médicalisation objective. Comment alors, rebrousser chemin? Comment affirmer, dans ces circonstances, la grâce rédemptrice du choix subjectif ; grâce qui réside dans une distinction cruciale entre ce qui est seulement « permis », et ce qui soit officiellement sanctionné en « bien »?

Pour répondre à cette question, il faudrait, de nouveau, quitter le terrain théorique pour nous situer dans le contexte politique spécifiquement canadien. Par contre, tout ce qui suit serait applicable, aussi, aux autres pays, selon leurs situations particulières.

— Situer ces évidences à l’intérieur des grands thèmes contemporains

L’erreur fondamentale des adversaires de la mort assistée, au Canada, fut de mal comprendre la signification de la cause célébré « Rodriguez » (1993). Car cette cause, quoique formellement perdue par la requérante, fut définitivement gagnée au niveau politique. Et la preuve de cette assertion, telle que nous l’ayons décrite précédemment, se trouve dans la façon provocante, et presque publique, que Mme Rodriguez et ces alliés défièrent ce jugement de la cour, et ce, sans que personne n’ait subi de pénalité légale. Aussi, depuis cette date (et même des décennies plus avant), aucun médecin ne s’est jamais vu traduire devant la justice pour avoir assisté au suicide d’une personne consentante.

Il se trouva, alors, vingt ans plus tard, au moment de « Carter » (et des discussions autour de l’éventuelle loi C-14), que l’empereur avait été — depuis belle lurette déjà, et de manière très évidente — objectivement tout nu. Visiblement, aucune des arguments en faveur du bien supérieur, ni des malades-handicapés, ni de la profession et de l’industrie médicales — ni même de la société dans son ensemble — ne pouvaient prévaloir devant cette affirmation simple de l’autonomie personnelle.

À plus forte raison que la lutte du droit de mourir ne s’est pas opérée seule, ni dans un vide social.

Contextuellement, au contraire, l’hypothèse d’admettre que la société ait pu se protéger, en supprimant le choix individuel de suicide assisté, impliquerait la possibilité de réintroduire ce principe dans d’autres débats, aussi, d’origine récente, coïncidents, et des plus émotifs, c’est à dire : le refus de service militaire ; le divorce ; l’avortement libre ; la consommation des stupéfiants ; et l’homosexualité non-dissimulée.

Cette dernière exemple, d’ailleurs (la lutte des homosexuels pour accéder à la liberté d’expression sexuelle), s’est trouvée explicitement associée au droit de mourir pendant l’épidémie récente du Sida, et donc, en même temps que la progression du débat, autour du suicide médicalisé, vers le résultat que nous connaissons.

Demandons-nous, alors, avec la lucidité qui nous soit fournie par ce court recul historique, si les droits spécifiques des personnes handicapées non-suicidaires, ou ceux des médecins dissidents en situation de violation de conscience, auraient pu, dans aucune scenario possible, prendre précédence sur le déplacement observé, de la société contemporain, vers une liberté complète dans toute question de moralité personnelle ; et la réponse, je crois, ne pourrait porter aucun doute. En réalité, je soumets, il n’y avait jamais la moindre possibilité que le « droit de mourir » ait pu être catégoriquement refusé.

Et très tragiquement, en épousant quand-même cette stratégie si clairement destinée à l’échec, nous eurent exposé, aussi, les droits des handicapés et des médecins à la critique arrogante des apôtres de la liberté ; et pire encore : avec le rejet cavalier et inévitable de ces droits dans la décision législative retenue, il nous a resté une perception publique, très malheureuse (et non moins injuste) que les préoccupations majoritaires des malades/handicapés non-suicidaires, ainsi que celles des professionnels qui sont voués à leur support, ne représentent, à la fin, que peu de chose.

— Répudier la justification médicale

Or, c’est dans les décombres de cette défaite tactique que nous nous devions de chercher, aujourd’hui, les bases conceptuelles d’une politique future plus prometteuse. Et heureusement, pour l’essentiel, ce travail existe déjà prêt, à portée de la main. Car depuis le début de ce débat inachevé, il existent aussi des voix plus lucides, emmenant plus particulièrement de la communauté des personnes handicapées, qui eurent avancé une vision plus pragmatique : ou le droit de mourir serait concédé, peut-être, mais ou la médicalisation de ce droit serait refusée ; et avec elle, tous les pires torts de l’euthanasie qui se sont gratuitement empilés, par dessus ceux du simple suicide volontaire (assisté ou autre).

Bien sûr, même trente ans après « Rodriguez » la grande majorité des adversaires de la mort assistée caressait (et peut-être caresse toujours) l’illusion de pouvoir limiter le droit de mourir, en utilisant les pauvres « sauvegardes » objectives de la science médicale.

Mais il serait aussi permis d’espérer que l’échec cuisant, subit dernièrement devant l’adoption de la loi C-7 (et l’élargissement massif des critères d’éligibilité qui s’ensuivit), ait pu, enfin, enlever une partie de l’attrait séducteur de ces illusions désastreuses.

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Poursuivre la lecture du texte en séquence linéaire… (Tome Premier : L’euthanasie et le choix — Partie B : l’euthanasie et la clientèle — Section III : La « Pente Glissante » — Chapitre : De retour à la liberté — Le principe de liberté subjective présenté en programme de soutien à la vie)

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