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Le Décalogue (ou Dix Commandements) : Le point de départ pour une véritable morale catégorique, de confession personnelle - Euthanasie : De la discussion jaillit la lumière

Le Décalogue (ou Dix Commandements) : Le point de départ pour une véritable morale catégorique, de confession personnelle

(Tome Deuxième : Sous l’ombre de l’euthanasie — Partie C : L’euthanasie et l’idéologie — Section III : Le patrimoine philosophique ancestral : le caractère sacré de la vie ; la valeur intrinsèque de l’individu humain ; les origines divines de « l’égalité » politique — Chapitre : Le Décalogue (ou Dix Commandements) : Le point de départ pour une véritable morale catégorique, de confession personnelle)

Moïse et les Dix Commandements (1648) de Philippe de Champaigne (1602 – 1674)

— Un histoire ancestrale dont la familiarité nous obscurcit l’essence révolutionnaire

Après le sacrifice d’Issac (décommandé par Jéhovah dans sa caractère miséricordieux de Dieu paternel), je signalerait, aussi, le récit du don des Dix Commandements, par Jéhovah à Moise, comme l’un des bijoux bibliques ayant le plus contribué à l’idée traditionnelle d’une valeur sacrée (ou intrinsèque) à la vie humaine; et en particulier, cette injonction universellement connue :

Tu ne tueras point.

Pour le lecteur présent, cette injonction peut sembler évidente, comme la condition nécessaire de toute société harmonieuse. Mais cette impression, cependant, vient surtout de la pénétration historique de cette idée, dans les profondeurs de la psyché collective, suite à trente-cinq siècles de répétition. Ainsi, le lecteur typique, en Occident, se serait très largement formé dans cette tradition morale, qu’il n’en ait, ou qu’il n’en ait pas, été conscient. Et cette formation se serait typiquement produite, aussi, avec ou sans connaissances, directes, des sources religieuses à sa base. Mais en réalité, et très loin des certitudes encore ambiantes, ces admonitions morales se portent objectivement en contresens: et, aux présomptions qui dominaient les comportements humains au moment de leur énoncé; et aux principes fondamentaux des idéologies modernes.

Il s’en dégage, donc, un constat, aussi significatif que surprenant, au sujet de la nature radicale des commandements livrés à Moise, non seulement dans ce contexte lointain, mais bien, dans notre présent également.

— Les reflets du passé

Au sein de toutes les sociétés réellement primitives (ainsi que d’autres, quelque peu plus sophistiquées mais toujours non sujets à l’autorité des hiérarchies civilisées): la violence personnelle sert, en dernier ressort, comme le moyen privilégié pour régler tout différend. Pour s’en persuader, d’ailleurs, il suffit de regarder les comportements compétitifs de nos proches cousins — chimpanzés et gorilles — et

de transposer mentalement leurs manifestations vigoureuses, d’affirmation personnelle, dans une société humaine dont l’attribut principal s’illustrait, par excellence, dans le perfectionnement des armes. Car, tristement, la réalité ne diverge, aucunement, des attentes soulevées par un tel exercice imaginaire.

Habituellement, donc, la dominance sociale (ainsi que tous les circonstances qui s’y rattachent), dépendait d’une intimidation implicite, et au besoin: d’une démonstration ouverte de la force. La possession d’un objet de valeur, d’un emplacement physique (stratégique ou fertile), d’une femme en particulier (ou simplement le droit de choisir en premier), tout cela (en plus du pouvoir discrétionnaire exécutif lui-même, dépendait des capacités de violence personnelles, ou à tout le moins, du support d’individus munis de telles capacités.

Visiblement, l’accès au statut social de membre entier, passait, au moins par l’empressement (présumé) de s’engager dans des combats mortels; et dans grand nombre de peuplades, cette appartenance au corps adulte fut réservée, uniquement, pour ceux qui en avaient réellement livré. Sans détour alors: il s’agissait souvent de tribus au sein desquelles l’homicide se présentait simplement en droit de passage adolescent, et où, en tout cas, l’estime réservée pour chaque membre adulte en dépendait très fortement.

James A. Michener (1907 – 1997) nous en parle dans son livre, “Pacifique sud” (Tales of the South Pacific, 1948), de ses propres observations, auprès de tribus encore peu connues, des Îles Salomon et la Mer de Corail, subitement envahies par la présence moderne des Américains et des Japonais, au cours de la Deuxième Guerre Mondiale. Il nous apprend, ainsi, que les notables locaux avaient l’habitude de décorer les sentiers menant à leurs demeures avec des pierres en bordure, dont chacune représentait un ennemi abattu. Michener raconte, en particulier, comment un certain personnage très illustre des environs, exhibant pas moins de douze pierres, avait été tué de manière inattendu par un rival, qui n’affichait, pourtant, que trois seulement.

En fait les exemples de tels comportements — exhibant des bijoux, des tatouages, des trophées devant (et dans) les résidences (et cela, chez les habitants de tous les continents) — sont parfaitement bien documentés, et nous enseignent que le fait de tuer ne faisait aucunement une occasion de remords, normalement, mais de grande fierté plutôt.

Il nous serait permis, alors, de remarquer, encore, sur la nature tout à fait extraordinaire d’une proscription catégorique d’homicide, parmi des personnes vivant au moment où Jéhovah est réputé avoir visité Moise (voire : 13-15 siècles av. J.-C.). Car même si nous stipulons que l’application pratique de cet interdit ait toujours comporté d’importantes nuances, force serait d’admettre que la prohibition, elle-même, fut couchée dans une forme qui suggère, très clairement, une intention absolue; intention (comme nous l’avons déjà remarqué) d’un radicalisme presque inconcevable quand elle serait considérée à la lumière des comportements humains réellement observés.

— Un système qui se veuille des plus compréhensifs

En partant, d’ailleurs, non seulement l’acte homicide, mais aussi les mobiles les plus fréquents avaient été ciblés par le Décalogue, avec l’interdiction parallèle du vol (Tu ne volera point). Et pourtant ! L’acte de tuer, pour s’emparer des biens et des avantages d’autrui, était une pratique quasi-universelle, et habituellement représentée, aussi, comme une exploite glorieuse. De plus, nous nous apercevons de toute l’énergie sophiste employée pour signaler les homicides “biens”; pour se convaincre, par exemple, que la franche utilisation de la violence — dans la conquête, la rapine, et l’extermination des voisins — soit une poursuite noble, aucunement apparentée aux mèmes actions louchement perpétrées, en meurtres furtifs, et en vols dérobés. (Ou comme disait ce chef de pirates, sur la côte syrienne, qui avait réussi à capturer, et même à extorquer une riche rançon de Jules César — mais qui fut tout de même crucifié par ce dernier dans une occasion subséquente: “Celui qui se place à la tète des légions, pour voler, s’appelle un grand conquérant. Mais celui qui fait la mème chose avec six navires s’appelle un criminel…”).

Selon cette vision de l’homme, donc, les mauvaises intentions sont présumées d’abord.

— Solliciter une adhésion volontaire, où l’on juge non seulement des gestes, mes des intentions

Or, d’après l’esprit apparent des Dix Commandements, il n’en est rien. Car dans cet esprit, intentions et gestes ne font qu’un. Le Décalogue s’adresse, donc, non seulement aux comportements, mais bien, aux sentiments des fidèles; et exige, ainsi, rien de moins qu’une pureté d’intention, qui dépasse, et de loin, le simple évitement de gestes formellement criminalisés:

Tu ne convoiteras point — la maison de ton prochain… la femme de ton prochain, ni son serviteur, ni sa servante, ni son bœuf, ni son âne, ni aucune chose qui lui appartienne.

Clairement, ce qui est recherché dans ce texte, c’est la sollicitation d’un respect réel, chez l’auditeur à l’égard de son prochain, qui ne consiste pas dans un simple observance des édits répressifs (prodigués pour gouverner une compétition présumée outrancière, sanguinaire et apparemment permanente); mais qui relève, au contraire, d’une sincère bénévolence à son endroit.

— Une distinction essentielle entre l’exhortation morale et la répression criminelle

Voilà, dans cette intention, la différence fondamentale qui distingue le Décalogue face aux codes de loi séculaires du même période, tel celui du roi Hammourabi (Babylone, 1792 – 1750 Av. J.-C.): Car le Décalogue ne distingue pas de cas précis (la morale énoncée n’étant pas de nature relative ou contextuelle), et il ne définit pas de pénalité (puisque son objet n’est pas d’imposer la paix civile par voie de répression temporelle). Les Commandements indiquent, plutôt, un chemin vers la vie morale, fournit à l’intention de ceux qui épouseraient d’eux-mêmes cette voie idéelle, en signe d’appartenance au dieu Jéhovah. L’effet éventuellement produit, alors, ne s’est aucunement restreint à une contrôle minimale des pulsions criminelles, mais se serait élargi progressivement vers la satisfaction de ce désir positivement éveillé, de chasser l’homicide catégoriquement; désir qui s’est manifesté, en maints lieux et de maintes façons: par une délégitimisation de la peine capitale; par un respect des personnes malades et mourantes; par une importante résistance au conflit armé; et même (parmi certaines factions héritières de cette tendance) par un pacifisme intégral.

Et c’est ainsi que je me permettrait, ici, d’inviter le lecteur à oublier les diverses controverses érudites à l’égard du Décalogue: les incertitudes chronologiques; les sources multiples; les influences extérieures (contemporaines et antérieures). Car quelque soit l’intérêt propre à ces questions périphériques, elles ne changent en rien l’importance extraordinaire du phénomène comme tel.

— Le patrimoine abondant du Décalogue

Considérant les tendances naturelles de l’être humain — et les évidences constantes de notre histoire — qui nous déconseilleraient, comme absurde, tout espoir de supprimer l’homicide (et par extension de supprimer tous les méfaits à l’égard d’autrui);

Considérant, aussi, les effets incalculables de l’application volontaire de ce simple modèle de comportement personnel;

Considérant, enfin, que cet idéal ait réellement pénétré la conscience collective, au point de devenir (après plus de trois millénaires) une simple évidence reçue pour la plus grande partie des gens, sur au moins deux continents:

Il semblerait indiscutable, alors : que cette tentative d’enrayer non seulement les mauvais comportements, mais les mauvaises intentions, aussi; non conditionnellement, mais de fond en comble; de manière nette, véritable, active et volontaire: ait constitué un point de départ tout aussi important, pour la spéculation morale, que celui produit par l’invention de la roue s’était révélé, dans le domaine technique.

Aussi, sans y faire directement référence, cette innovation s’inscrit, très clairement, dans la voie d’une présomption de valeur intrinsèque à l’être humain; une présomption qui s’exprime par un respect, à l’égard de l’autre, de la même essence divine que les fidèles croient découvrir, chacun, à l’intérieur de soi; un respect nourri par la conscience d’une relation filiale partagée, à l’endroit du Père commun.

Pacifique sud (1947, Prix Pulitzer), premier roman de James A. Michener : une fenêtre sur la guerre, et sur la vie des îles Pacifiques, subitement envahies par le monde moderne

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